28 septembre 2019

Naufragés


"Assis dans un coin du vieux port je me disais : Et dire qu’un billet d’avion Dakar-Paris, c’est 800€ et 5 heures de vol."
                    Slimane Benaïssa


Elle a trouvé refuge dans le vieux Marseille, en attente d'une route vers l'Angleterre. Elle se remémore l’impossible odyssée aux bons soins de passeurs douteux, les compagnons de voyage emportés par les flots, la traversée ce que l’humanité produit de plus pure horreur. On lui dit que le plus dur est derrière elle, elle n'en est guère convaincue: en Afrique elle était migrante, ici elle est une exilée et l'exil est une souffrance à part entière. Demain cela fera trois mois qu'elle a quitté son village et sa famille de la manière la plus clandestine qui soit. A la devanture des kiosques, elle déchiffre la une des quotidiens relatant la faillite de Thomas Cook et ses 600.000 clients à rapatrier. L'incertitude du calendrier de retour (un jour, une semaine?) de ces naufragés touristiques lui fait envie, ainsi que la sollicitude à les rapatrier dans de bonnes conditions. Si tous les hommes sont égaux, ceux avec un visa le sont plus que d'autres, même clients d'une firme en faillite. 



 
Lu dans:
Collectif. Des traversées et des mots. Écritures migrantes. Mardaga. 2019. 96 p.
Une initiative originale née dans la foulée de la Foire du livre : rassembler en un recueil des textes écrits par des migrants et d’autres créés pour l’occasion par quelques-uns de nos écrivains francophones et par des personnes impliquées dans les mouvements aux côtés des réfugiés. 

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