02 mars 2021

T'as le bonjour du printemps

 

"Nous étions ensemble. J'ai oublié le reste."
                Walt Whitman(1819-1892)
 


Il y avait le virus, on a le(s) vaccin(s), et déjà s'annoncent les mutants du Bois de la Cambre, de la Boverie, de Louvain-la-Neuve. Une épidémie larvée qui ne dit pas son nom, printanière, dont les symptômes commencent à frapper nos plus jeunes, qu'une police guère féroce disperse comme elle peut aux cris de Liberté, liberté. Cheveux blonds, cheveux marrons.
Mêmes causes, mêmes effets: ce mercredi matin, le retour du soleil voit affluer en gare d'Ostende des trains bondés à 130% de leur capacité, que la police canalise ici aussi comme elle peut. Cheveux gris, cheveux blancs. Hormis la différence d'âge, rien ne sépare vraiment ces deux groupes, et pas plus les uns que les autres ne mettent vraiment en danger l'ordre sanitaire, mais on ressent diffusément que cela se complique.
Je regarde les uns, et puis les autres, m'interrogeant: de quel groupe suis-je au fond de moi? Pour le savoir, peut-être me faudrait-il partager "une parenthèse inattendue" du nom de la mythique émission de France 2 où Frédéric Lopez invitait trois personnalités de profession différente à vivre pendant 24 heures dans une cabane isolée et à réfléchir sur leur parcours. Laisser se croiser librement, attentivement, autour d'une fricassée,  les paroles de l'étudiant, du retraité, du policier et d'un quidam pour imaginer une sortie par le haut de cette année sans fin. Quand on repava le Quartier latin en 68, les plus enhardis partirent dans les Cévennes élever des moutons, et la vie reprenait en mieux. De quels moutons dans quel Larzac sont faits nos rêves en ce mois de mars 2021? Manquerions-nous de prophètes capables d'un discours alternatif au sempiternel "les chiffres sont mauvais" asséné depuis des mois? Le meilleur est peut-être devant nous, mais à inventer.


Lu dans:
Walt Whitman. Feuilles d'herbe (Leaves of Grass, trad. Jacques Darras). Collection Poésie. NRF Gallimard. 2002. 800 pages. Extrait p. 454 .  Walt Whitman (1819-1892) s'est imposé dans ce recueil comme le « poète américain », recueil qu'il ne cessera de remanier et d'augmenter tout au long de sa vie. Il en ouvre la première édition, en 1855, par une préface, véritable manifeste et déclaration d'indépendance de l'Amérique littéraire et de l'idéal américain : il chante la splendeur de la nature et les grands espaces, l'esprit de Frontière, la démocratie. Figure de la marginalité, guide mystique de la Nation, Whitman ouvre ainsi la route aux prophètes de la beat generation.

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