"La sculpture trônait, sœur de toutes les autres, elle témoignait de la même obsession, faire du juste avec de l'injustice, de la passion avec de la misère. Et du désir avec de l'absence."
Claudie Gallay.
Joyeux Noël. Entre la rue de Tabora et la Grand-Place de Bruxelles, des
Pères Noël partout: à la vente du vin chaud, au violon, aux huîtres, sur
une escabelle faisant la quête. Près de la Bourse, un sans-abri s'est
lui aussi affublé d'une couverture rouge vif, de la barbe et du bonnet, à
l'abri d'une palissade où copulent frénétiquement ses deux chiens
bâtards. Je sens comme une envie de fuite. Le Noël qui se voit se heurte
dans mon esprit au Noël qui se vit, celui de toutes les solitudes, des
familles recomposées qui peinent à se rassembler, des enfants sans
attaches nettes recherchant un cadeau incertain. Noël constitue un
passage redoutable pour les fragilisés de la vie, celui où on se compte
autour du sapin, et où se font les bilans d'une année. Comme eux, je me
prends à attendre avec impatience ma modeste activité professionnelle
quotidienne, peuplée d'objectifs ô combien modestes "faire du juste avec
de l'injustice, de la passion avec de la misère, du désir avec de
l'absence."
Lu dans:
Claudie Gallay. Les déferlantes. Editions du Rouergue. La Brume. 2008. 526 pages. Extrait p.182