"Il y a tellement de stimulations au moment où on va passer à table. On peut avoir faim, être fatigué de sa matinée, avoir envie de se donner un vrai plaisir ou simplement ne pas vouloir refuser les suggestions de l'autre. Tiens, hier, c'était tellement manifeste. Depuis plusieurs jours, je m'étais dit que j'allais davantage faire attention à ma faim. j'arrive au restaurant - nous allons tous les midis dans le même - et le restaurateur que je connais bien, s'avance vers moi et me dit : "Monsieur Redon, j'ai des rillettes, vous allez m'en dire des nouvelles !" Je me suis entendu dire: "Non merci, je ne prendrai pas de rillettes", simplement, tranquillement. "Mais j'ai une tarte aux pommes en dessert, un vrai régal, il vaut mieux la commander tout de suite pour être sûr qu'il en reste", a ajouté le tentateur. Nous entendons tous la voix du restaurateur en train de prononcer cette phrase, le carnet en main, jetant un coup d'œil avisé vers la cuisine, puis nous regardant de nouveau avec un air protecteur et sûr de lui. Et moi: "Allons-y pour la tarte aux pommes !"
L'histoire est trop belle! J'ose passer en mode raisonnement bancaire: nous sommes dans une société de consommation. Le banquier pense instantanément argent, le restaurateur, même s'il a à cœur de bien soigner ses clients, est là pour vendre ce qu'il a préparé. Imagine-t-on un restaurateur dire: « Écoutez, le dessert, ne le prenez pas, vous avez suffisamment mangé!»
Annie Lacuisse-Chabot
Bonne fête de Pâques !
CV.
Lu dans:
Dr Annie Lacuisse-Chabot. Maigrir, la transformation de soi. Odile Jacob. 2009. 238 pages. Extrait p.71,72