"Ils ont croisé tes mains où ne bat plus qu’à peine
ce que papillonne le myocarde en peine
coincé dans ta poitrine.
As-tu faim as-tu peur as-tu froid as-tu soif
souffres-tu ? Quel songe fais-tu
dans tes trente milligrammes de morphine ?
D’une araignée peut-être qui tisse un cocon cru
où replier tes ailes.
Ta respiration entre en métamorphose
il y des râles crescendo puis une pause
guettés par ceux qui veillent pendus à tes lèvres mi-closes
dans l’instant très plein où tu t’accordes une trêve
l'air est immobile le temps caresse en rêve
l'idée de s’arrêter.
Et puis cela reprend tu tiens encore un peu le refrain de la vie
fête fragile au travers de la nuit.
Thibault Wautier
Thibault Wauthier, jeune médecin généraliste exerçant dans la province du Luxembourg, a écrit ce beau et âpre poème inspiré par une situation de soins palliatifs qu'il a accompagnée il y a quelques mois. Comme une envie de partager les sentiments intenses qui envahissent le soignant au moment précis où le fil avec le patient se rompt. Qui se tracasse de la souffrance de médecin? Reviennent les mots sobres d'Henning Mankell dans son roman posthume: "Autrefois je croyais qu'un médecin mourait différemment de ses patients. Un médecin connaît tous les processus qui conduisent le cœur et le cerveau à cesser de fonctionner. On pourrait donc croire qu'il est mieux armé que d'autres. En réalité, il n'en est rien. J'ai beau être médecin, la mort est aussi dure, effrayante et impossible à anticiper pour moi que pour quiconque. Je ne sais pas si je vais mourir calmement ou au terme d'une résistance acharnée. Je ne sais absolument rien de ce qui m'attend."
Lu dans:
Thibaut Wautier. Le refrain de la vie. email : wautierthibault@hotmail.com
Henning Mankell. Les bottes suédoises. Le Seuil. Points. 2017. 384 pages.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire