"Entre toi et moi, il y eut un coup de foudre suivi d’une vie; ses hauts, ses bas. Désormais la mort, il ne reste que l’amour; l’éternel."
Kim Thúy
Il y a peu de chose concernant l'épreuve de la durée dans la
      littérature sur l'amour. Prenons le théâtre. Si vous regardez les
      pièces qui montrent les démêlés de jeunes amoureux contre le
      despotisme de l'univers familial - un sujet absolument classique
      -, on pourrait toutes les sous-titrer d'un titre de Marivaux: Le
      Triomphe de l'amour. On a le triomphe de l'amour, mais pas sa
      durée. On a juste ce qu'on pourrait appeler l'intrigue de la
      rencontre. Les grands romans sont souvent bâtis sur l'impossible
      de l'amour, son épreuve, sa tragédie, son écart, sa séparation, sa
      fin. Mais sur la durée positive, il n'y a pas grand-chose... sauf
      chez Beckett. Celui dont on a dit qu'il était un écrivain du
      désespoir, de l'impossible, était avant tout aussi un écrivain de
      l'obstination de l'amour. La pièce "Ô les beaux jours" est
      l'histoire d'un vieux couple, une femme, un homme rampant derrière
      la scène. Tout est délabré, elle est en train de s'enfoncer dans
      le sol, mais elle dit: « Quels beaux jours ça a été. » Et elle le
      dit parce que l'amour est toujours là, cet élément puissant et
      invariant qui a structuré son existence en apparence
      catastrophique, qui ne cache rien du désastre des corps, de la
      monotonie de l'existence, de la difficulté grandissante de la
      sexualité dans la puissance finalement splendide de l'amour et de
      l'obstination à durer qui le constitue. “ Oh le beau jour encore
      que ça aura été... Encore un... Après tout. ”
  Lu dans
Alain Badiou, avec Nicolas Truong. Eloge de l'amour. Flammarion. 2009. 90 pages. Extrait 68-70
 
 
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