31 octobre 2009

Rire après ma mort

"C'est très beau un arbre dans un cimetière. On dirait un cercueil qui pousse."
Pierre Doris


L'humoriste est mort mardi. J'aimerais que ce que j'ai pu dire ou écrire fasse rire les jours après ma mort. Demain, nous irons au cimetière comme chaque année nous recueillir sur les tombes des proches et parents. Dans les allées, mon regard tombera sur les noms de patients décédés et je revivrai en un surprenant travelling arrière leurs chagrins, bonheurs et confidences. Leurs amours cachées et les infimes trahisons d'une existence: je n'ai guère connu ni de grands truands, ni de véritables Casanova, mais beaucoup de braves hères qui ont vécu de leur mieux avec les faibles moyens qui leur avaient été alloués à la naissance. Peu sont nés avec une cuiller en argent dans la bouche, peu sont mort riches. Mais ils m'auront rendu riches d'eux-mêmes, de leurs expériences. 
Je jetterai un regard neuf sur les arbres: tant de cercueils qui poussent, une vraie forêt.

Lu dans.
Pierre Doris a poussé son dernier râle.  Le Soir . 29 octobre 2009. p.34 

25 octobre 2009

Pensée de fin octobre

"This loneliness
returning like an old dog
to its favorite spot
I try to shrug its effect
while the rain continues on."

"Cette solitude
revient comme un vieux chien
à son coin favori
J'essaie d'en ignorer le sens
alors que la pluie continue à tomber."


Marjorie A. Buettner, 2002
Trad. Serge Tomé, Micheline Beaudry

24 octobre 2009

La femme est l'avenir de l'homme

"Si Lehman Brothers avait été Lehman Sisters, on n'en serait pas là aujourd'hui!"
Ngozi Okonjo-Iweala, directrice général de la Banque mondiale au Nigeria

 Les femmes dirigeantes réunies à Deauville du 15 au 17 octobre, à l'occasion du Women's forum, sont plus que jamais convaincues que leurs paroles, leurs visions du monde doivent être davantage entendues et prises en compte. Leur ambition est globale, visant le monde de l'entreprise certes, mais aussi l'éducation, la santé, les inégalités et la prise en compte du changement climatique. Dans les entreprises, la présence de femmes accroît les performances comme le révèle cette recherche menée par Michel Ferrary, professeur au Ceram (Ecole supérieure de commerce à Nice-Sophia Antipolis) qui prouve que les firmes qui emploient plus de 35 % de femmes, ou dont le taux d'encadrement est à plus de 35 % féminin, voient leur chiffre d'affaires progresser davantage que les autres. Que ces firmes sont aussi deux fois plus rentables, ont une meilleure productivité et créent davantage d'emplois. Une étude de la société Hedge Fund Research, basée à Chicago, montre aussi que, entre 2000 et 2009, les fonds financiers ayant une majorité de femmes parmi leurs gestionnaires, ont vu leur valeur augmenter nettement plus que la moyenne. Précurseur, Jean Ferrat ne chantait-il pas avec Aragon il y a une vingtaine d'années que la femme était l'avenir de l'homme. Message confidentiel car à part la vente de disques, il ne passa guère dans les émissions de télévision à l'époque, snobé par les médias commerciaux ou officiels en raison de son image de franc-tireur. Gageons que le Women's forum aura plus d'audience. 

Lu dans :
Les femmes dirigeantes veulent faire la révolution. Annie Kahn. Le Monde. 24 octobre  2009. kahn@lemonde.fr

La femme est l'avenir de l'homme

"Si Lehman Brothers avait été Lehman Sisters, on n'en serait pas là aujourd'hui !"
Ngozi Okonjo-Iweala, directrice général de la Banque mondiale au Nigeria

 Les femmes dirigeantes réunies à Deauville du 15 au 17 octobre, à l'occasion du Women's forum, sont plus que jamais convaincues que leurs paroles, leurs visions du monde doivent être davantage entendues et prises en compte. Leur ambition est globale, visant le monde de l'entreprise certes, mais aussi l'éducation, la santé, les inégalités et la prise en compte du changement climatique. Dans les entreprises, la présence de femmes accroît les performances comme le révèle cette recherche menée par Michel Ferrary, professeur au Ceram (Ecole supérieure de commerce à Nice-Sophia Antipolis) qui prouve que les firmes qui emploient plus de 35 % de femmes, ou dont le taux d'encadrement est à plus de 35 % féminin, voient leur chiffre d'affaires progresser davantage que les autres. Que ces firmes sont aussi deux fois plus rentables, ont une meilleure productivité et créent davantage d'emplois. Une étude de la société Hedge Fund Research, basée à Chicago, montre aussi que, entre 2000 et 2009, les fonds financiers ayant une majorité de femmes parmi leurs gestionnaires, ont vu leur valeur augmenter nettement plus que la moyenne. Précurseur, Jean Ferrat ne chantait-il pas avec Aragon il y a une vingtaine d'années que la femme était l'avenir de l'homme. Message confidentiel car à part la vente de disques, il ne passa guère dans les émissions de télévision à l'époque, snobé par les médias commerciaux ou officiels en raison de son image de franc-tireur. Gageons que le Women's forum aura plus d'audience. 

Lu dans :
Les femmes dirigeantes veulent faire la révolution. Annie Kahn. Le Monde. 24 octobre  2009. kahn@lemonde.fr

La femme est l'avenir de l'homme

"Si Lehman Brothers avait été Lehman Sisters, on n'en serait pas là aujourd'hui ! "
Ngozi Okonjo-Iweala, directrice général de la Banque mondiale au Nigeria

 Les femmes dirigeantes réunies à Deauville du 15 au 17 octobre, à l'occasion du Women's forum, sont plus que jamais convaincues que leurs paroles, leurs visions du monde doivent être davantage entendues et prises en compte. Leur ambition est globale, visant le monde de l'entreprise certes, mais aussi l'éducation, la santé, les inégalités et la prise en compte du changement climatique. Dans les entreprises, la présence de femmes accroît les performances comme le révèle cette recherche menée par Michel Ferrary, professeur au Ceram (Ecole supérieure de commerce à Nice-Sophia Antipolis) qui prouve que les firmes qui emploient plus de 35 % de femmes, ou dont le taux d'encadrement est à plus de 35 % féminin, voient leur chiffre d'affaires progresser davantage que les autres. Que ces firmes sont aussi deux fois plus rentables, ont une meilleure productivité et créent davantage d'emplois. Une étude de la société Hedge Fund Research, basée à Chicago, montre aussi que, entre 2000 et 2009, les fonds financiers ayant une majorité de femmes parmi leurs gestionnaires, ont vu leur valeur augmenter nettement plus que la moyenne. Précurseur, Jean Ferrat ne chantait-il pas avec Aragon il y a une vingtaine d'années que la femme était l'avenir de l'homme. Message confidentiel car à part la vente de disques, il ne passa guère dans les émissions de télévision à l'époque, snobé par les médias commerciaux ou officiels en raison de son image de franc-tireur. Gageons que le Women's forum aura plus d'audience. 

Lu dans :
Les femmes dirigeantes veulent faire la révolution. Annie Kahn. Le Monde. 24 octobre  2009. kahn@lemonde.fr

17 octobre 2009

Ne pas rendre la cure plus insupportable que la maladie

«Il faut employer les remèdes les plus aisés qu'il sera possible, autrement, il y a grand danger que leur accumulation et le dégoût qu'ils causeront, ne fassent mourir le malade avant qu'il en ait reçu aucun soulagement. Il faut remplir les indications par le moins de remèdes possibles et ne jamais rendre la cure plus insupportable que la maladie. »
John Quincy

Je souhaitais rencontrer ce collègue, et l'ai invité à déjeûner la semaine prochaine pour un échange informel. Je crois qu'on va bien s'entendre. Comme il vient de loin, j'espère qu'il passera sans encombre les traditionnels bouchons du carrefour de la Bastille (1789), de l'échangeur de Waterloo (1815), des tranchées de l'Yser (1918) et de la place de Dresde (1945). 

Lu dans :
Qyincy John, Pharmacopée universelle raisonnée, Paris, 1749, p514.
cité par Luc Perino, Une brève histoire du médicament. L'oeil neuf. 2009. 145 pages. extrait p.26 

16 octobre 2009

Le roi est nu

"C'est un peu comme dans le conte d'Andersen « Le roi est nu ». Un tailleur escroc avait fait croire à un roi autocrate qu'il était capable de lui tisser et de lui confectionner un habit sublime en fil tellement fin qu'il aurait l'illusion d'être vêtu d'un tissu invisible. Le monarque se laisse d'autant plus facilement convaincre que, bien qu'en réalité, il n'y ait pas plus de tissu que d'habit et qu'il soit totalement à poil, les courtisans s'extasient devant la magnificence de son costume. Et lorsqu'il sort, en majesté, dans la rue, ses sujets, terrifiés par la présence d'une police omniprésente, feignent d'admirer sa mise et ses atours. Jusqu'au moment où un enfant, forcément inconscient, s'écrie « Regarde maman, le roi il est tout nu ! ». Et, aussitôt, explosion d'hilarité libératrice."
JF Kahn

Je découvre ce délicieux conte dans une rubrique de Jean François Kahn ce matin. Je n'en connaissais que la dernière phrase du roi nu, mais apprécie sa délicieuse impertinence. Il faudra décidément relire ces ouvrages inactuels.


Lu dans 
Jean François Kahn. Affaire Mitterrand, lynchage disent-ils. Le Soir. Vendredi 16 octobre 2009. p.23

15 octobre 2009

Le goût de l'inactuel

"Mon goût pour l'inactuel (..) a revêtu l'importance d'un jeu. J'éprouve un plaisir grandissant à lire ces livres oubliés, ensommeillés sur des rayons sans visiteurs, abandonnés sans grande chance d'être redécouverts, ces revues qui parlent d'événements qui faisaient autrefois l'Actualité et que le temps a recouverts.  Je retrouve la forêt dense des livres telle que je m'y perdais entre neuf et vingt ans (..) , cet océan sans limites où des milliers de naufragés se noient, que nul ne songe à secourir. À quoi sert d'en ramener quelques dizaines sur la berge où la marée du temps viendra les rechercher? "
Pierre Hebey.


Soudain privé d'arrivage neuf en septembre, n'ayant trouvé le temps d'une demi-journée de flânerie chez mon libraire, je découvre coup sur coup quatre ouvrages ensommeillés sur les rayonnages de notre bibliothèque. Une réflexion sur l'inactuel, une biographie d'Etty Hillesum, un récit de médecin rescapé des camps de la mort, une biographie d'un journaliste juif allemand qui déserta son pays en 1933. Tous moments d'intense réflexion sur le sens d'une existence. Bien sûr la saison des prix littéraires me rendra l'impatience du neuf qui favorise les conversations de table, mais cette incursion dans nos caves à livres m'aura fait du bien. 
  
Lu dans
Pierre Hebey. Le goût de l'inactuel. NRF. Gallimard. 1998. 222 pages. Extrait p.40
Sylvie Germain. Etty Hillesum. Chemins d'éternité. Pygmalion. 1999. 212 pages.
Miklos Nyiszli. Médecin à Auschwitz. Julliard. 1961. 250 pages.
Sébastien Haffner , Histoire d'un Allemand, Babel, Actes Sud 2002, 425 pages.
 

14 octobre 2009

Quand serai-je moi ?

"S'il n'y avait qu'un seul instant de notre vie à emporter pour le grand voyage, lequel choisir? Au détriment de quoi et de qui? Et surtout, comment se reconnaître au milieu de tant d'ombres, de tant de spectres, de tant de titans?.. Qui sommes-nous au juste? Ce que nous avons été ou bien ce que nous aurions aimé être? Le tort que nous avons causé ou bien celui que nous avons subi? Les rendez-vous que nous avons ratés ou les rencontres fortuites qui ont dévié le cours de notre destin? Les coulisses qui nous ont préservés de la vanité ou bien les feux de la rampe qui nous ont servi de bûchers? Nous sommes tout cela en même temps, toute la vie qui a été la nôtre, avec ses hauts et ses bas, ses prouesses et ses vicissitudes; nous sommes aussi l'ensemble des fantômes qui nous hantent... nous sommes plusieurs personnages en un, si convaincants dans les différents rôles que nous avons assumés qu'il nous est impossible de savoir lequel nous avons été vraiment, lequel nous sommes devenus, lequel nous survivra.".
Yasmina Khadra

 
Je referme, ému, la dernière page du beau roman de Khadra, superbe fresque dans l'Algérie brûlante de la guerre d'indépendance. Ce matin, j'ai accompagné à sa dernière demeure un collègue et ami médecin généraliste, devenu patient. Ma première visite de courtoisie comme futur médecin de famille en 75 avait été pour lui, et le récit de son quotidien, renouvelant chaque soir à 22 heures le contenu de sa trousse  pour le lendemain, en espérant ne pas être réveillé de nuit, m'avait terrifié. A la fin de son existence, il s'interrogeait sur la cause d'une fatigue permanente qui ne le lâchait plus. Moi je me souvenais, et le lui ai mainte fois remis en mémoire. Le beau passage de Khadra se surimprime dans ma mémoire ce soir sur cette vie qui se termine, et dont le déroulement tranquille dans notre faubourg anderlechtois annonçait la mienne. Et pose la question sans réponse:  de quel  instantané de notre existence fera-t-on la photo officielle qui nous survivra? 

 
Lu dans:
Ce que le jour doit à la nuit. Yasmina Khadra. Julliard. 2008. 415 pages. Extrait p.406 

10 octobre 2009

Réflexion sur la fauvette de Spencer

"L'information ne veut rien dire quand elle se situe hors d'un système interne de pensées et de réflexions qui leur sert de contexte."
D. Tammet.

«Tu vois cet oiseau? C'est une fauvette de Spencer. Bien, en italien, c'est un chutto Lapittida. En portugais, on l'appelle born da peida. En chinois, Chung-Iong-tah, et en japonais Katano Takeda. Tu peux apprendre le nom de cet oiseau dans toutes les langues du monde, mais quand tu auras fini, tu ne connaîtras absolument rien de lui. Tu sauras seulement des choses sur les humains qui vivent dans différentes régions du monde et sur le nom qu'ils donnent à l'oiseau. C'est pourquoi nous allons bien regarder cet oiseau et voir son comportement - c'est cela qui compte."

Richard Feynman, citant son père

   
Lu dans:
Daniel Tammet. Embrasser le ciel immense. Les Arènes. 2009. 332 pages. extrait p.262

Une réflexion pour un Nobel

"L'esprit pense avec les idées, non avec les informations."
Theodore Roszak  
"Les idées définissent l'information, lui donnent sens et la génèrent. Les idées les plus fondamentales, comme celles des Pères fondateurs des États-Unis ("Tous les hommes sont égaux"), ne contiennent pas d'information. Elles sont le résultat d'une sensibilité humaine innée qui nous permet, à travers le brouillard des informations, de reconnaître et de synthétiser des schémas de pensée transcendants. Notre vision personnelle du monde nous aide ensuite à remettre l'information en perspective, en lui donnant intuitivement une place dans notre esprit, comme un livre dans une bibliothèque." (D. Tammet) 

Serait-ce cette capacité de donner un sens que le comité Nobel de la Paix a voulu saluer en nominant Barak Obama hier à Oslo?

Lu dans :
Théodore Roszak. The Cult of Information: A Neo-Luddite Treatise on High-Tech, Artificial Intelligence, and the True Art of Thinking. 267 pages,
April 1994, The Unoversity of California Press.
Daniel Tammet. Embrasser le ciel immense. Les Arènes. 2009. 332 pages. extrait p.262
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08 octobre 2009

Les portes du corps

"Si les yeux sont les fenêtres de l'âme, les lèvres sont les portes du corps". 
B Deprez


Des lèvres pour mordre dans la vie à pleines dents, passionnément. Comment ne pas évoquer "Une gourmandise" de Muriel Barbery (NRF Gallimard, 2000) et cette délicieuse description du "gourmet qui embrasse le monde sur la bouche" (auteur non retrouvé, cité de mémoire). Dans la description qu'en fait Bérengère Deprez, qui signe ici son dernier ouvrage dans la droite ligne de "Kilomètre 7" (Luce Wilquin 2006) , la gourmandise est d'un autre ordre mais la phrase garde toute sa saveur. Beau roman de passage, à l'instar de cette émouvante description de la bascule du jour dans la nuit d'Angelos Sikelianos, qui donne son titre au livre:  "A l'heure où je t'attends, la grecque, l'hirondelle, la nuit vient retourner le sablier du jour." 


Lu dans
Bérengère Deprez. Le sablier du jour. Ed. Luce Wilquin 2009, 165 pages, extrait p. 30.

06 octobre 2009

Si je ne suis pas moi, qui donc le sera ?

"Vous n'êtes pas responsables de ce que les autres aimeraient que vous fassiez. Je ne suis pas responsable de ne pas être celui qu'ils voudraient que je sois: c'est leur erreur, pas la mienne."
Richard Feinman


La phrase est issue de "What Do You Care What Other People Think ?" (litt. Qu'est-ce que ça peut vous faire ce que les autres pensent ?). Richard Feynman (Prix Nobel de  physique 1965) fut avant tout un esprit libre qui se permettait de passer de la physique théorique au déchiffrage de hiéroglyphes mayas et au forçage de coffres-forts. Amateur de plaisanteries, il trouva la combinaison d'une serrure en essayant les numéros qu'un physicien utiliserait (il s'agissait de 27-18-28, les premiers chiffres de la valeur de e = 2,71828, la plus connue et la plus exploitée des fonctions exponentielles…), et il trouva que trois bureaux de la base top-secrète de Los Alamos qui contenaient des notes sur les recherches sur la bombe avaient la même combinaison. Il laissa une série de notes malfaisantes en guise de farce, ce qui provoqua l'inquiétude de son collègue à propos de la présence d'un éventuel espion ou saboteur qui aurait eu accès à des documents secrets concernant la bombe atomique. 

05 octobre 2009

Le temps nous égare , le temps nous étreint

"Le temps nous égare / Le temps nous étreint
Le temps nous est gare / Le temps nous est train."
Jacques Prévert


Une belle réflexion sur la nature du temps m'a permis d'entamer ma journée sur un mode réflexif. Le physicien français Etienne Klein nous en fournit quelques clés en préambule de la conférence qu'il donne à l'ULB ce mardi soir. La physique newtonienne a séparé le temps et l'espace, mesurant le premier avec une règle, le deuxième avec une montre, et considère que ces deux référentiels sont identiques pour tous les observateurs. La théorie de la relativité les relie. Nous voilà immergés dans l'espace-temps. Vous êtes assis dans votre salon. Imaginons qu'un observateur traverse la pièce à très, très grande vitesse disons une vitesse proche de celle de la lumière; il verrait sous forme d'espace une partie de ce que vous voyez sous forme de temps; et vice versa. (..) Peut-on dès voyager dans le temps? Oui, en théorie, si l'on pouvait voyager aussi vite que la lumière. Au retour de notre voyage, ceux que nous avons quittés seraient bien plus âgés, ou morts depuis longtemps. Mais nous serions restés prisonniers de notre temps; nous ne pouvons voyager que dans le futur des autres. Le temps est une prison à roulettes ...
 
Lu dans:
Dominique Berns. Etienne Klein: le temps est une prison à roulettes. Le Soir. Forum. lundi 5 octobre 2009. p. 12
Cultures d'Europe. Mardi 6 octobre, 20 h. , auditoire Paul Janson, av. Franklin Roosevelt 48, 1050 Bruxelles. tél. 02.650.23.03

Marek Edelman, mort d’un héros éternel

Nous le croyions immortel ! Et il l’est… sans doute. Il ne sera pas oublié. Il était l’une des rares autorités morales absolues en Pologne. Il savait, disaient ses amis, comment vivre et comment mourir. Il n’a jamais accepté de se taire, n’a jamais plié à la conjoncture : il était, quelles que furent les circonstances et même à l’égard de ses proches amis, un procureur sans appel contre l’injustice, l’indifférence, la passivité, et contre la peur quand il fallait défendre l’homme et sa mémoire. 

Il fut un grand Juif et un grand Polonais. Pourquoi  était-il est resté en Pologne, malgré le souvenir de l’Holocauste, malgré les pogroms de l’après-guerre et la campagne antisémite de 1968 qui ont poussé tant de Juifs polonais à l’exode ? Edelman, dernier commandant de l’insurrection du ghetto de Varsovie, répondait :  « C’est ici qu’est enterré mon peuple. Je suis resté car je suis le gardien des tombes juives. » 

Il y aura d’innombrables gardiens de la tombe de Marek Edelman, mort vendredi dernier, à 90 ans. Il fait partie de l’histoire des Juifs, des Polonais et de l’humanité tout entière. Né à Homl, une ville maintenant située au Belarus, dans une famille de Juifs engagés dans le Bund, le parti socialiste juif, Edelman fut, dès l’enfance, imprégné de l’idéologie de mouvement ouvrier. 

Quand il était tout petit sa famille s’était installée à Varsovie. « C’est ma ville. C’est ici que j’ai appris le polonais, le yiddish et l’allemand. C’est ici, qu’à l’école, j’ai appris qu’il fallait toujours prendre soin des autres. C’est aussi ici que j’ai pris, pour la première fois, un coup dans la figure seulement parce que j’étais juif », avait dit Edelman quand il fut fait citoyen d’honneur de Varsovie en 2001. 

Quand éclata la Seconde Guerre mondiale, il se retrouva, avec près d’un demi-million de Juifs, confiné par les Allemands dans le ghetto de Varsovie. Créé le 12 avril 1942, entouré d’un mur de 3 mètres de haut et de barbelés sur 18 km, le ghetto généra des conditions de vie très vite insupportables. Maladie et mort y devinrent banales. Entre le 22 juillet et le 12 septembre, 300.000 Juifs furent arrêtés et envoyés à Treblinka, camp de la mort. Il ne resta plus qu’environ 70.000 personnes dans le ghetto, destinées à une seconde vague de déportations. Elles devaient commencer le 18 janvier 1943. Mais cette fois les Juifs les plus jeunes et les plus vaillants qui restaient dans le ghetto, n’ayant plus rien à perdre, osèrent résister. Pour l’honneur. Ils disposaient de quelques armes livrées par la résistance polonaise. Le 19 avril 1943, les nazis pénétrèrent en force dans le ghetto et l’encerclèrent. 

« On savait parfaitement qu’on ne pouvait en aucun cas gagner. Face à 220 garçons mal armés, il y avait une armée puissante », expliquait Edelman, fondateur de l’Organisation juive de combat. Mais, ajouta-t-il, « l’humanité a décidé que la mort armes aux mains est plus belle que sans armes. Nous avons respecté cette consigne ». Ils transformèrent les caves en bunkers et malgré l’inégalité des forces, l’insurrection allait durer trois longues semaines. Lorsque Mordechaï Anielewicz, 24 ans, le commandant de l’insurrection, pris au piège, se suicida, c’est Edelman qui reprit le commandement. Pour venir à bout de l’insurrection, les Allemands brûlèrent tout le ghetto, maison par maison. Ce fut la fin. Certains combattants, dont Edelman, purent s’enfuir par les égouts. Mi-mai 1943, le général Jünger Stroop qui commandait les opérations annonça à Hitler : « Le quartier juif de Varsovie n’existe plus ! » 

Ayant échappé aux lance-flammes, Edelman réussit à exister. Il rejoignit la résistance polonaise, participa en 1944 à l’insurrection de Varsovie, qui  coûta la vie à 200.000 Varsoviens. Après la guerre, il fit des études de médecine et devint un cardiologue célèbre. Il s’engagea du côté de l’opposition anticommuniste, puis dans Solidarité et il fut interné sous la loi martiale du général Jaruzelski. A la chute du communisme en 1989, il fut élu sénateur. Il restera dans la mémoire juive et polonaise comme le symbole du combat contre le racisme et l’antisémitisme, contre le cynisme, le mensonge. L’enfer qu’il vécut et qui l’avait marqué à jamais, lui avait donné la force d’être « un homme qui a eu le courage de la vérité », référence suprême dans ce qui fait la dignité de l’homme. 

Lu dans :
Pol Mathil. Marek Edelman, mort d’un héros éternel Journaliste. Le Soir. Lundi 05 octobre 2009. 

04 octobre 2009

Si nous partions en promenade

"Qu'y a-t-il de plus beau qu'un oiseau libre qui vole vers le soleil ?"
J. Van Hamme


A l'arrêt sur 10 bandes de circulation (?) dans les deux sens, le Ring de Bruxelles se morfond à hauteur de Grimbergen ce mardi matin. Tache lumineuse sur un versant herbeux qui surplombe la route, fine silhouette découpée dans le soleil, un héron fait la pause en observant ce spectacle insolite. Immobile pour immobiles, gracieux, le bel oiseau "au long bec emmanché d’un long cou" décrit par Jean de la Fontaine paraît fasciné par tant d'impuissance concentrée, escargots collés au sol en attente d'un sort meilleur.  Et soudain s'envole de deux battements d'ailes en direction de la mer. "Si nous partions en promenade, et il s'envolent. C'étaient des oiseaux?" écrivit joliment Félix Leclerc. La phrase m'est revenue, et m'a fait rêver. 

Lu dans
Jean Van Hamme , Grzegorz Rosinski. Thorgal - L'île des mers gelées.   Thorgal. Tome 2. 2000. Ed. Le Lombard, 50 pages

Notre histoire à tous

"Ah, et puis: je préfère ce qui me rapproche des autres hommes à ce qui ce qui m'en distingue. Cela aussi est nouveau."
E. Carrère

 
Un précédent ouvrage (L'adversaire) m'a fait découvrir Emmanuel Carrère. Je l'ai retrouvé la semaine passée dans son dernier roman "D'autres vies que la mienne." Une longue traversée d'une transformation intérieure par la confrontation au deuil de ses proches. Qui débouche sur une certaine forme de lumière, après des longueurs - mais qui n'en a? 


Lu dans:
Emmanuel Carrère. D'autres vies que la mienne. P.O.L. 2009. 310 p. Extrait p.308

02 octobre 2009

Se fier aux haies et aux fossés

"Nous évoluions parmi eux avec l'insouciance de promeneurs qui, dans un zoo moderne dont on a supprimé les cages, vont et viennent parmi les fauves en se fiant aux haies et aux fosssés. Les fauves, de leur côté, devaient éprouver un sentiment correspondant: pour désigner l'ordre invisible qui leur assignait des limites tout en les laissant en liberté."
S. Haffner
Il y a six ou sept ans , un collègue luxembourgeois hébergé une nuit chez nous m'offrit un petit livre que je lui promis de découvrir rapidement, et rangeai. Les affaires urgentes prirent le dessus et je l'ai lu... la semaine passée. Ce livre modeste, écrit par un Allemand qui quitta son pays en 1933 devant la montée des périls, offre une explication subtile de la prise de pouvoir par les voies les plus légales du national-socialisme en Allemagne dans les années trente. De petites merveilles dorment paisiblement dans les rayonnages de nos bibliothèques.

 
Lu dans
Sébastien Haffner , Histoire d'un Allemand, Babel, Actes Sud 2002, 425 p. , extrait p.128

01 octobre 2009

S'élancer

«Pour aller de l'avant, il faut prendre du recul
Car prendre du recul, c'est prendre de l'élan.»

MC Solaar