08 janvier 2024

Les paradoxes d'un progrès

 "Quelques mois plus tard, ce médecin [Joseph Ignace Guillotin] acquerra une notoriété éternelle pour avoir convaincu le Parlement de reléguer aux oubliettes les mises à mort barbares. Selon leur crime, les condamnés étaient écartelés, brûlés, étranglés, pendus, écorchés vifs ou roués. Il propose, dans l’esprit de la Révolution, la même mort pour tous. "Avec ma machine, je vous fais sauter la tête en un clin d’œil, et vous ne souffrez point. La mécanique tombe comme la foudre, la tête vole, le sang jaillit, l’homme n’est plus. "

                    Bart Van Loo


La rapidité d'un progrès est à la mesure des maux qu'il promet de vaincre. Quand le docteur Guillotin propose en 1789 à l'Assemblée nationale l’utilisation d’un appareil mécanique pour l’exécution de la peine capitale, visant à supprimer les souffrances inutiles tout en garantissant une égalité de traitement à tout citoyen, son projet de loi devait, selon lui, ouvrir la porte à un futur où la peine capitale serait finalement abolie. Son idée est adoptée en 1791 par la loi du 6 octobre qui dispose que "la peine de mort consistera dans la simple privation de la vie, sans qu'il puisse jamais être exercé aucune torture envers les condamnés". L’appareil est mis au point en 1792 par son confrère Antoine Louis, et aussitôt affublé du nom de guillotine malgré ses protestations par des adversaires politiques royalistes. Le docteur Guillotin en manifesta le regret jusqu'à sa mort en 1814, appelant sa fameuse machine « la tache involontaire de [sa] vie ».


Lu dans: 
Bart Van Loo.  Mireille Cohendy, Isabelle Rosselin (Traduction).  Napoléon. L'ombre de la Révolution. Flammarion. 2023. 592 pages. Extrait page 42.

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