"Je tai cherchée
Dans tous les regards
Et dans labsence des regards,
( ...)
Je tai cherchée
Dans la rosée abandonnée.
( ...)
Jai appris quune morte
Soustraite, évanouie,
Peut devenir soleil."
Eugène Guilevic:
"Je tai cherchée
Dans tous les regards
Et dans labsence des regards,
( ...)
Je tai cherchée
Dans la rosée abandonnée.
( ...)
Jai appris quune morte
Soustraite, évanouie,
Peut devenir soleil."
Eugène Guilevic:
"L'art, éternelle énigme de faire quelque chose de rien."
John Berger. D'ici là. Ed de l'Olivier.
Le mystère de la création artistique "ex nihilo" a passionné l'homme de toute éternité. Les créatures peintes sur les parois des grottes de Lascaux existèrent-elles ou surgirent-elles de l'imagination pure des premiers peintres?
Le hasard de mes lectures m'a fait découvrir la semaine passée ce court texte de réflexion sur les rapports mystérieux entre mémoire, travail imagination et création. "Créer quelque chose de rien" prend ici une coloration toute différente.
"De façon un peu étonnante, le lien entre l'imagination et la mémoire (l'impossibilité d'une création ex nihilo) n'est pas souvent clairement énoncé. Peut-être parce qu'il rend inutile le recours à une mystérieuse « inspiration ». À une transcendance.
Imaginer, pourtant, qu'est-ce d'autre qu'opérer, d'une certaine façon, tel le travailleur du rêve, sur sa propre mémoire. La délier, la fragmenter, l'attaquer sous tous les angles, la pulvériser jusqu'à en faire un matériau propice aux combinatoires imprévues, aux connexions inattendues. Un imaginaire possible. Chaque personnage de Balzac ou de Proust, créé à partir de multiples rencontres, est un être nouveau, vivant, à la fois insaisissable et inoubliable. Une composition d'images, de sons, de gestes,
de rythmes à partir de blocs de souvenirs qu'il aura fallu démonter - pour prendre ici un nez, là le timbre d'une voix - et remonter autrement 1. Arracher certains instants à une habitude de pensée, décoller des conventions les moments de soi incarcérés qui avaient gardé l'empreinte de tel ou tel groupe. "Même pour les choses inanimées (ou soi-disant telles), j'extrais une génétalité de mille téminiscences inconscientes. Je ne peux vous dire combien d'églises ont "posé" pour mon église de Combray" dans "Du côté de chez Swann" », écrivait Proust (Lettres à Robert de Montesquiou, Librairie Plon, 1930, p. 284.)."
"Comment l'imagination créatrice parvient-elle à déconstruire le passé, pour reconstruire quelque chose de fondamentalement neuf? Il faut concevoir la mémoire telle une superposition de plaques transparentes dont la surimpression brouillée n'accède à la conscience que sous forme d'affects. C'est le mouvement des plaques les unes par rapport aux autres qui permet de cisailler virtuellement et de déplacer certaines figures du passé. De nouvelles compositions alors surgissent. Le petit sourire de Spinoza, par exemple, peut aller se poser sur le visage de Freud. Travail de rêve, mais aussi, du même coup, possibilitéd'attaque, de mise à mal des clichés qui dormaient, immobiles, terrorisants. Parfois, les plaques s'immobilisent sur un élément commun, un détail apparemment anodin que la surimpression condense. Elles tournent alors autour de ce pivot, de cette brûlante transerelle. Et les souvenirs-écrans deviennent des cerceaux en flammes à travers lesquels de petits fauves longtemps contenus vont pouvoir s'élancer. Dans l'incendie, les plaques se gondolent et reprennent une ancienne courbure. Des thèmes, au fond d'un pli, retrouvent leur charge émotionnelle. L'incandescence passe des images aux mots - soudain miraculeusement capables de dire les affects."
Max Dorra. Quelle petite phrase bouleversante au coeur d'un être? NRF Gallimard. 2005.
«Right and Wrong reach not where men fish
Glory and Disgrace dog the official riding his horse.»
« Mon père, quand j'étais adolescent et qu'il me voyait préoccupé par je ne sais quelle tournure prise par les événements, avait coutume de me répéter: «Dis-toi bien, fiston, qu'au cours de toutes les circonstances de l'histoire, il y a toujours eu des pêcheurs à la ligne.»
Or Jünger raconte, dans son journal d'occupation que j'ai lu beaucoup plus tard, qu'entrant dans Paris déserté par l'exode, juché sur un des chars de sa compagnie et passant sur le pont de la Concorde, il remarque, en contrebas des piles du pont, un type très paisible qui pêche tout en fumant tranquillement sa pipe.
Pareillement, si nous entrons dans n'importe quel musée d'art asiatique ancien et que nous nous dirigeons vers les collections chinoises, nous tomberons certainement à un moment ou à un autre, faiblement éclairé derrière sa vitrine, sur l'un des grands rouleaux de par chemin exquisément peint par l'un de ces mystérieux artistes Tch'an des anciens temps, et nous y verrons, probablement représentés dans leur uniforme rutilant et multicolore, les innombrables soudards redoutablement féroces de deux armées rivales - arborant de magnifiques bannières peinturlurées sur lesquelles des dragons crachent le feu - en train de se tailler généreusement en pièces dans des combats sans merci.
En approfondissant notre examen, nous finirons bientôt par découvrir dans un coin du rouleau, généralement dissimulé derrière un rideau d'arbres, un étang à moitié couvert de nénuphars où vient se jeter en bouillonnant joyeusement un torrent qui dévale de la montagne en gracieux zigzags. A la surface de cet étang, sous un saule vaporeux avoisinant d'autres arbres couronnés de fragiles fleurs blanches, non loin de quelques canards méditatifs qui se laissent dériver sur l'onde parmi des lambeaux de brume, repose une barque dans laquelle un petit personnage coiffé d'un.chapeau de paille pêche sans se soucier de rien.
Et, si nous avons encore la patience de déchiffrer les notes érudites qui accompagnent d'ordinaire ces peintures, nous apprenons que, pour les ermites du Tch'an, le pêcheur à la ligne (particulièrement s'il est un peu ivre de vin de riz) représente le plus parfait symbole de la sagesse. Sur l'un de ces rouleaux qui se trouve au Metropolitan Museum de New York, la minuscule sentence calligraphiée en chinois et qui flanque la tête du pêcheur a été traduite en anglais et dit ceci:
«Right and Wrong reach not where men fish
Glory and Disgrace dog the official riding his horse.»
Denis Grozdanovitch. Petit traité de désinvolture.
"Pour contempler les fleurs
regarder leur reflet dans l'eau
les bambous
leur ombre sous la lune
une belle femme
sa silhouette derrière un store."
Wu Congxian . Vu par la petite fenêtre. Aphorismes. Ed Bleu de Chine. 2005.
On croit se souvenir de nos cours d'esthétique de Poésie ou de Rhéto: l'allusif est plus suggestif que le descriptif.
On en est loin actuellement, et nos littérateurs contemporains pourraient relire avantageusement Wu Congxian et les descriptions de ses "nuits mouvementées", expression chinoise signifiant à la fois "rafale de vent" et "ébats amoureux."
"Si personne ne m'avait dit que c'était l'amour, j'aurais pensé que c'était ue épée nue."
Texte attribué par Rudyard Kipling à un ancien poète indien, cité également pat Jorge Luis Borges, et placée en exergue de "Diotime et les lions" d'Henry Bauchau.
Etrange : la phrase, dans son énigmatique beauté, m'a habité pendant un mois sans que j'en perçoive le sens avec clarté.
La lecture de "Diotime eet les lions" ne m'avait donné aucune clé de comprhéension supplémentaire.
Jusqu'à hier, et l'histoire triste de ce patient touché en plein vol par une histoire d'amour aussi merveilleux qu'impossible. On devine sa souffrance, inexprimée.
Une épé nue.
Je vous souhaite une bonne semaine
CV.
"... dans le printemps aux cent fleurs, sur les grandes allées
je joue à la balle
si en chemin un passant m'interroge je réponds
"je suis un homme oisif à une époque de paix".»
Ryokan, sagesse du Zen
"Au secours je me moi".
Raymond Devos
Ah le hasard des associations. Je découvre dans une de mes lectures de ce week end cette phrase de Devos qui m'amuse sans que je la comprenne. Elle me rappelle un incident comique du week-end passé: au concert aux Beaux Arts, je coince en m'asseyant la main de mon voisin avec la poche de mon veston.
Il me demande poliment: Je peux reprendre ma main? et poursuit instantanément sans que je lui demande rien : Mais c'est ma poche. Oui mais c'est ma main. Et termine en disant. C'est du Devos.
Essayant de retrouver l'extrait précis sur Google, je trouve cet autre texte hilarant que je vous livre en partage. Un peu long, mais on est le week end, cela tombe bien.
Bon dimanche
J'AI DES DOUTES
(L'artiste entre tenant d'une main, une chaise, de
l'autre, sa guitare.)
_ J'ai des doutes!... J'ai des doutes!...
Hier soir, en rentrant dans mes foyers plus tôt que d'habitude...
il y avait quelqu'un dans mes pantoufles...
Mon meilleur copain...
Si bien que je me demande si, quand je ne suis pas là... (s'asseyant)
il ne se sert pas de mes affaires!...
J'ai des doutes!...
(Se levant)... Je vais vous jouer une étude de Sor.
Sor était espagnol de 1778 à ... j'ai des doutes!...
Ce n'est pas sa pointure!... vous comprenez?... alors, il la force!...
après, moi je... (il montre que sa pantoufle est trop large).
Il n'a qu'à s'en payer une paire!
(Revenant à son étude:)
Sor était espagnol de 1778... jusqu'à... sa mort... après de très belles études...
il en a écrit plusieurs très belles aussi...
dont la cinquième que je vais vous interpréter.
(Il se rassied.)
J'ai horreur que l'on se serve de mes affaires!... Pour cinq francs!...
Il a une paire de pantoufles... n'importe où...
La Cinquième Etude de Sor.
(Il joue la première phrase de l'étude de Sor.)
... Mon pyjama!... C'est pareil!... depuis qu'il a acheté le même...
je ne retrouve plus le mien!... il s'en sert... quoi!... il n'y a pas de doute!...
(Il joue la deuxième phrase de l'étude de Sor.)
... Ma femme ne voulait pas le croire. Je lui ai dit:
_ Tu vas voir!... un de ces jours... il va aussi se servir de tes affaires!
Mon vieux, le lendemain, je retrouve son soutien-gorge dans la poche
de son pardessus! Il s'en sert, quoi!... il n'y a pas de doute!
(Il joue la troisième phrase de l'étude de Sor.)
... Un soir, j'arrive sur le palier... j'entends:
"Profitons-en pendant qu'il n'est pas là!...
Débarrasse-toi de ton bonhomme de mari, c'est un rabat-joie!..."
Ah! mon vieux... j'entre... je dis à mon copain qui était là:
_ Oh!... Eh!... eh!... (il lui fait signe de baisser le ton).
Baisse un peu la radio, on l'entend d'en bas!
Il s'en sert, quoi!... il n'y a pas de doute!
(Il joue la quatrième phrase de l'étude de Sor.)
... Trois jours après!... j'entre... je le trouve dans mon lit,
en train de fumer une cigarette, une des miennes!...
Je dis à ma femme qui était à côté:
_ Tu ne peux pas l'empécher de fumer, non? Il va
brûler mes draps!...
Il s'en sert, quoi!... il n'y a pas de doute!
... Alors!... mes pantoufles!... mon pyjama!... ma radio!... mes cigarettes!...
et pourquoi pas ma femme pendant qu'il y est!...
(Il réalise soudain que ce n'est pas seulement de ses
affaires dont son copain abuse...)
(Il réalise aussi qu'il a dévoilé son infortune devant tout le monde,
et ce n'est plus qu'un pauvre homme qui joue la cinquième et dernière
phrase de l'étude de Sor... et qui sort.)
Raymond Devos.
En un éclair lady Slane sentit que le puzzle éclaté de ses souvenirs venait de se reconstituer, comme le font des notes de musique éparpillées qui prennent soudain forme et redeviennent cette mélodie familière que nous portons en nous. »
Vita Sackville-West (1892-1962), Toute passion abolie.
Je viens de fermer un roman merveilleux, histoire dune vieille dame indigne, "adossée à la mort pour contempler la vie", qui constitue sans aucun doute un des plus beaux portraits de personne âgée que jaie lu. Lintrigue est pourtant simplissime : le jour même de la mort de son mari Henry Holland, comte de Slane, lady Slane décide de vivre enfin sa vie. Elle a quatre vingt-huit ans et surprend son entourage en se retirant à Hampstead, dans une petite maison aperçue une seule fois, et aimée aussitôt, trente ans auparavant. Dans sa nouvelle demeure, toute passion abolie par l'âge et le choix du détachement - elle a pris soin de prévenir ses enfants: plus de visites familiales -, lady Slane se sent libre enfin de se souvenir et de rêver. Le reste dans le live pou ne pas déflorer votre plaisir.
Extrait.
« Soudain elle se souvint comment, avec Henry, lors d'une traversée du désert persan, leur voiture avait été escortée par une nuée de papillons blancs et jaunes qui dansaient parmi eux, à l'avant du convoi, puis autour d'eux, s'envolant parfois dans un vaste mouvement d'ensemble, revenant vers eux pour les entourer à nouveau, semblant prendre plaisir à exprimer leur frivolité par cette voltige harmonieuse autour du pesant chariot, mais incapables pourtant d'accorder leur vol à cette lenteur, et qui, pour apaiser leur impatience, repartaient en voletant très haut dans le ciel ou plongeaient entre les essieux, se glissant sous les voitures, s'en échappant avec grâce à l'instant même où, lourdement, les chevaux allaient poser leurs sabots; dessinant parfois de modestes taches d'ombre sur le sable, comme de petites ancres sombres, qui leur donnaient l'air d'être reliés soudain au sol par d'invisibles câbles, se laissant doucement entraîner avec la même légèreté capricieuse, semblant brusquement bercés par la progression monotone de la troupe qui, face au soleil, avançait de l'aube au crépuscule, comme une charrue qui creuserait son sillon tout droit vers la lumière, un unique et profond sillon qui semblait contourner le monde dans sa totalité - et elle se souvint alors avoir pensé que tout cela ressemblait à sa propre vie, que si Henry Holland était son soleil, le nuage de papillons représentait ses pensées les plus insolentes, ses rêves les plus fous, dansant dans la lumière sans jamais oser ni pouvoir ralentir la progression du convoi; ne touchant jamais le chariot de leurs ailes, voletant à perdre haleine, s'échappant, se lançant en avant, impertinents, envahissants, pour s'infiltrer à nouveau sous les essieux, illustrant toute une vie de liberté et de beauté, celle d'une bande de jeunes vagabonds insolents qui se contentaient d'effleurer la surface du désert et ses pesants chariots. Mais Henry qui commandait la mission se contentait de commenter: « C'est terrible, l'ophtalmie chez ces gens. Il faut faire quelque chose. » Et, sachant qu'il avait raison et que, dès leur arrivée, il en parlerait aux missionnaires, elle prenait soin d'oublier les papillons, et ne pensait plus qu'à son devoir. Dès qu'ils auraient atteint Yezd, Shiraz, ou une autre ville, elle établirait des programmes avec les épouses des missionnaires et s'occuperait de faire venir de l'acide borique d'Angleterre.
Mais par quelle étrange perversion, le vol léger des papillons était-il toujours demeuré le plus important? »
"Un optimiste est un pessimiste qui n'a pas toutes les informations"
Cioran
Incroyable Cioran, dont je croyais avoir tout lu et dont je découvre cette citation dans Le Monde2 de ce week end.
L'homme se défendait bec et ongles d'être déprimé, se bornant à rappeler que son pessimisme n'était qu'une vision réaliste du monde, lui procurant une certaine forme de bonheur dans la mesure où, n'en attendant rien, il ne pouvait jamais être déçu. De trop grandes attentes, ou des attentes irréalistes des gens et des choses, rendent à l'inverse parfois inutilement malheureux .
A méditer, malgré le cynisme apparent de cet auteur inclassable.
"Il faut changer de vie, il faut changer tout; mais tout changer n'est pas tout détruite; c'est sauver tout."
Maurice Bellet. La longue veille. DDB 2002
« Qui aimes-tu le mieux, homme énigmatique, dis? Ton père, ta mère, ta sur, ou ton frère? .
- Je n'ai ni père, ni mère, ni sur, ni frère.
- Tes amis?
- Vous vous servez là d'une parole dont le sens m'est resté jusqu'à ce jour inconnu.
- Ta patrie?
- J'ignore sous quelle latitude elle est située.
- La beauté?
- Je .l'aimerais volontiers déesse et immortelle.
- L'or?
- Je le hais comme vous haïssez Dieu.
- Eh! Qu'aimes-tu donc, extraordinaire étranger?
- J'aime les nuages... les nuages qui passent
là-bas... là-bas... les merveilleux nuages! »
CHARLES. BAUDELAIRE Poèmes en prose
« Luke Howard s'est aperçu qu'on peut ramener leurs modifications à trois grands types fondamentaux. Certains nuages en effet semblent surplomber tous les autres, et s'étirent comme des griffures de chats ou des crinières, en longues fibres parallèles ou divergentes, presque diaphanes; Howard les nomme des filaments: ce seront, en latin, les cirrus. D'autres nuages paraissent plus denses et se dressent sur leur base horizontale, en jouant avec les rayons du soleil, de toute leur masse, si monumentaux que Luke Howard les nomme des amas, soit, en latin toujours, les cumulus. Mais il arrive aussi et souvent en Angleterre que les nuées ne forment qu'une seule nappe immense et continue, qui parfois touche le sol et se nomme brouillard, masquant tout le bleu du ciel; cette couche informe mérite le nom de nuage étendu; d'où l'appellation de stratus. Pour compléter la série, Howard repère également le nimbus, ou nuage de pluie, dont il fait un type mixte, qu'il baptise aussi cumulo-cirro-stratus.
La conférence connaît un vif succès. On la publie aussitôt, sous un titre parfaitement ascétique: Sur la modification des nuages. C'est un mince fascicule, illustré de dessins de nuages au crayon, d'une facture maladroite, mais fort clairs. Il est un signe plus sûr encore de la réussite du jeune Howard: la communauté scientifique anglaise commence à utiliser sa terminologie. D'année en année la classification d'Howard, parfois amendée, jamais abandonnée, se répand à travers le monde; c'est encore elle que nous utilisons, sans savoir à qui nous la devons. Il en va ainsi, déclare pour finir Akira Kumo à Virginie Latour, de bien des inventions, et parmi les plus accomplies: leur auteur souvent s'efface derrière le bien qu'il a fait; à moins qu'il n'organise lui-même, et bruyamment, sa propre publicité, poussé par un associé."
La théorie des nuages . Stéphane Audeguy. Gallimard.
Je vous souhaite une bonne semaine
CV.
"La vie est une monture qu'il faut savoir abandonner quand le trajet est accompli."
Avicenne, repris par Françoise Giroud dans son dernier ouvrage "Demain, déjà", journal de deux années qui se termine le jour précédant la nuit de son décès accidentel.
"Mais alors dit Alice , si le monde n'a absolument aucun sens qui nous empêche d'en inventer un ? "
Lewis Caroll. Alice au Pays des Merveilles (dans le dernier ouvrage de Bernard Werber)
Je vous souhaite une bonne semaine
CV.
"Ô astre puissant! quel serait ton bonheur si tu n'avais pas ceux à qui tu donnes la lumière ?"
F. Nietszche. Ainsi parlait Zarathoustra
Cette adresse, majestueuse et effrontée à la fois au soleil, pourrait s'appliquer à bien d'autres puissants de ce monde. Elle correspond dans l'oeuvre de Nietszche à un véritable réveil de la conscience d'exister, associée à la nécessité d'assumer son sort et son existence sans plus en référer à quiconque. Il faut pour cela relire les lignes qui précèdent la célèbre apostrophe :
"Lorsque Zarathoustra atteignit la trentaine, il quitta la maison pour les montagnes où il passa dix ans à jouir de son âme et de la solitude, sans se lasser. Mais enfin son cur changea et, un matin, il se leva à l'aube et parla au soleil: Ô astre puissant! quel serait ton bonheur si tu n'avais pas ceux à qui tu donnes la lumière ?"
Sur ces toniques résolutions, je vous souhaite une bonne semaine
CV.
"Méfiez-vous de tous ceux en qui l'instinct de punir est puissant."
Friedrich Nietzsche. Ainsi parlait Zarathoustra
Je vous souhaite un bon dimanche
CV.
"Tant que mes patrons faisaient comme si je gagnais beaucoup
je faisais comme si je travaillais beaucoup."
"L'amour est un risque terrible car ce n'est pas seulement soi que l'on engage.
On engage la personne aimée, on engage aussi ceux qui nous aiment sans qu'on
les aime, et ceux qui l'aiment sans qu'elle les aime. "
E Morin. Amour, poésie, sagesse. Seuil
"Etre pauvre coûte cher."
Martin Hirsch
Entendu ce soir, de la bouche de Martin Hirsch. président dEmmaüs France, qui démontre que le décile le plus pauvre de la population française loue cher le mètre carré de sa chambre de bonne que le décile le plus riche ne le fera pour aucune de ses propriétés. Que le loyer de l'argent à des taux d'usurier pour boucler sa fin de mois dépasse tous les taux imaginables pour une population aisée. Que le budget nourriture est infiniment plus lourd chez les plus pauvres par manque d'infrastructure élémentaire pour cuisiner.
Cela résonne comme du Coluche : "Un crédit au long cours, cela se traduit par: moins tu as de fric , plus on t'en demande."
Je vous souhaite une bonne semaine
CV.
"- Alors? interrogea le géographe.
- Oh! chez moi, dit le petit prince, ce n'est pas très intéressant, c'est tout petit. J'ai trois volcans. Deux volcans en activité, et un volcan éteint. Mais on ne sait jamais.
- On ne sait jamais, dit le géographe.
- J'ai aussi une fleur.
- Nous ne notons pas les fleurs, dit le géographe.
- Pourquoi ça! c'est le plus joli!
- Parce que les fleurs sont éphémères. - Qu'est-ce que signifie: éphémère?
- Ça signifie « Qui est menacé de disparition prochaine. »
- Ma fleur est menacée de disparition prochaine ?
- Bien sûr.
- Ma fleur est éphémère, se dit le petit prince."
A de Saint-Exupéry . Le petit Prince.
Je vous souhaite une bonne semaine
CV.
Oh! le parfum
de l'herbe!
Pourquoi
lui demander des fleurs ?
Oh el perfume
de la hierba
Para qué
pedirle fores ?
A. Jodorowski . Piedras del amino.
Je vous souhaite une bonne semaine
CV.
"Chaque être que l'on ne connaît pas peut se révéler une exception à la règle."
Björn Larsson. La sagesse de la Mer
Petite règle simple de philosophie du quotidien qui nous aidera avant de poser un jugement peremptoire. Chaque individu est une île.
Comme le notait déjà Simone de Beauvoir dans "Tout compte fait": "Cette solitude qui nous est commune à tous et qui cependant nous rend étrangers les uns aux autres."
Du monde de la mer à la culture celtique, il n'y a qu'un pas, que j'ai franchi ce week end, découvrant la magie mystérieuse que dégage la musique celtique.
On connaissait Enya. J'ai découvert Runrig, Karen Matheson, Barzaz. On y retrouve en filigrane une foi en la vie au-delà d'une certaine mélancolie, quelque chose d'aérien.
Ecoutez Runrig chanter "Ill keep coming home","Sailing away", "Loch Lomond" ou réinterprétan l'inoubliable "Times they are a changing" de Dylan. Découvrez "mi le m 'uilinn" de Karen Matheson, ou encore "All ezvamm" de Barzaz.
Une fois par an, à Quimper, a lieu un festival interceltique de musique. Des centaines de milliers de gens font le déplacement pour entendre de la musique celtique traditionnelle, qu'elle soit écossaise, irlandaise, galloise ou bretonne.
L'édition de l'an 2000 a attiré un demi-million de personnes. Des milliers de musiciens s'y réunissent pour apprendre et s'inspirer les uns des autres. Il y a quelques années, le guitariste breton Dan Ar Braz a eu l'idée de réunir une centaine de musiciens celtes en activité et d'enregistrer un CD. Ce fut un succès sans précédent, avec des centaines de milliers d'exemplaires vendus, et Le Monde lui-même a évoqué le phénomène musical celtique en première page.
Est-ce dans la musique que se trouve aujourd'hui l'âme celte?
Je vous souhaite une bonne semaine
CV.
"Le regret est l'inverse du désir, un désir qui a seulement changé de sens."
Lavelle
"Il a l'air d'un vrai magicien. Mais ne croyez pas cela. Il a sûrement le crâne plein de bon sens. Quatre et quatre font huit. Et la laine pousse sur les moutons, pas sur les arbres. Quant à la mer du Nord, c'est de l'eau."
La vision de la mer peut être fort différente selon les points de vue. Celui exprimé ci-dessus est attribué à un gardien d'un port industriel d'Angleterre. Comme l'exprime Harry Martinson, "il n'est pas facile de capter le bonheur, quand on est entouré de gens qui ne sont que des êtres de raison bourrés de bon sens."
"Aucun doute, nous étions à nouveau au pays. Mais le bonheur du retour pour le marin, très fugitif, vous glisse fort vite entre les mains. Nous n'arrivons jamais à destination, de façon à voir le bonheur sous tous ses aspects, car il s'esquive, effrayé par cette diantre de chevauchée."
Harry Martinson, Kap Farväl.
"L'amour humain, la foi humaine sont toujours dangereux, car ils se brisent. Plus grand est l'amour, plus grande est la foi, et plus grand est le danger, plus grand le désastre. En effet, placer une foi absolue en un autre être humain est en soi un désastre pour les deux parties, car chaque être humain est un navire qui doit poursuivre sa propre route, même s'il navigue de conserve avec un autre. Deux navires peuvent naviguer de conserve jusqu'à l'autre bout du monde. Mais amarrez-les en couple au milieu de l'océan, et tâchez de les gouverner d'un seul gouvernail, et ils s'entrechoqueront l'un contre l'autre, et ils se mettront mutuellement en pièces. Il en va de même pour l'individu qui voudrait en aimer un autre d'un amour absolu, ou croire en lui d'une foi absolue. Les amants absolus s'entrechoquent à mort, de même que les croyants absolus. Depuis que l'homme cherche à aimer les femmes d'un amour absolu, et les femmes à aimer l'homme, l'espèce humaine a presque réussi à se saborder."
Human love, human trust are always perilous because they break down. The greater the love, the greater the trust, and the greater the peril, the greater the disaster. Because to place absolute trust in another human being is in itself a disaster, both ways, since each human being is a ship that must sail its own course, even if it goes in company with another ship. Two ships may sail together to the world's end. But lock them together in mid ocean and try to steer both with one rudder, and they will smash one another to bits. $0 it is when one individual seeks absolutely to love, or trust, another. Absolute lovers always smash one another, absolute trusters the same. $ince man has been trying absolutely to love women, and women to love man, the human species has almost wrecked itself.
D.H. Lawrence
Etonnant rapprochement que ce texte de DH Lawrence, auteur du sulfureux Amant de Lady Chatterley de l'Angleterre des années 20, dans lequel une belle anglaise tombe éperdûment en amour pour son garde-chasse, et la chanson de Mannick qui en reprend manifestement les principaux accents. Premier au hit-parade des chants de cérémonies de mariage, on imagine mal la lecture du texte de DH Lawrence en chaire, alors que l'essentiel du discours est strictement superposable.
Je connais des bateaux qui restent dans le port
De peur que les courants les entraînent trop fort,
Je connais des bateaux qui rouillent dans le port
A ne jamais risquer une voile au dehors.
Je connais des bateaux qui oublient de partir
Ils ont peur de la mer à force de vieillir,
Et les vagues, jamais, ne les ont séparés,
Leur voyage est fini avant de commencer.
Je connais des bateaux tellement enchaînés
Qu'ils en ont désappris comment se regarder,
Je connais des bateaux qui restent à clapoter
Pour être vraiment surs de ne pas se quitter.
Je connais des bateaux qui s'en vont deux par deux
Affronter le gros temps quand l'orage est sur eux,
Je connais des bateaux qui s'égratignent un peu
Sur les routes océanes où les mènent leurs jeux.
Je connais des bateaux qui n'ont jamais fini
De s'épouser encore chaque jour de leur vie,
Et qui ne craignent pas, parfois, de s'éloigner
L'un de l'autre un moment pour mieux se retrouver.
Je connais des bateaux qui reviennent au port
Labourés de partout mais plus graves et plus forts,
Je connais des bateaux étrangement pareils
Quand ils ont partagé des années de soleil.
Je connais des bateaux qui reviennent d'amour
Quand ils ont navigué jusqu'à leur dernier jour,
Sans jamais replier leurs ailes de géants
Parce qu'ils ont le cur à taille d'océan.
Mannick
"Notre idéal ne devrait pas être le calme plat
qui peut transformer la mer en marécage,
ni l'ouragan, mais le grand et puissant alizé,
plein de vie, de joie, de force et de santé,
balayant le monde de son souffle perpétuel."
Harry MARTINSON, Kap Farväl
repris en exergue du superbe livre de Björn Larsson "La Sagesse de la Mer".
Lequel décrit un mythique voyage en voilier le menant du Cap de la Colère (Cape Wrath) au Bout du monde (Finistère).
J'y ai appris que le Cap de la Colère relève d'une traduction littérale erronée de l'initial norrois Cape Hvaif signifiant "tournant, point où on fait demi-tour" et que le Finistère breton est bien cette pointe lancée dans la mer où "se finit la terre".
Beau programme pour chacun de nous, surtout ceux et celles du midlife, arrivés au point "où on fait demi-tour" pour mettre le cap sur "là où se finit la terre".
"Nombreuses fois
Nombre de fois
L' homme s'endort
Son corps l'éveille
Puis une fois
Rien qu'une fois
L'homme s'endort
Et perd son Corps.
René Char .
Chaque début d'années se déroule dans mon cabinet un étrange inventaire: la
descente dans les archives du sous-sol des fichiers de patients disparus durant
l'année écoulée.
Cette année fut particulièrement productive en ce domaine, laissant une moisson
de visages chers, souriants, attentifs, connus depuis parfois trente ans et
plus , et qui meurent ainsi une deuxième fois.
Qui peuplera l'année prochaine de sa silhouette cette curieuse descente vers
l'au-delà? Qui entamera la marche, qui la cloturera? Toute prévision s'avère
souvent bien hasardeuse car mois que quiconque le médecin ne connaît ni le jour
ni l'heure.
"Aussi ne faut-il pas trop y penser,
ni trop se réjouir ni trop s'attrister
car bonheur et malheur ne sont grands
que dans notre imaginaire."
Moïse Ibn Maïmoun , dit Maïmonide (1135-1204)