14 mai 2020

Au bal masqué


"Aujourd'hui, je fais ce qui me plaît
Devinez, devinez, devinez qui je suis
Derrière mon loup, je fais ce qui me plaît, me plaît
Aujourd'hui, tout est permis". 
                        La Compagnie Créole. Au bal masqué.


Et soudain c'est Venise au carnaval. Des loups de toutes les couleurs déboulent dans les rues, modèle bandana, touareg, foulard cowboy, de toutes les tailles, en cellulose, tissu écru, fine soie, plastic souple by PlayMobil. Seuls quelques originaux s'affublent encore d'un banal masque FFP2 médical qui leur fait une face de Pinocchio triste égaré en salle d'opération. Attention les amis, si le masque est tendance, son port n'autorise pas tout. Un, on ne profite pas du fait qu’on a la bouche cachée pour dire du mal des gens, d'ailleurs on ne sait jamais si l'interlocuteur n'est pas la personne dont on médit et complote. Imaginez votre tête quand il ôtera le masque "coucou, c'est moi, salaud". Deux, on ne fait pas de grimaces aux enfants qui pleurent dans la rue, ni même des sourires, on ne leur tire pas la langue , ça fait flipper les parents et avec le masque, les gosses, tout ce qu’ils voient, ce sont vos gros yeux qui roulent et ça les traumatise.  Trois, le bon côté des choses, il ne faut plus vous forcer à sourire tout le temps, ça repose drôlement. Quatre, on ne fait pas semblant de ne pas reconnaître les gens qu’on n’avait pas envie , surtout qu’eux, sous votre masque, ils vont ont bien reconnu. Donc, on résume: on reste civilisé, on dit bonjour madame, on est poli, on incline légèrement la tête, on se fait un regard avenant, des yeux doux, et on parle peu car de toute manière on ne vous comprend pas. C’est pas parce qu’on n’a qu’un demi-visage que tout est permis.



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Merci à Julie Huon, dont je me suis largement inspiré pour ce billet, pour ses observations décapantes et quotidiennes depuis le début de la covid-story.
Julie Huon. Jour 51 : les règles. Le Soir 14 mai 2020. Page 14

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