"Je pense souvent à cette femme reporter prise en otage à Bagdad, séquestrée six mois dans une cave où elle ne pouvait pas se tenir debout. Elle n'avait ni le droit de se lever, ni de parler. Ses geôliers l'appelaient par un numéro, deux fois par jour, pour qu'elle se rende aux toilettes. Le lendemain de sa libération, elle explique dans l'interview que sa détention fut supportable, et même qu'elle va bien. Le journaliste qui l'interroge manifeste son étonnement et elle émet l'hypothèse que c'est parce qu'elle n'a pas d'enfants. Si elle en avait eu, elle n'aurait pas pu vivre cet enfermement de la même manière. On peut tout supporter pour soi mais on ne peut pas supporter le mal que sa propre situation inflige aux autres. On peut se replier dans sa vie intérieure mais à la condition de n'avoir que soi comme souci. "
Charles Pépin.
Malade en fin de course, il envisage sa fin de vie avec une sérénité
qui force l'admiration, se renseigne sur les conditions d'une mort
choisie. Il quitte l'hôpital pour mourir à domicile, une semaine ou un
mois aux dires de la faculté. Malchance, son épouse chute quelques jours
plus tard, en garde des séquelles, n'assume plus guère les tâches
quotidiennes, quitte l'hôpital pour le rejoindre. Le statut de malade a
subitement changé d'épaules, il décomptait les jours et maintenant il
tente de dilater le temps qui lui est donné. "Que vais-je devenir?" a
fait place à "que va devenir mon épouse?", il était serein, maintenant
il souffre. "Les hommes ont oublié cette vérité, dit le renard. Mais tu
ne dois pas l'oublier. Tu deviens responsable pour toujours de ce que tu
as apprivoisé. Tu es responsable de ta rose."
Lu dans:
Charles Pépin. La joie. Gallimard 2014. Folio 6122. 186 pages. Extrait pp. 167,168
Antoine de Saint-Exupéry. Le Petit Prince. Gallimard. Folio Junior Poche. 2007. 120 pages.
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