"Au cours d'une promenade en bateau, il y a plusieurs années, un ami qui avait l'habitude de plonger pour aller pêcher des poulpes remonta à bord les mains vides et l'air troublé : «Il y avait un poulpe dans un trou, nous dit-il, mais je n'ai pas eu le courage de le tuer : il me regardait avec de grands yeux épouvantés... »
Carlo Rovelli.
Le Guardian vient de publier une liste des dix livres les plus
importants sur la nature de la conscience. Surprise, le deuxième est un
livre sur les poulpes, Other Minds (Le Prince des profondeurs), de Peter
Godfrey-Smith. Qu'ont à voir les poulpes, ces sympathiques bestioles
marines, leur grosse tête et leurs nombreux bras, avec la conscience ?
Ces animaux sont capables d'ouvrir des bocaux, de s'échapper de leur
aquarium puis d'y retourner tout seuls en refermant le couvercle, de
reconnaître les membres du groupe de recherche et d'arroser ceux qui ne
leur sont pas sympathiques, ou encore de faire griller les ampoules d'un
jet d'eau bien placé lorsque la lumière les incommode... Dans la
nature, d'autres comportements complexes et flexibles ont été observés
signifiant une capacité de reconnaître et d'interpréter le agissements
de ceux qui les entourent. Les poulpes ont des capacités intellectuelles
tout à fait inhabituelles pour des créatures du monde marin,
comparables à celles des mammifère., sur certains aspects. Ils possèdent
un réseau neuronal extrêmement dense et complexe. Un poulpe peut avoir
autant de neurones qu'un enfant ou un chien.
Il reste le mystère de ces deux grands yeux épouvantés, capables de
retourner la conscience du prédateur jusqu'à interrompre son acte de
mort. Quel regard jette-t-il sur notre monde, et par effet miroir
saura-t-il nous transmettre son épouvante persuasive, allumant chez les
prédateurs du monde la conscience de ce qu'il ne convient pas de faire?
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