"Oubliés les câlins
et vive la nouvelle gentillesse
garder la distance
retenir les bras
et étendre le cœur."
Sophia Wilson
Étendre le cœur. Comme le note finement la philosophe Svenja
Flaßpöhler, la crise du Covid-19 se caractérise par un
renversement radical des hiérarchies établies : "au cours des
dernières décennies, la ville était l’objet – hors de prix – de
toutes les aspirations. La campagne tient désormais ce rôle. En
temps normal, la production est l’objet de tous les éloges. Nous
réalisons aujourd’hui la valeur primordiale du travail re-productif :
soin apporté aux malades, aux aînés et aux nouveau-nés,
approvisionnement, etc.(..) Notre fils grandit, tâtonne pieds nus
dans la chaleur du salon, attrape du papier à dessin dans les
rayonnages. Comme souvent, il se contente de peindre une ligne sur
la feuille. Satisfait de son œuvre, il la jette aussitôt. “Le bloc
de papier est presque fini, et je ne pourrai pas en racheter”, lui
dis-je. Il reprend alors la feuille et peint le dos de toutes les
couleurs. Il y a des effets positifs à cette crise : l’abnégation
et la durabilité deviennent des nécessités ; la solidarité et le
soin deviennent des devoirs sociaux fondamentaux." Et une
attention accrue apportée à l'autre, si proche et parfois si
négligé. Moment propice pour redécouvrir ce mélange de vertus - le
courage, la simplicité, l’honnêteté - que George Orwell appelle
la “décence ordinaire”. Si nous parvenons à perpétuer cette bonté
qui émerge dans la période difficile que nous vivons, malgré les
prévisions sombres, nous vivrons peut-être mieux.
Lu dans:
Sophia Wilson. La Couronne. Médecin et psychiatre (Nouvelle-Zélande). Publié dans Hektoen International, numéro de printemps 2020, rubrique Poetry. www.hektoen.org
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