"Deux visages semblables dont aucun ne fait rire en particulier, font rire ensemble par leur ressemblance.".
Blaise Pascal. Pensées
Pierre ouvre la porte et Paul vous accueille. Soixante-quatre ans de vie commune au service de la même patronne : leur mère, si tyrannique mais si bonne. Même physique, même anniversaire, même résignation devant les épreuves de la vie. Ils ne se sont jamais séparés plus de huit heures d’affilée : école, service militaire, football (arrière droit, arrière gauche), ensemble. Comptables tous les deux, le premier à la mutuelle socialiste, l’autre au syndicat. Ils ont atteint l’âge de la pension sans faire des vagues, tout heureux d’avoir pu faire la route à deux et d’emménager « pour faire plaisir à maman » dans une villa de la campagne bruxelloise. Ce soir Maman est alitée, ça craint car la mort vient parfois si vite. Pierre tient la main pendant que Paul soutient les oreillers. Soulagement. « Rien de grave, docteur ? Excusez le dérangement." On me raccompagne à la porte, je m’éloigne. Dans le rétroviseur, deux silhouettes séparées font ensemble un dernier signe.
Lu dans:
Luc de Brabandere. Petite philosophie des histoires drôles. Coll.
Petite philosophie des grandes idées. Eyrolles. 2009. 108 pages.
Extrait Kindle pp 150-153
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire