31 décembre 2007

Changement de phase - bis

"Je pense qu'on vit une révolution comparable à celle du XIXe siècle, lors du passage au capitalisme industriel. Dans ce système, même quand on dénonçait son pire aspect, qui est l'exploitation de l' homme par l' homme, il y avait l'homme - exploité ou exploiteur. la particularité de l' économie actuelle, du néocapitalisme financier, c'est que l'homme disparaît - qu'il soit exploiteur ou exploité. Prenez une entreprise qui est rachetée par un fonds de pension ou de placement, les travailleurs de cette entreprise ne savent pas qui est le propritétaire et les propriétaires ne savent pas de quoi ils sont propriétaires. "

Jean-François Kahn, directeur-fondateur de l' hebdomadaire "Marianne", dans une interview au quotidien Le Soir, 28/12/2007.

Changement de phase

"Quelque chose est à bout de course dans les grands systèmes religieux qui ont réglé le sexe, la mort ou l'imaginaire. Mais les bousculer avec notre frénésie d'objets inutiles aboutit à revitaliser leur part la plus stupide".

Olivier Germain-Thomas, in "Le Bénarès-Kyoto", Ed. du rocher, récit de voyage, prix Renaudot de l' essai 2007

25 décembre 2007

Le bonheur, encore

"Le commencement du bonheur, c'est de renoncer aux plaisirs qui ne font pas plaisir."
Claude Roy . La Fleur du Temps.
Je vous souhaite une bonne fête de Noël

24 décembre 2007

Le voyage de retour

"«Pourquoi le sentiment s’est-il ancré en moi de bonne heure que, si le voyage seul - le voyage sans idée de retour - ouvre pour nous les portes et peut changer vraiment notre vie, un sortilège plus caché, qui s’apparente au maniement de la baguette de sourcier, se lie à la promenade entre toutes préférée, à l’excursion sans aventure et sans imprévu qui nous ramène en quelques heures à notre point d’attache, à la clôture de la maison familière ?»

Julien Gracq, géant des lettres françaises, auteur du «Rivage des Syrtes», est mort samedi, à 97 ans.

22 décembre 2007

L'Utopie de Moore

"La Nature (disent les Utopiens) invite tous les hommes à s'entraider mutuellement , et à partager en commun le joyeux festin de la vie . (...)
La Nature a donné la même forme à tous ; elle les réchauffe tous de la même chaleur , elle les embrasse tous du même amour ; ce qu'elle réprouve , c'est qu'on augmente son bien-être en aggravant le malheur d'autrui ."


Saint Thomas More (1478-1535)
théologien et philosophe humaniste anglais
"L'Utopie ou le Traité de la meilleure forme de gouvernement"

20 décembre 2007

Zen

"La méditation permet d'ouvrir l'esprit à toute la farce du monde."

Martine Seguy

17 décembre 2007

Un homme à cheval

"Longtemps jeune fille j'ai rêvé d'être enlevée par un homme à cheval. Il a tardé un peu, mais l'essentiel est qu'il m'ait emmenée."
Marthe, dans La femme coquelicot, téléfilm français réalisé par Jérôme Foulon visionné ce soir sur TV5.

A découvrir par toutes les âmes esseulées qui désespèrent un jour d'être aimées à leur tour.

L'ami témoin

"Un ami, un véritable ami, c'est aussi un témoin, quelqu'un dont le regard permet d'évaluer mieux sa propre vie."
E Carrère. L'adversaire. Folio.

16 décembre 2007

La fragilité

"La fragilité est ainsi la condition de l'existence : nous ne sommes pas convoqués au lien, ni avec les autres ni avec l'environnement, nous sommes liés, ontologiquement liés. La fragilité, condition même de l'existence, est ce qui nous rappelle ces liens, avec le tout substantiel, dont nous sommes porteurs, mais aussi avec ce que notre époque oublie, la longue durée des phénomène sociaux. Assumer cette fragilité est le défi de tout un chacun."

Miguyel Benasayag . La fragilité. La Découverte, 2004

15 décembre 2007

Tendresse

"Il faut que je vous dise
Qu'un bisou, une bise,
C'est souvent
glacé
Et que les mots "Je t'embrasse"
Rarement remplacent
La douceur
d'un baiser."

Francis Dannemark

Ce petit aphorisme tendre de Francis Dannemark me permet de réinitier ma liste, laissée en friche pour parer à plus pressé durant de longs mois. Cela devrait aller mieux. Bon week end.

02 décembre 2007

"Quand on a pour seul outil un marteau, tous les problèmes ressemblent à des clous."


Variante attribuée à Mark Twain, citée régulièrement par Guillebaud et qu'une rapide recherche sur Google met dans la bouche de bien d'autres. J'ai lu un jour (je crois que c'est dans un livre de Dannemark) qu'un "auteur n'est jamais qu'un futur volé voleur volant lui-même des voleurs." (cité de mémoire, excuse-moi Francis pour les approximations). Ceci dit cette variant est encore plus lumineuse que le proverbe québequois

29 novembre 2007

la forme des problèmes

"Quand on a un marteau dans la tête , on voit tous les problèmes en forme de clous ".

Proverbe québecquois

25 novembre 2007

15 novembre 2007

Une chambre


"Un lit de lumière, une chaise de silence, une table en bois d'espérance, rien d'aute: telle est la petit chambre dont l'âme est locataire."
Christian Bobin . Ressusciter.

La maman d'amis chers s'est éteinte ce jour. Mieux que jamais je mesure ce que ce terme de "s'éteindre" signifie, illustré par les quelques mots de Bobin si parlants en cette circonstance.

10 novembre 2007

Il pleut


"Je devine qu'il pleut quand je vois les parapluies s'ouvrir en rue."
Sagesse de patient


Petite leçon de philosophie du quotidien, extrapolable à bien d'autres
réalités. L'indicible, l'inaudible, l'invisible, l'inexprimable ont leurs canaux
que nos sens ne perçoivent guère.

08 novembre 2007

06 novembre 2007

04 novembre 2007

03 novembre 2007

02 novembre 2007

Le pouvoir des heures



"Vulnerant omnes, ultima necat"
Sagesse des cadrans solaires


trad. Toutes blessent, la dernière tue (il s'agit des heures ; inscription traditionnelle sur les cadrans solaires)

30 octobre 2007

La foule solitaire


"Je ne me sens jamais aussi seule que dans la foule."
Sagesse d'une patiente anonyme



Elle marque un silence, me signale son spleen à la veille de la Toussaint, et en imaginant les fêtes proches. Mari mort il y a cinq ans, une fille célibataire adorable, une amie octogénaire fidèle. Et tous les autres, voisins, fournisseurs, commerçants, facteur, femme de ménage, employé du gaz, médecin oserais-je souffler, tous proches et lointains à la fois. On se sent tous seuls un jour, dis-je. C'est curieux, je ne me sens jamais aussi seule que dans la foule, répond-elle. Un ange passe. On n'échange pas plus de vingt mots ensuite: tout a été dit.

La fumée que le vent dissipe

"J'ai eu des maîtres éminents.
Je me suis réjoui de mes progrès,
de mes
triomphes.
Quand j' évoque le savant que j'étais,
je le compare à l'eau
qui prend la forme du vase
et à la fumée que le vent dissipe."

Omar Khayyam. Les Robaiyat.

Voilà un an , je découvrais incidemment sur la table d'une vieille patiente fort digne les Robaiyat (Quatrains) d'Omar Khayyam, poète philosophe mathématicien érudit ayant vécu autour de l'an mil. Son nom signifie le dissipateur de biens, expression qui dans la terminologie soufie est attribuée à "celui qui distribue ou ignore les biens du monde constituant un fardeau dans le voyage qu'il entreprend sur le sentier soufi" (Omar Ali-Shah). Je ne le connaissais guère, ma patiente avait reçu le livre de son directeur d'école de secrétariat il y a de fort longues années. "Je le relis, il me console de mon actuelle infortune." Elle est morte récemment et le livre m'est revenu ce matin, précieux entre tous. Je le redécouvre et m'en délecte, comme d'un ami cher qui me partagerait ses errances à notre époque.

28 octobre 2007

Lu dans une revue Photo

"Méfie-toi de ceux qui confondent l'éclairage et la lumière"

Tonino Benacquista, écrivain et scénariste français.

Comme un flocon

"Sur le chemin de Saint -Sernin les flocons de neige se précipitaient sur moi avec la gaieté d'enfants porteurs d'une bonne nouvelle: «Ta vie dans l'absolu n'est pas plus longue que la nôtre - mais comme elle, éternelle. »
Christian Bobin. Une bibliothèque de nuages.



26 octobre 2007

Etincelle de souvenir

"Une étincelle de souvenir
J'y suis toujours
puis n'y suis plus ."

Claude Roy
Les pas du silence

Une dernière petite patiente, grimée en chauve souris, quitte le cabinet. Halloween est sur toutes les lèvres. La fête où on tourne la mort en dérision a remplacé subrepticement ce moment intense où nos morts, c'était il y a un siècle, étaient fêtés. J'en ai gardé au fond de moi quelque chose, plein de douceur et de gratitude pour tous ceux qui m'ont permis de me construire. Comment expliquer ceci en mots simples à ma petite chauve souris?

25 octobre 2007

La musique du silence

'art du mime, comme la musique, comme la danse, est au-delà des mots. C'est un cri silencieux, c'est la musique du silence"
Le mime Marceau

23 octobre 2007

Une pluie de lumière


"Le vent, en secouant les feuillages, fait tomber quelques gouttes de lumière sur mon âme étonnée."
Christian Bobin. Une bibliothèque de nuages.






C'est ce que j'ai vu ce matin à l'ombre de Saint Luc, sur le parking facultaire bordé d'arbres. Un soleil frisant et pâle illuminait tout d'une aura neigeuse. La beauté est inattendue .

20 octobre 2007

By the K-way


"C'est imperméable, mais à l'intérieur t'es tout trempé."
Dany Boon

Comment ne pas se souvenir de notre premier K-way, avec les oreilles qui crissent à l'intérieur du capuchon. J'en ai pleuré de rire en lisant cette phrase embaumant les souvenirs d'enfance. Ceci dit, la boutade s'applique à bon nombre de nos ustensiles utilisés quotidiennement, et bien plus récents que l'antique anorak kangourou.

Les mains d'or

Superbe et émouvant Bernard Lavilliers


14 octobre 2007

Se situer

"Quand nous saurons, une bonne fois d'où nous venons et où nous allons, nous saurons alors où nous en sommes."

Pierre Dac

09 octobre 2007

Sonne la pendule

"La pendule, sonnant minuit,
Ironiquement nous engage
A nous rappeler quel usage
Nous fîmes du jour qui s'enfuit ."

C. Baudelaire. L'examen de minuit

Ces bruits qui construisent

« On ne mesure pas l’importance d’une parole au bruit qu’elle fait mais à ce qu’elle éveille. Soyons fiers de n’être pas assourdissants. Nous sommes gens de vie, plus que gens du monde. Plus vaste que tous les mondes est la vie.»

Henri GOUGAUD, in Dire, revue du conte et de l’oralité N°17-hiver 93.

07 octobre 2007

Le vrombissement de l'homme









photo C. Demey

"Il n'y aura bientôt plus de lieu où ne s'entende le vrombissement de l'homme: la nature devient plus ce qu'on invente que ce qu'on explore."

François Daguonet, cité par Alain Finkielkraut dans L'imparfait du présent, Folio, p.310.

05 octobre 2007

Sagesse de Kaléko


" Partout, le regret de l'ailleurs

T'aura en sa puissance

Le dedans, quand tu es dehors;

Le dehors quand tu es dedans. "


Mascha Kaléko

04 octobre 2007

Les paradoxes du temps

"Dans le passé, il y avait plus d'avenir."

P.Kroll


D'accord, c'est l'humoriste qui parle. Mais la réflexion dépasse le clin d'oeil et des théoriciens de la perception du temps dans nos sociétés ont écrit de belles et longues pages sur le sujet.

03 octobre 2007

Tumulte


"Tumulte, ça veut dire qu'il y a tant de bruit qu'on n'entend rien."

Entretien avec Charles Berling, film "Notable donc coupable", Le Soir 2.10.07

30 septembre 2007

Transparence

"Qui n’a plus qu’un moment à vivre
N’a plus rien à dissimuler. "

Quinault. – Atys

29 septembre 2007

"Le temps est invention ou il n'est rien du tout"

Bergson.

Lettre à Véronique


"Le fleuve construit la rive qui l'empêche de se répandre et de se perdre."

Jacques de Bourbon Busset. Lettre à Laurence


Véronique enterre sa vie de jeune fille à l'heure qu'il est, entourée d'amies chères et de ses belles-soeurs. J'aurais dû lui écrire quelques lignes, pour lesquelles le temps m'a manqué. Elle les trouvera donc demain dans son courrier électronique, sous la plume de Jacques de Bourbon Busset. Engagement et liberté ne sont guère antagonistes: la rive donne au fleuve sa cohérence. Comme l'ombre est la chance de la lumière, la rive est la chance du fleuve.


D'importantes choses peuvent être dites en une vingtaine de mots. Les vivre demeure un autre défi, et demande tout de même un petit coup de pouce du destin, ce zeste de bonne fortune dont la présence ou l'absence fait et défait les existences.

28 septembre 2007

encore le bonheur

"On s'en va parce qu'on a besoin de distraction et l'on revient parce qu'on a besoin de bonheur."

Victor Hugo

26 septembre 2007

Toi et je


« A toi dite Kay qui, en me donnant Toi, m'a donné Je. »


Dédicace inscrite par André Gorz dans l'exemplaire du Traître offert à son épouse Dorine

Histoire d'un amour


"Tu viens juste d'avoir quatre-vingt-deux ans. (...) Tu es toujours belle, gracieuse et désirable. Cela fait cinquante-huit ans que nous vivons ensemble et je t'aime plus que jamais. Récemment, je suis retombé amoureux de toi une nouvelle fois et je porte de nouveau en moi un vide débordant que ne comble que ton corps serré contre le mien."


André Gorz. "Lettre à D. Histoire d'un amour" (éditions Galilée, 76 pages). à son épouse Dorine.



Le philosophe André Gorz, 84 ans, et son épouse Dorine, 83 ans, ont été retrouvés morts, lundi 24 septembre, à leur domicile de Vosnon (Aube). Les deux octogénaires reposaient côte à côte. De son vrai nom Gérard Horst, l'auteur d'Ecologie et politique et des Adieux au prolétariat, longtemps proche de Jean-Paul Sartre, avait pris sa retraite en 1983 pour s'occuper de sa femme, atteinte d'une affection évolutive qui s'est doublée d'un cancer. Très épris, le couple s'était retiré dans cette maison, à 35 kilomètres de Troyes. Jean Daniel, avec lequel André Gorz fonda, en 1964, l'hebdomadaire Le Nouvel Observateur, où il fut rédacteur en chef sous le nom de Michel Bosquet, a vu dans leur décès "l'écrasante beauté d'une communion dans le suicide de deux amoureux octogénaires". André Gorz aurait fait part à une amie, il y a quelques jours, de son désarroi devant l'aggravation de l'état de santé de son épouse.Dans un ouvrage paru en 2006 et qu'il voulait le dernier, il notait que la présence de son épouse "fut décisive dans la construction d'une oeuvre dont la visibilité ne porte qu'un nom alors qu'elle fut celle d'un couple, le fruit d'un long dialogue."

24 septembre 2007

Aérien



"Des notes prises au vol surgissent un texte aérien."

Julien Green. Le grand large du soir.

23 septembre 2007

Une petite histoire de chien pour Bernard Kouchner

A en croire ses dernières déclarations, le ministre français des Affaires étrangères (ou est-ce le ministre de la Guerre?) serait déterminé à en découdre à tout prix avec l’Iran. Avant que les choses n’aillent trop loin, qu’il me soit permis, au vu de la mésaventure arrivée à l’un de mes amis antiquaire, de lui conseiller la prudence.
Cet ami-là était récemment à Téhéran en quête de l’objet rare. Or voilà qu’au bazar, passant l’échoppe d’un marchand d’épices, le spectacle d’un chien enfournant sa pitance attire son regard. C’est alors qu’il se rend compte que le bol bleu turquoise qui sert à l’animal de gamelle est un précieux kachan datant du treizième siècle et valant des dizaines de milliers de dollars. Il me le faut, se dit-il, mais je dois à tout prix éviter de mettre la puce à l’oreille du marchand. Il s’approche donc de ce dernier et lui demande du safran."Accepteriez-vous" lui dit-il ensuite en agitant devant ses yeux un beau billet vert, "de me vendre ce chien pour cent dollars américains? " "Marché conclu" s’empresse de dire le marchand en empochant l’argent. "Je vais lui prendre sa gamelle", lui dit alors mon ami qui voyait bien que l’Iranien avait mordu à l’hameçon. "Je vous en donne dix dollars". Mais à sa grande surprise, ce dernier refuse de lui céder la gamelle du chien pour dix dollars. Mon ami lui en offre alors cent, puis deux cents, puis cinq cents, puis mille, mais en vain.
"Pourquoi diable tenez-vous tant à cette gamelle?" s’insurge-t-il finalement. "C’est un talisman, monsieur" lui répond le marchand persan. "Un vrai porte-bonheur !"ajoute-t-il. "Un porte-bonheur? Un talisman?" Mon ami n’y comprenait rien. "Voyez-vous", lui explique alors l’Iranien, "depuis que j’ai cette gamelle, j’ai bien dû vendre un millier de chiens comme celui-ci à des messieurs occidentaux comme vous."
Cela pour dire qu’avant de se fourvoyer plus avant dans ce bras de fer, nos gouvernants feraient bien de se rappeler que les ancêtres de ceux qui président aujourd’hui aux destinées de l’Iran excellaient déjà dans l’art de la diplomatie quand, en Occident, on en était encore à pousser des grognements, à se taper dessus à coups de massue et à traîner les femmes par les cheveux. Mon souci étant que, les Persans continuant à se montrer plus malins qu’eux, les dirigeants du monde occidental ne perdent finalement leurs nerfs et ne recourent à la canonnière. Auquel cas ils ne devraient pas avoir plus de succès avec les Iraniens, que mon ami antiquaire. Bien au contraire. Lui au moins, serait reparti de Téhéran avec un gentil chien-chien.
Percy Kemp. Rue 89. 19/09/2007

22 septembre 2007

Les mots qu'on ne dit pas

"Aussi longtemps que les mots sont dans ta bouche, tu es leur maître. Une fois qu'ils sont prononcés, tu es leur esclave !"

Salomon ibn Gabirol, poète et philosophe espagnol

Destinée curieuse de ce « poète parmi les philosophes, philosophe parmi les poètes » comme le qualifiait Heinrich Heine, dont l'œuvre philosophique influença bien plus la scolastique chrétienne que la philosophie juive, alors que ses poèmes (dont le plus célèbre, Keter Malkhout est encore chanté de nos jours à Yom Kippour) ont tant fait pour sa renommée que la grande artère du district nord de Tel-Aviv, porte aujourd'hui son nom, ainsi que d'autres rues en Israël.

Rien ne vaut un drame

"Pour être réussi et savouré, il [le compromis à la belge] doit être précédé d'un psychodrame. Il faut que l'on sente l'ombre de la rupture, la froideur de la lame qui va tout casser. Il faut que le temps manque pour conclure; en un mot que l'échec soit vraisemblable. Ensuite, il contient une dose d'imagination sophistiquée que l'on ne trouve pas dans les autres pays."

Jean Gandois, dans Le Soir du samedi 22 septembre 2007

20 septembre 2007

Je et moi


"Dès notre naissance, nous vivons avec un inconnu. Il faut s'arranger ensemble, et essayer de se comprendre, ce n'est pas toujours évident. Je ne s'entend pas avec moi. Et pour certains, cela durera jusqu'à ce qu'ils soient enfin sous la terre. De la clarté à l'ombre, le différend aura duré."



Julien Green. Le grand large du soir. Journal.

19 septembre 2007

El amor crece





"La muerte no te ha eliminado
te ha transformado
El dolor disminuye
el amor crece."

"La mort ne t'a pas éliminé
elle t'a transformé
la douleur diminue
l'amour grandit."

Alejandro Jodorowsky . Les Pierres du Chemin (Piedras del camino).

18 septembre 2007

Passeur de sens






Mes maîtres m'ont appris le sens, ce sens qui donne un accord et une correspondance entre le mot et le monde, ce sens qui établit un courant entre l'âme humaine et la transcendance toujours voilée de l'oeuvre.

"H.Grimaud. Leçons particulières.

On rejoint les thèses de René Barbier d'un "éducateur comme passeur de sens". A la fin de son roman intitulé "Siddharta", l'écrivain Herman Hesse un vieux passeur sur le fleuve. Son ami de jeunesse, Govinda, toujours en quête spirituelle, ne le reconnaît pas et continue à suivre son Maître. Il méconnaît ainsi tout ce qu'un "passeur" vers l' "autre rive" comme disent les sages orientaux, pouvait lui apporter. Nous aussi, dans notre monde tourmenté, nous avons besoin de passeurs entre des univers de significations de plus en plus plurielles et paradoxales. Il y a nécessité, en quelque sorte aujourd'hui, de découvrir des "passeurs de sens" entre les spécialités disciplinaires dans l'ordre des sciences de la matière, des sciences de la vie et des sciences humaines.

17 septembre 2007

La nature est un bon maître



" En prenant la nature pour modèle, il m'apprit que rien de ce qu'on prétendait n'était définitivement établi et que l'équilibre ne pouvait être atteint que par l'acceptation inconditionnelle d'un univers aux multiples reflets.




Le bien dissipe les effets du mal, la douceur de l'air efface le souvenir des frimas et le geste d'un homme partageant son pain est plus important que le crime d'un fugitif aux abois. Il faut que le meilleur l'emporte sur le pire."


José-Maximilienne Bourbon. Le testament sauvage. Editions Eole 2001.
Illustration . Neuvillers, 26.8.2007. Cécile Bolly.

interrogation sur le bonheur

"Le bonheur, c'est d'être heureux; ce n'est pas de faire croire aux autres qu'on l'est"

Jules Renard

15 septembre 2007

"Dans leur immobilité les mots ne renvoient qu’indirectement aux choses; mais les images tendent par leur écoulement à s’y substituer, en nous empêchant de les percevoir et de les penser à notre gré."

Pense-t-on devant sa télévision ?
Usages de la philosophie par Juliette Chiche et Gilles Blanc-Brude

13 septembre 2007

vivre, je veux vivre

"Hier soir, ma copine et moi étions assis à table, à discuter de choses et d’autres puis nous en sommes venus à parler de l’euthanasie, sujet délicat du choix entre la vie et la mort. Je lui ai dit : "Ne me laisse jamais vivre dans un état végétatif, dépendant d’une machine et alimenté par le liquide d’une bouteille. Si tu me vois dans cet état, débranche les appareils qui me relient à la vie". Elle s’est levée, a débranché la télé, a éteint l’ordinateur et a jeté ma bière."

Proximité

"Le cannibalisme et le fratricide sont à proscrire dans les sociétés un tant soit peu civilisés. C'et vite dit quand, dans le ventre de votre mère, vous avez un jumeau qui boulotte l'essentiel de la nourriture commune. "

N'avouez jamais, on pourrait vous croire .
Voix d'encre N° 34 - ISBN 2 35128-005-9 - Page 5
Denis Langlois

10 septembre 2007

est humain celui qui se trompe


"On s'expose quand on fait, on s'impose quand on défait. Quand on défait, jamais on ne se trompe, en effet. Je ne connais pas de meilleur moyen pour avoir toujours raison. Je ne crois pas connaître, en revanche, de meilleure définition de l'homme que le vieil adage errare humanum est, à qui je fais dire : est humain celui qui se trompe. Il a au moins essayé. "Michel Serres .


Michel Serres

Le Tiers-Instruit. p.128, Folio/essais n°199

La force de la pluralité




les idées et leurs contraires






« Ce qui est important dans la culture européenne, ce ne sont pas seulement les idées maîtresses (christianisme, humanisme, raison, science), ce sont ces idées et leurs contraires.

Le génie européen n’est pas seulement dans la pluralité et dans le changement, il est dans le dialogue des pluralités qui produit le changement. Il n’est pas dans la production du nouveau en tant que tel, il est dans l’antagonisme de l’ancien et du nouveau (le nouveau pour le nouveau se dégrade en mode, superficialité, snobisme et conformisme).

Penser l’Europe, Edgar MORIN

08 septembre 2007

Amoralités familières

"Chez les hommes comme chez les bêtes, la puissance appartient aux rapaces, aux fauves et aux serpents. Les bêtes n'en abusent pas. "
Maurice Chapelan. Amoralités familières.

Pour illustrer cet aphorisme, je vous invite à découvrir sur YouTube la fascinante vidéo suivante, petite histoire très morale sur le thème de l'union qui fait la force, à regarder jusqu'au bout impérativement ...

27 août 2007

Où va l'amour après la mort ?

"Cesse-t-on d'être amoureux quand la personne aimée cesse de vivre? Où va l'état amoureux quand le corps mort a été réduit en cendres? Il se réfugie dans des images. (..)
Le temps guérit, dit-on. Mais on devrait dire : le temps répète. C'est un exercice de révision. Vous refaites indéfiniment les mêmes choses, assez longtemps pour en oublier que c'était la première fois. C'est pourquoi Orphée n'avait pas le droit de se retourner. En la revoyant, il la "refaisait". Et ce faisant il l'effaçait. "

PF Thomèse. L'enfant ombre. Actes Sud. 2004

Le présent de l'avenir, c'est l'attente (St Augustin)

"Souviens-toi du futur !" *
Le Talmud

"Une image est souvent plus utile qu'un discours. Celle du sablier peut nous être d'un grand secours. Non point pour gloser comme à l'ordinaire sur la tristesse insondable des jours enfuis ou l'impermanence des choses, mais pour se représenter visuellement la rupture advenue. Hier encore, le sablier, étranglé en son milieu mais élargi dans ses deux extrémités, figurait assez bien notre rapport au temps. L'étroit passage médian correspondait au présent tandis que les deux masses sphériques désignaient le passé (au-dessus) abouté à l'avenir (au-dessous). Le présent, mince rétrécissement du sablier, n'avait droit qu'à la portion congrue. Il n'était que l'espace insaisissable de l'écoulement du temps. En clair nous étions surtout habités par la mémoire et mus par le projet. Nos vies étaient principalement gouvernées par le souvenir et par l'attente. Elles étaient comme emplies par le passé et par le futur. Or cette représentation n'est plus pertinente. L'étroit goulot du présent s'est élargi au détriment des deux «bulles» de l'ancien sablier. Le présent a pris toute la place. Ainsi notre image du temps ne ressemble-t-elle plus à un sablier mais à un oeuf, renflé en son milieu, étroit à ses deux extrémités, celle du passé et celle du futur. La métaphore est parlante. Le passé, c'est-à-dire la mémoire humaine, n'a plus la même emprise, au point que nos sociétés sont livrées à la versatilité de l'opinion, à l'émotion changeante, à l'urgence, toutes trois instantanées. Elles sont ainsi perpétuellement guettées par l'amnésie. Symétriquement, la part du futur, c'est-à-dire du projet, est réduite à peu de chose, pour ne pas dire à rien. Le futur ne vaut plus ce qu'il valait. Il est dévalué, au sens monétaire du terme, de sorte que nous avons chassé son image de notre présent. (..) Toute la question est de savoir si cette sacralisation du présent est sans conséquences, et si le présent réduit à lui-même est habitable."
J-Claude GUILLEBAUD. Le goût de l'avenir.

26 août 2007

Secrets de négociation

"On ne se rend pas à une négociation avec une fanfare à sa tête."

Steve Stevaert (ancien président du SPA)

Léger

"Offre bonne place de gardien de vaches. Paiement par traites."

21 août 2007

Deux univers se côtoyent

"Nous sommes des univers passagers dans l'univers qui s'éternise."
Régis Jauffret . Univers, 2003

20 août 2007

Deux ou trois visions du paradis

« Il y aura là des fleuves dont l'eau est incorruptible, des fleuves de lait au goût inaltérable, des fleuves de vin, délices pour ceux qui en boivent, des fleuves de miel purifié.»
Coran, Muhammad, XLVII; 15

Le hasard de mes lectures d'été me fait découvrir deux descriptions du paradis telles que Jean Claude Guillebaud les reprend dans son gros ouvrage "La tyrannie du plaisir". La première est celle de l'existence post mortcm et du paradis que propose l'islam. Il est peuplé de créatures fabuleuses - les houris - au corps de safran, de musc, d'ambre et de camphre; créatures sensuelles au « sexe appétissant» qui sont à la libre disposition de l'élu. C'est dans les textes du fameux Suyûti (Cheikh Jalal Addin alSuyûti, Kitâb al duraI' al h' isân jïl ba'thi wa na' â imiljinân, XII"- XIII" siècle), qu'on trouve les descriptions les plus saisissantes de ce « paradis de l'érection de quatre vingts ans et de l'orgasme infini ». « Au paradis, on embellit de jour en jour, écrit Suyûti. L'appétit est centuplé. On mange et on boit à volonté. La puissance génésique de l'homme est elle aussi multipliée. On fait l'amour tout comme sur terre mais chaque jouissance se prolonge, se prolonge, et dure quatre-vingts ans. [...] Chaque fois, ajoute Suyûti, que l'on couche avec une houri on la trouve vierge. D'ailleurs la verge de l'élu ne se replie jamais. L'érection est éternelle. A chaque coït correspond un plaisir, une sensation délicieuse, tellement inouïe en ce bas monde que si on l'y éprouvait on tomberait évanoui (1). »

Cette vision explicitement voluptueuse de la vie éternelle proposée par l'islam est à comparer avec celle, désincarnée et strictement spirituelle, du paradis chrétien, ou encore avec cette austère description de l'au-delà donnée dans le Talmud. «Il n'y a dans le monde futur ni manger ni boire, ni procréation ni commerce, ni jalousie, nihaine, ni concurrence, mais les justes sont assis, leur diadème sur la tête, et jouissent de l'éclat de la présence divine. [...] Quelque chose est promis, mais ce quelque chose est caché (2). »
Sources : 1. Abdelwahab Bouhdiba, La Sexualité en Islam, op. cit. 2. Cité par Josy Eisenberg, in Maryse Choisy, La Survie après la mort, Labergerie, 1967.

19 août 2007

Un vide vertical

Dans la forêt sans heures
On abat un grand arbre.
Un vide vertical
Tremble en forme de fût
Près du tronc étendu.

Cherchez, cherchez, oiseaux,
La place de vos nids
Dans ce haut souvenir
Tant qu'il murmure encore

Jules Supervielle. Le voyage difficile.

Retour de vacances

"Si l'on passait l'année entière en vacances, s'amuser serait aussi épuisant que travailler."
W.Shakespeare

Ebloui d'entendre à nouveau le téléphone, comme un poussin qui sort de l'oeuf après avoir cassé sa coquille. On s'y remet.

Oublier

« J’ai une mémoire merveilleuse quand il s’agit d’oublier. »
Marilyn Monroe.

La célèbre actrice, assaillie par les insomnies et les anxiétés nocturnes, tente d'oublier les célèbres amants qui l'ont célébrée, puis négligée. Sa propre mère est morte démente, elle la connut à peine mais l'image la hante. Quelques semaines plus tard, elle mourra dans de mystérieuses circonstances. L'histoire complète est à votre disposition si vous souhaitez un thriller pour l'automne.

Echange avec Sidney SKOLSKY. Don Wolfe. Marilyn Monroe. Enquête sur un assassinat. Ed Albin Michel 1998. J’ai Lu p.522.

21 juin 2007

la lampe allumée pour nourrir le matin

"Même si parfois,dans ta chambre solitaire,
l'obscurité efface de chaque chose la patience des contours,
laisse la nuit peser de toutes ses paupières.
N'aie crainte,
la nuit se consume toujours dans l'écho d'une lampe allumée,
d'une lumière à t'attendre pour nourrir le matin."

Ph Mathy
________________________________________________________________________________________

20 juin 2007

Bernard et Bianca inaugurent un vieil été

"Alouette
Alouette si tu t'envoles
Tu me sauras à ton école
Quand tu iras dans tes hauteurs
J'affronterai mes profondeurs"

Guillevic

Curieux été. Premier jour, et l'impression d'y avoir été déjà, depuis avril. Il y a comme une perte de repères, bien dans l'air du temps, et qui ne se limite guère au climat. On découvre des classes où des profs donnent cours (un 21 juin!) devant cinq élèves, un Sarkozy hilare entouré de Christine Boutin et Fadéla Amara, un Pape rappelant que la voiture ne saurait être symbole de puissance et bénissant une mer de Ferrari rassemblées place Saint Pierre, le couple Clinton jouant à Bernard et Bianca pour la bonne cause électorale. Bel été tout de même!

________________________________________________________________________________________

sagesse de Guillevic

"Avoue
Ce qui t'intéresse
C'est tenir dans ta main
Une chose
Où se raconte l'univers. . . "

Guillevic

17 juin 2007

le ciel comme paysage

"Pour le papillon, la propriété, c'est le vol."
Albert Willemetz

Je vous souhaite une bonne semaine
CV.

13 juin 2007

dans la durée

"Le courage est une vertu de l'instant, tandis que la fidélité est vertu de la durée."
Jankélévitch

Mais il faut souvent du courage pour être fidèle, commentaire ajouté par Isabelle Dagneaux qui me transmet cette pensée.

Je vous souhaite une bonne semaine
CV.

l'espace devant soi

"Les conquêtes sont aisées à faire, parce qu'on les fait avec toutes ses forces.
Elles sont difficiles à conserver parce qu'on ne les défend qu'avec une partie de ses forces."

Montesquieu

04 juin 2007

sagesse de Valéry

« La guerre est le massacre de gens qui ne se connaissent pas au profit de gens qui, eux, se connaissent mais ne se massacrent pas ».

Paul Valéry

paradoxe de la lumière

"Je ne suis pas née, dit l'ombre
Je viens quand le soleil est là."

Henry Bauchau.

03 juin 2007

entre rêve et réalité

"Pourquoi sommes-nous venus, nous les porteurs de rêves,
si ce n'est pour montrer comme la réalité est vaste
et comme elle nous suffit."

Henri Bauchau. Gengis Khan

Je vous souhaite un bon dimanche
CV.

02 juin 2007

Desnos, parti de Compiègne

"Vous qui n'avez pas peur de la mort essayez donc un peu l'ennui."

Robert Desnos, La Liberté ou l'Amour (1927), éd. Gallimard,

Robert Desnos, poète français, né le 4 juillet 1900 à Paris, mort le 8 juin 1945 au camp de concentration de Theresienstadt en Tchécoslovaquie. Le poète aura été l'un des membres les plus actifs du groupe surréaliste. Selon André Breton, il "parl[ait] surréaliste à volonté". Desnos, lui-même, déclarait avoir fait "acte de surréalisme absolu". Résolument tourné vers l'amour et la liberté, et d'abord séduit par l'audace des expériences poétiques dont Breton est l'animateur, il revient au cours des années 1930 à des formes plus traditionnelles, ne négligeant pas le vers rimé, tout en lui offrant des perspectives inusitées et un élan original et unique.

En 1971, Jean Ferrat interprète Robert le diable, poème dédié par Louis Aragon à la mémoire de son ami tragiquement disparu. La chanson avait été créée, auparavant, par Christine Sèvres (1931-1981), alors épouse de Ferrat :

"Je pense à toi Desnos
qui partis de Compiègne
Comme un soir en dormant
tu nous en fis récit
Accomplir jusqu'au bout
ta propre prophétie
Là-bas où le destin de notre siècle saigne…"

Toutes ces mélodies et noms étrangers qui bercèrent notre mémoire ont une histoire...

Je vous souhaite un bon week end

31 mai 2007

29 mai 2007

la lampe cachée

«Telle cette lumière dans l’esprit
Qui brille quand on quitte, de nuit, sa chambre,
Une lampe cachée contre son coeur,
Pour retrouver une autre ombre dansante.»


Yves Bonnefoy - Les Planches courbes

27 mai 2007

Une petite musique de nuit

"C'est fini la sourdine
Je rue dans les brancards
Je suis Léopoldine
La soeur de Mozart
Et comme la renommée
N'est pas un boomerang
Je n'aurais pas dû le laisser signer
Wolfgang. "

Wolgang et moi, F. Mallet Joris/ MP Belle. 1973

Il m'aura fallu plus de trente ans pour réaliser que la superbe ritournelle deMarie-Paule Belle, écrite par sa comparse Françoise Mallet Joris n'étaitnullement le fruit de leur imagination débordante. Un tout récent ouvrage de Rita Charbonnier narre toute l'histoire d'une rivalité familiale peu ordinaire. En cette année 1763, dans toutes les Coursd'Europe, Maria-Anna Mozart, surnommée Nannerl, fait un triomphe aux côtés deson jeune frère. Unis par une même passion, ils nourrissent une tendrecomplicité face aux sévérités d'un père opposant une rigoureuse discipline àl'insolence de leur génie. Mais Nannerl, l'aînée, est vite rattrapée par les obligations imposées auxjeunes filles de son temps. Et devra étouffer ses aspirations, taire sesprodigieuses facultés et s'effacer devant Wolfgang, ressentant tout à tourranc½ur; jalousie et admiration pour ce petit frère, objet de tous les soins.Elle ne gardera rien de ses propres compositions, brûlera ses partitions et ne laissera à la postérité que quelques lettres, témoignage d'un talent sacrifié.

La Soeur de Mozart Rita Charbonnier . Points Seuil n° PI 696, 399 pp.

Je vous souhaite une bonne semaine

CV.

26 mai 2007

vive la vie

"Dans le monde comme il tourne, dire qu'on aime la vie
c'est comme crier "j'aime les crèmes glacées" dans sa maison en flammes."

Lu hier, quelque part

le passage du temps

"J'aimais penser au cimetière où vont mourir les jours. J'avais le sentiment que c'était lorsqu'ils devenaient des nuits que les jours mouraient. Je les voyais se mettre les uns derrière les autres pour se diriger vers le cimetière".

Kebir M. Ammi. Le ciel sans détours. Gallimard.

Une bien belle réflexion sur le passage du temps...

25 mai 2007

de la fidélité en amitié

"Il est malaisé de rester fidèle à des amis qui ne demeurent pas fidèles à eux-mêmes."

Louis Scutenaire.

24 mai 2007

l'ouië fine du malheur

(..) et c'est parce qu'ils sont blessés qu'ils comprennent.
Une blessure écoute toujours plus finement qu'une oreille."

Aaron Appelfeld.


Peu d'entre nous se souviendront sans doute qu'en 2004, cet auteur remporta le Medicis du livre étranger avec "Histoire d'une vie". Aharon Appelfeld nous y livrait des fragments d'une existence marquée au sceau de l'épreuve: souvenirs de sa petite enfance à Czernowitz, en Bucovine. Portraits de ses parents, des juifs assimilés, et de ses grands-parents, un couple de paysans dont la spiritualité simple le marque à jamais. Puis des scènes brèves, d'une violence inouïe, visions arrachées au cauchemar de la déportation et de l'extermination. Vient ensuite l'arrivée en Israël, et l'élaboration progressive de son oeuvre.La phrase de ce jour en prend une densité inattendue.

21 mai 2007

acide sulfurique

"Vint le moment où la souffrance des autres ne leur suffit plus :
il leur en fallut le spectacle."

Amélie Nothomb. Acide sulfurique

L'art d'un auteur; mettre des mots sur des sentiments ressentis chaque soir, lors de la découverte des nouvelles su monde.
"Que d'hommes se pressent vers la lumière, non pas pour voir mieux mais pour mieux briller."

F. Nietszche.

20 mai 2007

Sagesse du passant lambda.

"Qui es-tu, d'où viens-tu, où vas-tu? Je m'appelle Jean, je suis à la station Mérode et je rentre chez moi."

Entre moka et croissant ce dimanche matin, cette petite phrase anodine me revient, avec une pensée amicale pour Philippe qui doit se trouver dans le Thalys le ramenant d'Annecy. J'imagine le retour sur terre après une semaine stimulante de formation Balint, l'esprit enchanté par la multiplicité de la relation patient-médecin, un zeste d'introspection et une interprétation enrichie des multiples signes cachés de nos mots, gestes et et regards.

Je l'imagine découvrant son courrier de huit jours, parsemé de demandes triviales de renouvellement de prescription urgente, de dispense à l'obligation de vote et de certificats pour la natation: le beau métier de médecin, sur la terre comme au ciel.

17 mai 2007

Qui aime les bêtes aime les hommes

"J'ai fait cette nuit un rêve dans lequel L. Bonaparte rendait contre la rage le décret que voici : Je, Napoléon, etc... décrète : article 1er. Il n'y a plus de chiens. Art. II. Tous les chiens sont élevés à la dignité de gendarmes. Art. III. Quiconque mordra sera destitué. Art. IV. On aboiera en français."Victor Hugo (Choses vues, 1858)

"Dans un courrier adressé le 18 avril 2007 au président de l’association Stéphane Lamart pour la défense des droits des animaux, le candidat Nicolas Sarkozy écrit : «[…]On estime que 100 000 animaux entrent de manière illégale sur notre territoire. Cette réalité confirme la nécessité de mieux encadrer le commerce des animaux de compagnie. […] Sans doute faut-il également rendre obligatoire la stérilisation des animaux dans les refuges avant leur adoption. […]»

16 mai 2007

Il empêche de naître

"Je veux imaginer sous quels traits nouveaux le despotisme pourrait se produire dans le monde : je vois une foule innombrable d'hommes semblables et égaux qui tournent sans repos sur eux-mêmes pour se procurer de petits et vulgaires plaisirs, dont ils emplissent leur âme. Chacun d'eux, retiré à l'écart, est comme étranger à la destinée de tous les autres : ses enfants et ses amis particuliers forment pour lui toute l'espèce humaine; quant au demeurant de ses concitoyens, il est à côté d'eux, mais il ne les voit pas; il les touche et ne les sent point; il n'existe qu'en lui-même et pour lui seul, et, s'il lui reste encore une famille, on peut dire du moins qu'il n'a plus de patrie.

Au dessus de ceux-là s'élève un pouvoir immense et tutélaire, qui se charge seul d'assurer leur jouissance et de veiller sur leur sort. Il est absolu, détaillé, prévoyant et doux. Il ressemblerait à la puissance paternelle si, comme elle, il avait pour objet de préparer les hommes à l'âge viril; mais il ne cherche, au contraire qu'à les fixer irrévocablement dans l'enfance; il aime que les citoyens se réjouissent, pourvu qu'ils ne songent qu'à se réjouir. Il travaille volontiers à leur bonheur; mais il veut en être l'unique agent et le seul arbitre; il pourvoit à leur sécurité, prévoit et assure leurs besoins, facilite leurs plaisirs, conduit leurs principales affaires, dirige leur industrie, règle leurs successions, divise leurs héritages; que ne peut-il leur ôter entièrement le trouble de penser et la peine de vivre ?

C'est ainsi que tous les jours il rend moins utile et plus rare l'emploi du libre arbitre; qu'il renferme l'action de la volonté dans un plus petit espace, et dérobe peu à peu à chaque citoyen jusqu'à l'usage de lui-même. L'égalité a préparé les hommes à toutes ces choses : elle les a disposés à les souffrir et souvent même à les regarder comme un bienfait.

Après avoir pris ainsi tour à tour dans ses puissantes mains chaque individu, et l'avoir pétri à sa guise, le souverain étend ses bras sur la société tout entière; il en couvre la sue d'un réseau de petites règles compliquées, minutieuses et uniformes, à travers lesquelles les esprits les plus originaux et les âmes les plus vigoureuses ne sauraient se faire jour pour dépasser la foule; il ne brise pas les volontés, mais il les amollit, les plie et les dirige; il force rarement d'agir, mais il s'oppose sans cesse à ce qu'on agisse; il ne détruit point, il empêche de naître".

Alexis de Toqueville (1805-1859). De la démocratie en Amérique, "Quelle espèce de despotisme les nations démocratiques ont à craindre"

13 mai 2007

La fête, le lendemain

"Il n'y avait pas un seul de ces convives avec qui Meaulnes ne se sentît à l'aise et en confiance. Il expliquait ainsi plus tard cette impression : on imagine de vieilles gens, des grands-parents pleins d'indulgence, qui sont persuadés à l'avance que tout ce que vous faites est bien fait. Certainement parmi ces bonnes gens-là les convives de cette salle avaient été choisis. Quant aux autres, c'étaient des adolescents et des enfants..."

Alain Fournier. Le grand Meaulnes

Bon vent à Anne Cathérine et Quentin sur la route prometteuse d'une existence partagée. La fête fut belle, rappelant par certains accents les plus beaux textes d'Alain Fournier.
Qu'elle soit à l'image de votre vie

CV

11 mai 2007

Eloge du silence

"Dis-moi ce que tu tais
Je te dirai qui tu es."

Exergue du Petit Silence illustré, édité en 1955 par Jacques Sternberg (7 numéros) et remplacé ensuite par le journal satirique Hara Kiri.

10 mai 2007

Les mots qu'on murmure et ceux qu'on profère

"Ballaciner: tomber du ciel de nuage en nuage, entre les éclairs."

J.M.G. Le Clezio. Ballaciner. Nrf. Gallimard. 2007.

Neologisme poétique créé par Le Clezion pour exprimer son amour du cinéma, associant ballade et ciné, il fait partie de ces mots friandises qu'on se répète pour le simple plaisir. Rien de commun avec "bavasser", que je ne connaissais guère non plus jusqu'il y a deux semaines, avant qu'un futur président français ne l'utilise avec rage ("Il y en a qui sont dans un grand hôtel à bavasser ensemble, moi, mon hôtel, c'est ici."
Curieux: tant de voyelles et de consonnes communes entre ces deux verbes, positionnés pourtant aux antipodes l'un de l'autre. Ce sont les lèvres qui font les mots.

09 mai 2007

Sagesse du silence

"Tout ce qui peut être dit peut l'être clairement;et ce dont on ne peut parler , on doit le taire."

Wittgenstein. Tractatus logico-philosophicus

Il ne se paiera pas de mots: après la sortie de son ouvrage, il gardera le silence pendant huit ans, abandonnant Cambridge pour devenir assistant jardinier dans un monastère près de Vienne.

08 mai 2007

Sagesse de l'inconnu

"Pour atteindre un objectif qu'on ne connaît guère,
il faut emprunter des chemins qu'on ne connaît pas."

Saint Augustin, cité par Pierre Bartholomé.

05 mai 2007

le goût de la chouquette

"J'avais quinze ans, je sortais du lycée, affamé comme on peut l'être à cet âge, sans discernement, sauvagement et pourtant avec une quiétude que je me rappelle seulement aujourd'hui, et qui est juste ce qui fait si cruellement défaut à toute mon œuvre. Toute mon œuvre que ce soir je donnerais sans regret, sans l'ombre d'un remords ni l'amorce d'une nostalgie, pour une seule et dernière chouquette de supermarché.

J'ouvrais le sac sans ménagement, je tirais sur le plastique et agrandissais ensuite grossièrement le trou que mon impatience y avait formé. Je plongeais la main dans le sac, je n'aimais pas le contact gluant du sucre déposé sur les parois par la condensation de la vapeur. Je détachais précautionneusement une chouquette de ses congénères, je la portais religieusement à ma bouche et je l'engloutissais en fermant les yeux. On a beaucoup écrit sur la première bouchée, la deuxième et la troisième. On a dit beaucoup de choses justes à ce sujet. Toutes sont vraies. Mais elles n'atteignent pas, et de très loin, l'ineffable de cette sensation-là, de l'effleurement puis du broyage de la pâte humide dans une bouche devenue orgasmique. Le sucre imbibé d'eau ne croquait pas: il cristallisait sous la dent, ses particules se dissociaient sans heurt, harmonieusement, les mâchoires ne le cassaient pas, elles l'éparpillaient en douceur, dans un indicible ballet fondant et croustillant.

La chouquette adhérait aux muqueuses les plus intimes de mon palais, sa mollesse sensuelle épousait mes joues, son élasticité indécente la compactait immédiatement en une pâte homogène et onctueuse que la douceur du sucre rehaussait d'une pointe de perfection. Je l'avalais rapidement, parce qu'il y en avait encore dix-neuf autres à connaître. Seules les dernières seraient mâchées et remâchées avec le désespoir de la fin imminente.

Je me consolais en songeant à la dernière offrande de ce sachet divin: les cristaux de sucre déposés tout au fond, en souffrance d'un chou auquel s'agripper, et dont je fourrerais les dernières petites sphères magiques, avec mes doigts poisseux, pour terminer le festin d'une explosion sucrée."

Muriel Barbery. Une gourmandise. (6)

On termine. au terme d'une quête éperdue, arrivé en fin de vie, notre critique gastronome retrouve inopinément la saveur perdue qu'il traquait afin d'en savourer la sensation une dernière fois avant de mourir. On l'aura deviné, comme dans Proust, elle l'amène aux années sauvages de ses quinze ans, sur le chemin du retour de l'école, insouciant et avide de tout. Le goût de la chouquette...

Pour ceux qui ignorent comment se prépare une bonne chouquette, la page de Wikipedia qui lui est consacrée lèvera les incertitudes: http://fr.wikipedia.org/wiki/Chouquette
________________________________________________________________________________________

04 mai 2007

Sagesse du dimanche matin

"Une ode permanente et vivante à la brioche du dimanche matin lorsque, engourdis mais heureux de ce jour de repos qui commence, nous enfilons un vieux chandail confortable et descendons préparer du café en surveillant du coin de l'œil la boule brune qui repose sur la table. On se sent délicieusement mal réveillés, on jouit encore quelques instants, dans le silence, de n'être pas soumis à la loi du travail, on se frotte les yeux avec de la sympathie pour soi-même et, quand monte l'odeur palpable du café chaud, on s'assied enfin devant son bol fumant, on presse amicalement la brioche qui se déchire doucement, on en traîne un morceau dans l'assiette de sucre en poudre, au centre de la table, et, les yeux mi-clos, on reconnaît sans se le dire la tonalité douce-amère du bonheur."

Muriel Barbery . Une friandise. (5)

03 mai 2007

Le pain quotidien

"Si le pain se « suffit à lui-même », c'est parce qu'il est multiple, non pas en ses sortes particulières mais en son essence même car le pain est riche, le pain est plusieurs, le pain est microcosme. En lui s'incorpore une assourdissante diversité, comme un univers en miniature, qui dévoile ses ramifications tout au long de la dégustation. L'attaque, qui se heurte d'emblée aux murailles de la croûte, s'ébahit, sitôt ce barrage surmonté, du consentement que lui donne la mie fraîche. Il y a un tel fossé entre l'écorce craquelée, parfois dure comme de la pierre, parfois juste parure qui cède très vite à l'offensive, et la tendresse de la substance interne qui se love dans ses joues avec une docilité câline, que c'en est presque déconcertant. Les fissures de l'enveloppe sont autant d'infiltrations champêtres: on dirait un labour, on se prend à songer au paysan, dans l'air du soir; au clocher du village, sept heures viennent de sonner; il essuie son front au revers de sa veste; fin du labeur.

À l'intersection de la croûte et de la mie, en revanche, c'est un moulin qui prend forme sous notre regard intérieur; la poussière de blé vole autour de la meule, l'air est infesté de poudre volatile; et de nouveau changement de tableau, parce que le palais vient d'épouser la mousse alvéolée libérée de son carcan et que le travail des mâchoires peut commencer. C’est bien du pain et pourtant ça se mange comme du gâteau ; mais à la différence de la pâtisserie, ou même de la viennoiserie, mâcher le pain aboutit à un résultat surprenant, à un résultat... gluant. Il faut que la boule de mie mâchée et remâchée finisse par s'agglomérer en une masse gluante et sans espace par où l'air puisse s'infiltrer; le pain glue, oui, parfaitement, il glue. Qui n'a jamais osé malaxer longuement de ses dents, de sa langue, de son palais et de ses joues le cœur du pain n'a jamais tressailli de ressentir en lui l'ardeur jubilatoire du visqueux. Cc n'est plus ni pain, ni mie, ni gâteau que nous mastiquons alors, c'est un semblant de nous-mêmes, de ce que doit être le goût de nos tissus intimes, que nous pétrissons ainsi de nos bouches expérimentées où la salive et la levure se mêlent en une fraternité ambiguë."

Muriel Barbery . Une gourmandise (4)

30 avril 2007

Ah les beaux jours !

"Surtout, il y avait le tilleul. Immense et dévorant, il menaçait d'année en année de submerger la maison de ses ramages tentaculaires qu'elle se refusait obstiné ment à faire tailler et il était hors de question de discuter la chose."

Muriel Barbery. Une gourmandise (3)

La recherche éperdue d'une saveur peut passer par les souvenirs olfactifs. Ce n'est pas Proust qui me contredira. Par le goût du miel associé au parfum du tilleul. Laissez-vous bercer 3 à 4 minutes par un moment de bonheur pur.

"Aux heures les plus chaudes de l'été, son ombrage importun offrait la plus odorante des tonnelles. Je m'asseyais sur le petit banc de bois vermoulu, contre le tronc, et j'aspirais à grandes goulées avides l'odeur de miel pur et velouté qui s'échappait de ses fleurs d'or pâle. Un tilleul qui embaume dans la fin du jour, c'est un ravissement qui s'imprime en nous de manière indélébile et, au creux de notre joie d'exister, trace un sillon de bonheur que la douceur d'un soir de juillet à elle seule ne saurait expliquer. A humer à pleins poumons, dans mon souvenir, un parfum qui n'a plus effleuré mes narines depuis longtemps déjà, j'ai compris enfin ce qui en faisait l'arôme; c'est la connivence du miel et de l'odeur si particulière qu'ont les feuilles des arbres, lorsqu'il a fait chaud longtemps et qu'elles sont empreintes de la poussière des beaux jours, qui provoque ce sentiment, absurde mais sublime, que nous buvons dans l'air un concentré de l'été.

Ah, les beaux jours! Le corps libre des entraves de l'hiver éprouve enfin la caresse de la brise sur sa peau nue, offerte au monde auquel elle s'ouvre démesurément dans l'extase d'une liberté retrouvée... Dans l'air immobile, saturé du bourdonnement d'insectes invisibles, le temps s'est arrêté... Les peupliers, le long des chemins de halage, chantent aux alizés une mélodie de bruissements verdoyants, entre lumière et ombre chatoyante... Une cathédrale, oui, une cathédrale de verdure éclaboussée de soleil m'environne de sa beauté immédiate et claire...

29 avril 2007

Le souvenir de l'odeur des sardines grillées

"Tous les étés, nous ralliions la Bretagne. Ma grand-mère officiait aux fourneaux, avec une altière tranquillité. Elle pesait plus de cent kilos, avait de la moustache, riait comme un homme et glapissait après nous, quand nous nous aventurions dans la cuisine, avec une grâce de camionneur. Mais sous l'effet de ses mains expertes, les substances les plus anodines devenaient des miracles de la foi. Le vin blanc coulait à flots et nous mangions, mangions, mangions. Oursins, huîtres, moules, crevettes grillées, crustacés à la mayonnaise, calamars en sauce mais aussi ("on ne se refait pas") daubes, blanquettes, paellas, volailles rôties, en cocotte, à la crème; il en pleuvait.

Une fois dans le mois, mon grand-père prenait au petit déjeuner une mine sévère et solennelle, se levait sans un mot et partait seul vers la criée. Nous savions alors que c'était LE jour. Une heure plus tard, mon grand-père revenait du port avec une énorme caisse qui sentait la marée. Lorsque à une heure nous rentrions de bains pris distraitement, dans l'attente éperdue du déjeuner, nous humions déjà à l'angle de la rue l'odeur céleste. J'en aurais sangloté de bonheur. Les sardines grillées embaumaient tout le quartier de leur fumet océanique et cendré. (..)

Dire de cette chair qu'elle est fine, que son goût est subtil et expansif à la fois, qu'elle excite les gencives, à mi-chemin entre la force et la douceur, dire que l'amertume légère de la peau grillée alliée à l'extrême onctuosité des tissus serrés, solidaires et puissants qui emplissent la bouche d'une saveur d'ailleurs fait de la sardine grillée une apothéose culinaire, c'est tout au plus évoquer la vertu dormitive de l'opium."

Muriel Barbery . Une gourmandise (2)

Faut-il préciser que cette partie de l'essai traite des vacances d'été chez les grands-parents de notre critique gastronomique, qui y apprend le métier de la plus belle manière, "grands-parents qui nous aimaient à leur manière: sans partage."

27 avril 2007

sagesse des livres non lus

"Au plus grand de tous, le chef Tsuno, il arrivait de n'extraire d'un gigantesque saumon qu'un seul petit morceau en apparence dérisoire. En la matière, de fait, la prolixité ne signifie rien, la perfection ordonne tout. Une petite parcelle de matière fraîche, seule, nue, crue: parfaite."

Muriel Barbery. Une gourmandise.

C'est l'histoire simple d'un critique gastronome réputé, en fin d'existence. Il est à la recherche d'une saveur, anciennement rencontrée, source d'un plaisir intense qu'il aimerait revivre une fois au moins avant de mourir. Sa quête le mène de lieux de bouche renommés en restaurants qu'il a visités jadis pour son travail. Ce soir , il nous fait découvrir les charmes subtils de la cuisine japonaise, belle allégorie de l'existence humaine: on met tant de temps à découvrir ce qui en nous est le lieu du meilleur, qu'on ne partagera qu'en de rares circonstances. Encore faut-il le découvrir, comme le suggère Françoise Houdart dans son dernier roman (Bastida) "Que faire de ce que nous ignorions de nous-mêmes quand nous le découvrons?"

Si nous faisions un expérience? Je suis sous le charme du magistral essai de Pierre Bayard "Comment parler des livres qu'on n'a pas lus?" En cinq billets, une petite semaine, je vous ferai découvrir le roman de Muriel Barbery "Une gourmandise": vous pourrez en parler avec d'autres qui eux non plus ne l'ont pas lu avec une maîtrise rare.

26 avril 2007

sagesse de l'amour

"Il n'y a pas d'amour heureux? Mais il n'y a pas non plus d'amour malheureux. Le malheur, c'est autre chose: c'est quand il n'y a pas d'amour."

Francis Dannemark. Une fraction d'éternité.

24 avril 2007

Rêve, Rêve

"On ne rêve plus. On est rêvé. Silence."
Henri Michaux

Silence à Gaillardbois

"A part le passage, à certaines heures, des voitures, Gaillardbois est un village silencieux. Il a des habitants mais il n'a plus de villageois."

Henri Bauchau. Le Présent d'incertitude.

19 avril 2007

Indépendance d'esprit

"Je ne lis jamais un livre dont je dois faire la critique:on se laisse tellement influencer !"

Oscar Wilde

17 avril 2007

16 avril 2007

15 avril 2007

12 avril 2007

"Lorsqu'elle était étudiante, elle avait recopié une phrase de Michel Hannoun qui l'avait impressionnée par sa justesse:
« Dans le mot "seul" il y a quatre lettres, quatre définitions de la solitude.
S comme solitaire, c'est-à-dire seul par goût de la solitude,
E comme esseulé, c'est-à-dire seul parce qu'abandonné des autres,
U comme unique, seul de son espèce et enfin
L comme libre, c'est-à-dire seul à décider.
Les Anglais ont quatre mots: lone, alone, lonely et lonesome.
Chacun a sa propre définition de la solitude. »

C.Nys Mazure. Sans y toucher.

09 avril 2007

Du paradoxe du Win-Win

"Les théoriciens de la mondialisation utilisent ad nauseam l'expression "gagnant-gagnant". (..) Imaginons qu'un individu armé menace un autre en lui disant "la bourse ou la vie". Si ce dernier obtempère en lui tendant son porte-feuille, il s'agit bien d'un "contrat" gagnant-gagnant: l'un obtient de l'argent, l'autre sauve sa vie, la situation des deux s'en trouve améliorée."

Jean Claude Liaudet. Le complexe d'Ubu ou la Névrose libérale.

07 avril 2007

La célébration des oiseaux

1er avril 2002

Arrivée avec Danièle et Jean-Pierre au gîte rural de Bacqueville. Petite maison ancienne restaurée et aménagée selon le confort actuel. Ensemble agréa­ble, un petit jardin, un pré avec deux poneys sympa­thiques et poilus. Journée de Pâques en Normandie. J'aurais voulu me trouver un moment à une messe de Pâques comme autrefois ou au moins dans une église. Le sort en a disposé autrement. Je me suis fortement : cogné au coin d'une table basse en verre. Pendant que Danièle et Jean-Pierre allaient cher­cher dans une pharmacie de quoi me soigner, je voulais donner un peu de pain et de sucre aux poneys. J'ai très vite senti qu'il me fallait renoncer à la promenade. Je me suis assis bien couvert dans les terribles fauteuils en plastique blanc d'aujourd'hui et j'ai écouté le chant des oiseaux. Je m'avise en écri­vant que, sans me le formuler alors, j'ai passé ainsi une heure dans l'église des oiseaux. Elle existe tou­jours et la parade amoureuse du petit peuple ailé est toujours aussi alerte, toutes les forces de ces corps vifs et menus tendus à l'extrême par le chant. Pour­tant, très vite ils s'envolent pour se poser ailleurs donnant une impression d'aisance, de vivacité, à l'op­posé de l'effort que semble faire entendre l'acuité de leur chant. Ainsi j'ai passé un long moment à les entendre, à tenter de les voir, de les reconnaître. Moment non pas de bonheur mais moment de présence. D'un côté le moi, un peu douloureux, appesanti et de l'autre quelque chose qui m'habitait, qui produisait en moi quelque vivace équivalence des chants que ma demi-surdité ne capte plus dans leur naturelle innocence. Sans ailes bien sûr, toujours sans ailes, j'ai pris part à la célébration des oiseaux.

Henry Bauchau . Le présent d'incertitude.

Je vous souhaite une bonne fête de Pâques
CV.

Nos quatre dromadaires

"Avec ses quatre dromadaires
Don Pedro d'Alfaroubeira
Connut le monde et l'admira
Il fit ce que je voudrais faire
Si j'avais quatre dromadaires"

Guillaume Apollinaire

Curieuse phrase que chacun habillera à sa mode. Nos quatre dromadaires manquants nous sont propres, et leur absence porte des noms différents: peur du lâcher prise, douillet confort d'existence, besoin de sécurité , piètre image de soi, prescience de l'échec de toute chose engagée.

06 avril 2007

adieu l'artiste

"Sans la frontière que lui imposent les côtes et les falaises, l'océan noierait la terre et irait se perdre en trombes dans l'infini comme l'eau qui s'écoule d'une outre crevée."
Christiane Singer

Christiane Singer vient de décéder d'un cancer, à l'âge de 64 ans, Elle raconte son dernier combat dans un livre qui devrait paraître la semaine prochaine. Belle manière de dire au revoir à ceux qui l'ont appréciée.

Bonnes fêtes de Pâques.

05 avril 2007

Les yeux

"D’un oeil, observer le monde extérieur, de l’autre regarder au fond de soi-même."

Amedeo Modigliani.

02 avril 2007

illusions

"Les jeunes s'illusionnent sur leur avenir; les vieillards sur leur passé. »

Decoly

Amour et connaissance de l'autre

"Il n'est pas nécessaire de tout connaître de l'autre pour l'aimer."

Alain Braconnier . Les filles et les pères. Ed. Odile Jacob. 2007

Vivre j'aime ce métier

"Pour rien au monde, je ne renoncerais au charme douloureux de ma condition d'homme."

Jean-Paul Kauffmann. La maison du retour. Nil Ed. 2007

On se souvient avec émotion de l'otage de Beyrouth (1985-1988), grand reporter au Matin de Paris et à l'Evenement du Jeudi, compagnon d'infortune de Michel Seurat (qui décédera en captivité). Antenne 2 s'était associée à l'époque au mouvement contre l'oubli en rappelant quotidiennement leur détention en ouverture de journal durant trois ans. L'ex-otage a pansé ses plaies et raconte son retour difficile à la vie dans la maison landaise achetée à son retour. "Vivre, j'aime ce métier", confie-t-il, mêm si "pour renaître, il faut d'abord mourir."

28 mars 2007

fenêtres sur la terre

"Les puits , paraboles d'eau
fenêtres ouvertes sur la terre."

M. Jourdan. Journal du réel gravé sur un baton

24 mars 2007

vue sur le présent

"L'homme juge tout de la minute présente, sans comprendre qu'il ne juge qu'une minute : la minute présente."

Antonio Porchia . Voices.

sagesse de Porchia

"Tu es le besoin qu'on a de toi, non ce que tu es."
Antonio Porchia. Voix.

21 mars 2007

tant va la source à la mer

"La source
qui fait modestement son travail de source
mais va rejoindre
par de longs chemins
l'océan Atlantique."

Un bruit très bas
Claude Roy

Un autre monde

"Un autre monde est en marche. Beaucoup d'entre nous ne serons plus là pour assister à son avènement.Mais quand tout est calme, si je prête une oreille attentive , je l'entends déjà respirer."

Arundhati Roy
Interview, Le Monde, 18 janvier 2004

Quarante huit heures après l'avoir découvert, je demeure sous la forteimpression du dernier film de Marion Hansel "Si le vent soulève les sables". La superbe et dramatique odyssée d'une famille africaine à la recherche de l'eau, qui a déserté son village. Par-delà de cette quête, c'est tout le destin humain qui transparaît en filigrane: l'existence, ses choix qui sont autant de risque, la fragilité de l'être humain, et sa force. Un superbe acte de foi dans l'avenir.

17 mars 2007

Cézanne peint

"Le bout du monde et le fond du jardin
contiennent la même quantité de merveilles."

C Bobin

pause

"Nappes rouge et blanc
deux tables de restaurant prennent le soleil."

Amel Hamdi Smaoui

14 mars 2007

Heureux qui comme Ulysse

"Vous étiez venus m'attendre,
Ici même, vous en souvenez-vous ?
A vous regarder sourire,
A vous aimer, sans rien dire,
C'est là que j'ai compris, tout à coup,
J'avais fini mon voyage,
Et j'ai posé mes bagages,
Vous étiez venus au rendez-vous,
Qu'importe ce qu'on peut en dire,
Je tenais à vous le dire,
Ce soir je vous remercie de vous,
Qu'importe ce qu'on peut en dire,
Je suis venue pour vous dire,
Ma plus belle histoire d'amour, c'est vous."

Aline et Benoît reviennent ce matin.
Le périple fut long et notre bonheur de les revoir immense.

de la tiédeur

"Si les chrétiens croyaient en Dieu, cela se saurait."

Nietzsche, cité par Ziegler (L'empire de la honte , Fayard 2005)

11 mars 2007

Le monde appartient aux créatifs

Votre Smartfortwo affronte une nuit de tempête terrible, visibilité nulle, vent de face. Vous dépassez un arrêt d'autobus où grelottent une vieille dame en danger de mort, un ami qui jadis vous sauva la vie, et la femme de vos rêves. Qui embarquer comme seul passager possible? Privilégier la solidarité, l'amitié, l'amour de votre vie? On ne rit pas : ce dilemme fut utilisé comme outil d'embauche. Parmi 200 candidats, un seul fut retenu, jugez-en: "Je donnerais les clés de la voiture à mon vieil ami, et je le laisserais prendre la vieille dame pour l'emmener à l'hôpital. Moi, je resterais là pour attendre l'autobus avec la femme de ma vie".

Soyez créatifs.

08 mars 2007

SUR UNE TOMBE AU BORD DU RIVAGE

Moi, noyé, vous m'avez couché sous cette rive.
Soyez remerciés, mais mon sort est amer.
Devrai-je entendre, à tout jamais, gronder la mer ? "

Posidippus, 3ème siècle avant notre ère.
Repris par Marguerite Yourcenat dans La Couronne et la Lyre.

Sagesse des jardins japonais

"Sagesse du Jardin de la Princesse à Kyoto.

Où qu'on soit, on peut y distinguer la rivière, ou le ciel au travers de la cîme des arbres, ou la solidité des rochers et du sable propices au repos. D'aucun endroit on ne peut embrasser les trois à la fois: eau, ciel, pierre. On ne peut à la fois allier la progression du mouvement et la stabilité du repos sur le rocher, la progression vers l'inconnu et la légèreté de l'âme qui regarde le ciel et prie, la stabilité du roc qui réconforte et l'appel du ciel qui nous incite à nous élever.

Notre vie est recherche permanente d'équilibre."

07 mars 2007

Simulacres

"Dans notre monde, la copie précède l'original, la carte précède le territoire, l'image de la guerre précède le conflit. Le vrai est effacé et remplacé par les signes de son existence."

Jean Baudrillard. Simulacres et simulations.

05 mars 2007

paroles de silence

"Aussi sommes-nous trop souvent occupés, jour après jour, à des bavardages infinis qui - en toute innocence - font silence sur l'essentiel."

Jean Claude Guillebaud. La tyrannie du plaisir. Seuil 1998.

04 mars 2007

Clouds

"Des nuages qui s'amoncellent ne sont pas des ennuis qui arrivent mais des occasions de rêver qui se multiplient."

LE GUIDE DU CHASSEUR DE NUAGES. The Cloudspotter's Guide. Gavin Pretor-Pinney. JC Lattès, 320 p., 19 ¤.

Eloge des nuages et de ceux qui les aiment: pas de bonheur sans nuages. La formule pourrait prêter à confusion, être prise dans un sens pessimiste. On entendrait qu'il n'existe aucun vrai bon moment durable et complet, dépourvu d'ombre ou de perturbation. Des obstacles obscurciraient toujours les instants lumineux. Ce serait un total malentendu. Il faut comprendre, au contraire, que les nuages sont tout bonnement la condition d'une existence heureuse. Les vrais nuages, évidemment, grands troupeaux de vapeur d'eau que l'on contemple, dans leur diversité infinie, sous toutes les latitudes.Plaisir des nuées, hautes ou basses, lourdes ou légères, opaques ou diaphanes, bombées ou lisses, unies ou contrastées, immobiles ou fugaces, ces formes imprévisibles offrent matière à découvertes, extases et contemplations sans fin. Il y a des nuages à profusion à peu près partout. Quelques malheureux déserts mis à part, on en trouve toute l'année d'un bout à l'autre du globe. Collectionneurs de stratus en couleurs? Adhérez à la Cloud Appreciation Society (www.cloudappreciationsociety.org) où 2 000 amoureux s'échangent leurs plus beaux clichés, lectures et anecdotes. Ces nimbophiles répartis sur les cinq continents ne sont pas tous, et de loin, climatologues ou physiciens. Juste des gens que réjouit la contemplation des nuées.

ROGER-POL DROIT (Le Monde des Livres du 1er mars 2007)

03 mars 2007

Le temps qui passe

"Dis, au moins le sais-tu,
Que tout le temps qui passe,
Ne se rattrape guère,
Que tout le temps perdu,
Ne se rattrape plus"

Barbara. Dis, quand reviendras-tu.

Nouvelles du ciel

Sur la neige couvrant la boîte aux lettres, l'étoile minuscule d'une patte
d'oiseau - de fraîches nouvelles du ciel.

Christian Bobin . Une bibliothèque de nuages.
.


02 mars 2007

soi et différence

"Rien de plus soi que de se nourrir d'autrui. Le lion est fait de mouton assimilé »,

Paul Valéry. Cahiers

28 février 2007

sagesse de Guillevic

"Accueille encore,
Recueille encore.
Tout s'oubliera,
Sauf cette attente
Qui fut comblée."

Guillevic.

27 février 2007

Sagesse de l'oubli

"L'homme est parfois assez fou pour préférer le chagrin à l'oubli."

Maurice Chapelan

sagesse du voyage

"Nous sommes des voyageurs. Qu'est-ce que voyager? Avancer.
Que toujours te déplaise ce que tu es pour parvenir à ce que tu n'es pas
encore.
Avance toujours, marche toujours, ajoute toujours. "
Saint Augustin. La Cité de Dieu.

être soi

"Je suis et resterai l'homme de ma vie."
JC Brisville. Quartiers d'hiver.

24 février 2007

sagesse de Bukowski

«Toi, tu es laid, et tu ne connais pas ta chance :
au moins, si on t'aime, c'est pour une autre raison.»
Charles Bukowski. Contes de la folie ordinaire

Vérité côté pile côté face

"L'hirondelle est sûre que la journée commence au lever du soleil.
La chauve-souris est sûre que la journée commence au coucher su soleil.
Elles sont dans le vrai toutes les deux. "
Claude Roy. L'ami qui venait de l'an mil.

23 février 2007

Les p'tits papiers

"Qu'est-ce qu'on peut acheter chez vous pour remplacer la colombe en porceleine de maman?."
Lettre d'enfant déposée à l'atelier de Picasso , rue des Grands-Augustins (Paris), reprise par Pierre Assouline dans son dernier ouvrage (Rosebud).

Pareille innocence touche, et on ne connaît pas la réponse du Maître. On minimise l'importance des petits papiers. J'en ai trouvé deux dans les escaliers, cet après-midi de consultation. Je demeurais sur l'impression d'un couple d'âge mûr dont le mari mène un rude combat, épuisant, contre les TOCs.
Longue écoute de ce bagne quotidien, jour et nuit. Une demi-heure perdue parmi tant d'autres, affections et troubles divers au stade soit débutant, soit bien installé, soit chronicisé, soit en rechute. Un pied livide et froid, brutalement cette nuit, n'autorisant plus plus 25 mètres sans s'arrêter. Je convainc le patient de se laisser reconduire chez lui et l'emmène.
Du sang noir dans les selles, depuis ce matin. Un malaise abdominal sévère hier chez un cadre financier récemment promu; il ne dort plus depuis. Un jeune belge d'origine maghrebine qui m'explique les difficultés d'insertion professionnelle qu'on rencontre quand on est épileptique et que par malheur une crise vous surprend sur les lieux de travail. Une nouvelle grand mère, atteinte de coeliaquie, vient se renseigner sur les risques héréditaires de son affection.
On arrête ici, ce ne sont pourtant que quelques pépites volées à la journée d'un modeste médecin de famille, qui ramasse à mains nues les plaintes comme les petits mineurs de cuivre au Congo. Et soudain, on y revient, deux modestes cartons de remerciements dans les escaliers, avec une attention inattendue. L'un des deux signale sa guérison après deux ans et demi de dépression, l'enfer existe sur la terre, et a ramené des produits du soleil d'une région lumineuse du sud de la France. L'autre me surprend par son caractère inattendu, gratuit, de la gentillesse pure.
Magie des petits mots grifonnés à la hâte, avec les paroles du coeur. D'un seul coup, le soleil illumine la maison de l'intérieur, rappelant même si on en doute parfois que toute plaie n'est pas mortelle, que toute douleur n'est pas maladie, qu'aucune solitude n'est définitive.
Promis, demain je fais un petit mot, au moins un.

11 février 2007

Le roman de la Terre

"Colomb a terminé le roman de la Terre, il ne reste aucun nouveau monde à l'humanité."

Hermann Melville

08 février 2007

Sagesse de Paul Valéry

« Tout ce qui est simple est faux, mais tout ce qui ne l'est pas est inutilisable. »
Paul Valéry

sagesse de Teilhard de Chardin

"Ce n'est pas tant (quoi qu'il paraisse) de la quantité de nos réserves économiques, mais bien plutôt de l'intensité de nos puissances réflexives et affectives que dépendent, en fin de compte, le succès ou l'échec ultime de l'humanité."
Pierre Teilhard de Chardin.

05 février 2007

Désirs des parents et homme orchestre

"Je suis son fils, parce que j'ai hérité de ses désirs."
Erri de Luca, en parlant de son père Aldo dans "Sur la trace de Nives", Gallimard. 2007

Jours étanges, quand nos enfants quittent la maison familiale pour parcourir les routes du monde à la recherche de leur propre voie.
On les imagine en hommes-orchestre, jouant de concert l'orgue de Barbarie, la flûte et la guimbarde. L'orgue qui déroule mécaniquement ses superbes cartons préenregistrés comme l'est notre patrimoine génétique, la flute pour interpréter de manière plus ou moins personnelle les partitions antérieures (l'héritage des désirs de nos parents, des maîtres, des êtres chers qui nous ont précédés sur la route), la guimbarde pour jouer à tue-tête sa petite musique personnelle, intime, qui ne préexiste nulle part, qui crée une mélodie inédite à chaque jour neuf que la vie nous donne.
Aucune ne domine l'autre, mais je ne suis pas loin de croire que la réussite d'une vie tient à l'équilibre de ces trois instruments.

04 février 2007

du passé simple au passé recomposé

"Le souvenir redonne une possibilité au passé."

Giorgio Agamben (né en 1942, philosophe italien contemporain)

Bohème

"pieds sur terre,
nez au vent,
yeux aux étoiles"
Jean-Pierre ANDREVON , "Buveurs de vie"

03 février 2007

God morning, little boy

"Je lui dirai qu'il est né de l'amour
Que nous l'attendions passionnément
Que chaque nuit s'efface au nouveau jour
Qu'il sera grand mais qu'il a bien le temps
Oh dieu qu'il a bien le temps

Et que la vie l'appelle que le monde l'attend
Que la terre est si belle et le ciel est si grand
Qu'il est beau, que je l'aime, qu'il est ma vie, ma joie
Qu'il est un parmi des millions d'humains
Mais bien l'unique pour moi

Je lui dirai qu'ici bas tout s'apprend
Le bien le mal et même le bonheur
Qu'il ne perde jamais ses yeux d'enfant
Devant trop de malheurs et de laideur
Qu'il regarde avec son coeur

Je lui dirai d'être sage et prudent
D'aller frôler les glaces et les feux
Qu'il goûte à tout mais sans jamais dépendre
Que trop peut être pire que trop peu
Oh bien pire que trop peu

Et que la vie l'appelle que le monde l'attend
Que la terre est si belle et le ciel est si grand
Qu'il est beau, que je l'aime, qu'il est ma vie, ma joie
Qu'il est un parmi des millions d'humains
Mais bien l'unique pour moi

Je lui dirai les chansons les poèmes
Qu'il n'y a pas d'amour sans histoire
Que le bonheur est un grain que l'on sème
Qu'amour et santé ne s'achètent pas
Et qu'on n'est riche que de ça."

C'est un de ces soirs où le médecin étonné dépose sa trousse, le temps de l'accueillir d'une phrase étonnée : "Tu es déjà là, toi!"
Un soir pour se demander où sont passées toutes ces années, avec l'impression tenace de passer le relais, "vas-y, petit, c'est à toi maintenant."
En sourdine, j'écoute pour la dixième fois en chaîne cette ballade ensorcelante au rude accent québecquois de l'amie Céline et me dis qu'il n'est de plus belle manière de lui souhaiter la bienvenue.
Se bousculent dans ma tête des dizaines d'image de gosses turbulents, les miens, de chutes à vélo, de coups de pieds perdus, d'arcs à flèche, de plaines de jeux urbaines où nous nous réfugions à la recherche d'hypothétiques espaces verts les dimanches matins, bonheurs paisibles d'enfants s'amusant de tout et surtout de rien.
Et brutalement, comme au réveil d'un rêve, un de ces bambins tient lui-même un petit bout de chair tout frèle dans ses bras à lui, le nourrit, l'habille mieux que je ne le fis jamais. On s'aperçoit à ce moment-là que, contrairement à tout ce qui se dit et se lit, l'humanité progresse.
Et que les paroles du chant sonnent bien juste.

CV

02 février 2007

sagesse des îles Hébrides

"Les îles Hébrides,
où on laisse passer le temps qu'il fait,
où on laisse faire le temps qui passe. "

Ushuia. vendredi soir 2.2.07

01 février 2007

La nature du silence

"Les paroles qu'on refuse d'écouter et celles qu'on renonce à prononcer sont plus silencieuses que le silence.
Elles renforcent la solitude, creusent le vide et tombent dans un gouffre sans fond, où elles n'éveillent aucun écho."
Marcel Jouhandeau. Nouveau Testament, Journaliers XII, Editions Gallimard, 1968, page 112

29 janvier 2007

L'imparfait du présent

"La nature devient plus ce qu'on invente que ce qu'on explore."
François Dagognet.

L'être humain est en voie d'instrumentaliser sa planète, agité lui-même par une espèce de mouvement perpétuel qu'il a élargi au transport de biens.
Subtilement associée à la notion de progrès, le mouvement s'est imposé à notre manière de concevoir l'existence, ce quelque chose qui "avance" de la naissance à la mort.
Il n'y aura bientôt plus, selon l'expression de Finkielkaut, d'endroit sur terre où le vrombissement de l'homme ne soit perceptible en permanence.
(L'imparfait du présent. Alain Finkielkaut.)

28 janvier 2007

sagesse de Scutenaire

"L'humour est une façon de se tirer d'embarras sans se tirer d'affaire".
Louis Scutenaire

27 janvier 2007

L'art , facette de la mémoire

“L'art est le seul substitut de l'expérience que nous n'avons pas pu acquérir.”
Georges Semprun

Si le témoignage et la mémoire semblent limités dans leurs capacités à transmettre la réalité existentielle d’une expérience personnelle, il subsiste un complément efficient : l’art et plus précisément la littérature.
Si les tableaux de Zoran Muzic ont la froideur et le pathétique d’une représentation fidèle de l’horreur des camps, les livres de Primo Levi ont cette capacité à décrire, à raconter puis à introduire le lecteur dans cet univers, a priori, indicible.
L’art comme objectivation de nos sentiments, de nos émotions, comme miroir de l’âme ou du corps, évoque avec plus d’authenticité ce que le discours peine à exprimer.

26 janvier 2007

Borgès et l'oubli

"La mémoire choisit ce qu'elle oublie."
Borgès

Je crois déjà avoir partagé cette courte affirmation du grand Borgès. Je la trouve plus belle que jamais.
La faculté d'oubli n'est-elle pas la première condition du bonheur, et de notre survie?
Infernale doit être l'existence de celui qui se souvient de tout.

25 janvier 2007

Danger et fragilité

"C'est le rôle de l'avenir que d'être dangereux."
Whitehead

Notre troisième fils et son épouse préparent la venue de leur premier bébé dans les jours qui viennent. Quitter la tiédeur et le sentiment de sécurité absolue procurées par le sein maternel est une bien cruelle épreuve, indispensable pourtant pour connaître des joies encore bien plus grandes que tout ce qu'il peut imaginer.
Oui, l'avenir est dangereux. Le seul rempart qu'on puisse y opposer est cette petite chose frèle; d'autres humains, apparus plus tôt que ce bébé, et qui vont lui baliser la route.

24 janvier 2007

sagesse de Claude Monet

"J'ai cherché la perfection ,
et j'ai détruit ce qui allait bien."
Claude Monet

Faveur du grand âge

"Seul privilège du grand âge: on peut ne plus parler à mots couverts. Dire ce qu'on pense vraiment ne tire plus à conséquence.
Mais on ne vous écoute plus."

JC Brisville. Quartiers d'hiver. Ed du Fallois. 2006


22 janvier 2007

entre dit et non dit

Passant à ma hauteur
"Bisou" dit-elle
... à son portable.
Damien Gabriels

tant qu'il y aura des îles

"Pourquoi sommes-nous donc à ce point gagnés par le bien-être dès que nous abordons et séjournons, ne fût-ce que pour quelques heures, dans les îles?
Ossip Mandelstam déclare, dans Le Sceau égyptien, que c'est parce qu'il ne s'y ouvre que des chemins courts et limités qui n'offrent plus «l'infini de leur liberté négative» !
Il est vrai que nous n'y sommes plus perpétuellement tenaillés par l'anxiété des choix comme c'est le cas aux différents carrefours du vaste monde ...
Il semble, en effet, que cette exaltation microcosmique nous saisisse dès l'instant où nous posons le pied sur ces «bouts du monde» repliés sur eux-mêmes, ces monades géographiques. Nous redécouvrons, oubliés depuis l'enfance, les multiples et riches ressources de l'immédiat, les trésors anciennement enfouis de nous¬mêmes, des dimensions à nos mesures.
En bref, nous renouons avec cette évidence que bien souvent l'existence gagne à se restreindre!"
Petit traité de la désinvolture . Denis Grozdanovitch.

21 janvier 2007

éloge de la lenteur

“Vroeg rijp, vroeg rot, vroeg wijs, vroeg zot.”
(Maturité précoce, détérioration hâtive, précoce sagesse, hâtive sottise)
Sagesse des proverbes flamands

20 janvier 2007

Sagesse du combat de coqs

"Aucun combat de coqs n'a jamais produit un oeuf."
Sagesse chinoise

le puzzle d'une vie

"Puzzle

Combien de vies dans une vie?
C'est comme demander combien de pièces dans un puzzle, dit-il.
L'un en compte douze, l'autre douze fois plus,
il en faudra mille ici, là quarante.
Et chemin faisant,
on comprend que chacun aura
très exactement le temps
de compléter le sien,
et que le nombre de pièces n'aura rien signifié,
et que le temps lui-même,
cent ans, dix secondes,
n'aura jamais été qu'un instant,
une fabuleuse fraction d'éternité. "

Francis Dannemark. Une fraction d'éternité. Le Castor Astral. 2005

17 janvier 2007

L'légance du hérisson

"En pensant à ça, ce soir, le c½ur et l'estomac en marmelade,
je me dis que finalement, c'est peut-être ça la vie:
beaucoup de désespoir mais aussi quelques moments de beauté
où le temps n'est plus le même.
C'est comme si les notes de musique
faisaient un genre de parenthèses dans le temps,
de suspension,
un ailleurs ici même,
un toujours dans le jamais.
Oui, c'est ça, un toujours dans le jamais."
Muriel Barbery. L'élégance du hérisson. NRF 2006

.

le goût du miel

" Une goutte de miel a le même goût qu'un bol tout entier"
(proverbe bouddhiste)

13 janvier 2007

conversation asynchrone

« Ne t'entête pas à rechercher la vérité,
cesse simplement de t'accrocher à tes opinions. »
Jack KORNFJELD

Je retrouve cette phrase en relisant le dernier livre de Francis Dannemark (Une fraction d'éternité), qui m'enchante tant et plus.
Me reviennent les Rubayat (Quatrains) d'Omar Khayyam, né il y 1000 ans. Ces deux-là me donnent l'air de converser paisiblement ensemble.

"Contente-toi de savoir que tout est mystère :
la création du monde et la tienne,
la destinée du monde et la tienne.
Souris à ces mystères comme à un danger que tu mépriserais.
Ne crois pas que tu sauras quelque chose
quand tu auras franchi la porte de la Mort."