"Un train s'arrête puis, laconique, ce message tombe: "Incident de personne."
E. Pessan
On peut imaginer que pour une personne au moins, l'instant est critique.  Tout fascine dans cette courte phrase: le souci de ne pas "heurter les  sensibilités" par l'utilisation de termes neutres (incident versus  accident, personne - terme générique entre tous, pouvant même aller  jusqu'à nier une existence réelle si on retient sa signification finale  "personne-rien"), sa brièveté, la capacité d'anticipation de ce qui peut  se passer ensuite. On évoque aussitôt le film magistral "Un soir un  train" de Delvaux et son train mystérieux stoppant la nuit en pleine  campagne, ou le tout récent livre d'Eric Pessan. Un TGV freine  inopinément, l'obscurité tombe progressivement, plongeant ses occupants  dans un huis clos entre chien et loup que les langues vont délier, cousu  de récits de vies d'autant plus intimes qu'une sourde angoisse empreint  les usagers. La frontière entre le drame individuel, sa traduction  aseptisée pour la société qui y assiste (La chute d'Icare de Breughel  peignant une seule main surnageant des flots alors que le laboureur  poursuit sa tâche inlassablement ne dit rien d'autre) et la brèche que  cet accident inattendu ouvre dans nos existences demeure un étonnant  sujet de réflexion pour les artistes. 
Lu dans
Incident de personne. Eric Pessan. Albin Michel. 192 p
Incident de personne. Eric Pessan. Albin Michel. 192 p
 
 
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