« J’aime la pluie avant qu’elle tombe
bien sûr on croit que ça n’existe pas
c’est bien pour ça
que c’est ma préférée.
Une chose n’a pas besoin d’exister
pour rendre les gens heureux. »
Jonathan Coe
C'était à Calcutta, il y a bien des années durant la saison des
moussons, l'étrange expérience de marcher dans un air qui
progressivement se liquéfie, court intervalle où se pressent avec
certitude "qu'il va se passer quelque chose" qu'on ne pourra éviter.
Une telle saturation en humidité qu'elle ne peut que déboucher sur un
déluge inondant les rues en quelques minutes. Ces points de rupture sont
plus fréquents qu'on l'imagine: le moment juste avant le gel, la lueur
dorée juste avant la nuit, ou juste avant le jour. La vie connaît elle
aussi ces fulgurances, l'attente anxieuse du premier cri au sortir du
sein maternel, ou celle précédant l'émerveillement des premiers pas, le
court vertige juste avant de devenir amoureux, l'instant essentiel où on
décide de tout quitter pour vivre sa vie, celui du retour quand Ulysse
retrouve Pénélope au terme d'un interminable périple, le moment des
adieux avant de mourir. Moments reliés par un sentiment
d’inéluctabilité, que "ce ne peut être autrement", qu'il faut lâcher
prise, et que c'est bien ainsi.
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