"Je viens de me faire couper les cheveux, ma fille de sept ans trouve que ça ne se remarque pas car selon elle je n’ai rien coupé. Elle comprend soudain, me dit qu’en fait je n’ai pas coupé beaucoup pour ne pas gâcher, comme s’il s’agissait d’une denrée rare. (..) Je regarde dans le miroir ces cheveux que je perds progressivement, et finalement l’idée d’organiser une grande fête pour la fin de mes cheveux ne semble plus si adéquate. Parce qu’il y en a encore assez, et parce qu’il n’y a pas toujours un avant et un après mais un état entre les deux dans lequel je suis justement. "Charly Delwart
Un monde binaire. On adore ce qui commence et se termine par une frontière nette: y avait des cheveux, y a plus de cheveux, y avait le covid, y a plus de covid: avant - après, propre - sale, blanc - noir. Ce qui s'écoule dans une lente immobilité n'enthousiasme guère: étudier le droit pénal ou l'anatomie durant le blocus, attendre Godot, tenir une consultation de vaccination contre la grippe dans un pensionnat, patienter dans la file surchauffée du péage autoroutier de Cavaillon... Rien à voir avec les feux de la Saint Jean qui annoncent l'été, les feux d'artifice de la Saint Sylvestre, l'anniversaire de la Reine Elisabeth, le lancement du Costa Concordia: Yalla, on y va, demain sera bien.
Lu dans:
Charly Delwart. Databiographie. Flammarion. 2019. 352 pages. Extrait p. 143.
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