31 mai 2013

La grandeur de l'homme défait

"Quand soudain, aux environs de minuit,
Tu entendras passer un cortège invisible,
Avec des mélodies sublimes, ponctuées de clameurs
(..) Une dernière fois salue Alexandrie qui s’éloigne.
Surtout ne t’abuse pas, ne t’en va point dire
Que ce n’était qu’un rêve, que ton oreille s’est méprise;
(..) En homme prêt depuis longtemps, en homme courageux,
Comme il convient à qui pareille cité s’est livrée,
Approche-toi résolument de la fenêtre,
Et avec émotion, certes, mais sans
les plaintes et supplications des lâches,
écoute, dans une ultime jouissance, les sons inouïs,
Les si doux instruments du mystérieux cortège,
Et salue-la, cette Alexandrie que tu perds."
    C. Cavafy

La longue rivalité de Marc Antoine, amant de Cléopâtre, et d'Octave prend fin le soir de la bataille d'Actium au large de la Grèce, bataille navale durant laquelle les galères égyptiennes fuient précipitamment causant la défaite d’Antoine. Les amants se suicident peu après.  Le poète Cavafy évoque la dernière soirée d’Antoine. Un dernier conseil à l’homme défait : partir la tête haute, malgré l’échec. Ces vers s’adressent à Antoine, mais ils s’adressent également au lecteur – par le biais du tutoiement – et donnent une grandeur à la mélancolie pleine de remords que chacun de nous connaîtra à la fin de ses jours. La chanson Alexandra Leaving de Leonard Cohen est inspirée de ce poème.

Quand le doute nous guette, quand une impression tenace d'échec se surimprime à nos réussites, quand s'insinue en nous la recherche d'un réconfort dans la plainte, la force des mots venus d'avant, venus d'ailleurs, peut se révéler le meilleur des remèdes.


Lu dans:
Constantin Cavafy. Les dieux désertent Antoine (ou Antoine abandonné des Dieux).
Info inspirée du superbe blog littéraire  http://brumes.wordpress.com/about/
La chanson Alexandra Leaving de Leonard Cohen est inspirée de ce poème.





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