"Je ne m'endormirai que si d'autres veillent."
Paul Eluard
« Dans ma compagnie, explique un ancien militaire, monter la garde était
considéré par tous comme une corvée. Personnellement, j'aimais la
solitude des nuits au grand air, et me portais fréquemment volontaire
(..), ce qui me valait de passer pour un excentrique. Comment expliquer
ce que je ressentais? Sans doute ne le comprenais-je pas tout à fait
moi-même. Ce qui ne m'empêchait pas d'être conscient de protéger des
bâtiments où personne n'aurait songé pénétrer. Qui tenterait d'entrer
par effraction dans une caserne bourrée d'armement où quelques centaines
d'hommes dans la force de l'âge, et parfaitement entraînés, dorment à
proximité de leur fusil ? Ainsi, ma présence était-elle plus symbolique
que dissuasive. En réalité, ce sont mes camarades endormis qui me
gardaient, non le contraire. Moi, il suffisait que je sois là !"
Lu dans:
Marcel Cohen. Faits. NRF Gallimard. 2002. 242 pages. Extrait p.36
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