"Salauds de pauvres."
Jean Gabin dans La Traversée de Paris. Autant-Lara 1956.
Les beaux quartiers font les belles gens, et on ne peut leur en
vouloir. La grande pauvreté, elle, porte la honte comme un costume mal
taillé, dans des rues taguées malpropres, préférant la compagnie gris muraille d'autres
vilains-pas-beaux auxquels ils se confondent pour ne pas attirer l'attention. Je
découvre les sobres lignes de Karel Logist, lui trouvant bien du
talent: "Ils sont deux, ils avancent flanqués l’un de l’autre, efflanqués. Ils se donnent la main en se rappelant mutuellement qu’ils existent
par une secousse qui les projette épaule contre épaule. Et ils ne me
voient pas, ne peuvent pas me voir car ils sont, à perte de vue
aveugles et invisibles. Ils ne sont pas lavés mais ils portent sur
eux leurs plus beaux habits devenus leurs vêtements de tous les
jours, de même que leur plus beau jour est rapidement devenu
semblable à chaque nouveau jour passé sur un sol étranger mais dans
une même errance." Si peu de choses nous sépare pourtant, sauf le mérite d'être né au bon moment au bon endroit.
Karel Logist. La Force d'inertie. 1996. Le Cherche-Midi. Collection Domaine privé. Epuisé.
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