"Que deviennent les maisons quand nous les avons quittées? Que deviennent les lieux que nous avons abandonnés ? Où réside leur esprit désormais absenté? Est-ce qu'ils attendent notre retour, comme des animaux domestiques que nous aurions laissés pour les vacances? Qu'est-ce qui reste après notre départ? Y a-t-il quelque chose même qui reste de notre passage, de notre vie passée en ces lieux, de cette longue fréquentation familière ? Et quoi ?"
Jean-Marc Besse
Si l'endroit quitté reste un moment inhabité, demeure la poussière. Elle a un
pouvoir spécifique dans l'expérience que nous faisons du
temps dans l'espace habité et possède ce statut paradoxal à
la fois de cacher et de révéler les objets qu'elle recouvre, comme habillés d'une épaisseur
de temps passé. La poussière est "comme une matière de l'absence". En déplaçant
les objets posés contre les murs (caisses, échelle), on en retrouve les
traces, espaces nus, dépouillés, pellicule de vie en négatif, révélant l'empreinte sur les murs de tout ce qui est passé par là, les ombres des
choses que ces lieux ont abritées. Le temps des lieux que nous avons
habités (et qui nous habitent toujours), et que recouvre maintenant la
poussière, est le temps de la mémoire, le temps de la survivance. (G.
Didi-Hunerman)
Lu dans:
Jean-Marc Besse. Habiter un monde à mon image. Flammarion. 2013. 254 pages. Extrait p.124, 125, 127
Georges Didi-Huberman. Génie du non-lieu. Air, poussière, empreinte, hantise. Minuit. 2001. 144 pages. Extrait p. 55.
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