19 septembre 2025

Gaza

 "Soixante-six ans que nous vivons cette lutte. On n'a connu que ça, en fait, on est toujours là. Des fantômes, chaque jour un peu plus invisibles aux autres et à nous-mêmes. Comme nous le sommes aux yeux du monde depuis toujours.'  

                                    Rachid Benzine


Qu'écrire encore après ce déferlement continu d'images, de destructions, d'exodes et de morts? Le partage soir après soir d'une pensée positive sur la journée écoulée me devient difficile. Cinquante ans se sont passés depuis que Thomas Merton partageait  ses "Réflexions d'un spectateur coupable", oscillant entre le retrait du monde pour se garder une existence intérieure propre et le souci de s'engager dans un activisme désespéré car impuissant. Que n'a-t-on reproché lors de la Shoah l'inaction des dirigeants de l'époque, du moins ceux qui en étaient informés?  Aujourd'hui, nous sommes tous informés, culpabilisés de ne pouvoir rien faire devant le drame de Gaza et ses survivants fuyant en une interminable cohorte longeant la mer, tandis que d'autres trop pauvres pour fuir organisent une survie dans les gravats ou enterrent leurs morts. Images nsoutenables, impossibles à évacuer de nos mémoires, et qui parviennent à nous rendre notre propre bonheur insupportable. 


Lu dans:
Rachid Benzine. L'Homme qui lisait des livres. Julliard. 2025. 126 pages. Extrait p. 62
Thomas Merton. Réflexions d'un spectateur coupable (Conjectures of a Guilty Bystander), Albin Michel, Paris, 1970.

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