«Nous partageons ce besoin pressant de créer, et un désir urgent de rendre nos vies plus intenses.
Courir vite pour ne pas voir le temps s’enfuir.»,
Kethévane Davrichewy
Il me partage qu'il n'en peut plus de brasser le vide, et qu'il sent
pointer l'énorme envie de faire une folie. Au rang des bonnes nouvelles,
il apprend que l'éclaircie sera pour juin. Cela fait long quand on est
seul dans sa bulle, son petit appart, sa petite auto, son petit boulot,
sa petite ville. Et qu'on a eu trente ans la semaine passée, fêtés seul
car où se cachent les quelques amis de bistrot quand il n'y a plus de
bistrot? Il s'attarde à la fenêtre, avec des rêves de coquillages et de
goélands, de vastes tablées où coule la bière et s'échangent les vannes
bien grasses. S'accommoder d'une existence où rien ne se passe
serait-il un art de vieux, comme le décrit bien Delerm: "En nous
quittant, vers quatre heures, M. Brouard a dit : Faut que j'sort' les poubelles.
le n'ai pu m'empêcher de penser qu'il était aussi pauvre de son temps
libre que j'avais été riche du mien. L'âge y est pour beaucoup, je
crois. Pour les plus anciens, le temps libre devient souvent dilution
des tâches, étirement à l'infini de ce qu'il y a de moins intéressant.
L'importance donnée aux contraintes matérielles et insignifiantes
serait-elle le meilleur baume pour calmer les inquiétudes?"
Je lui avais souhaité bon anniversaire par téléphone, c'est peu de
choses. Il m'envoie une carte de vœux, annotée sur l'enveloppe d'un
merci avec une fleur naïve. Qui donc inventa ce concept de bulle, dont
la meilleure définition que je pus retrouver est "un nombre représentant
la nullité, un ensemble vide."
Kethévane Davrichewy. Un chanteur. Fayard. 2020. 300 pages.
Philippe Delerm. Journal d'un homme heureux. SEUIL. 2016. 272 pages. Extrait page 29
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire