04 octobre 2023

Ces lieux qui nous apprivoisent

 "Passé les premières heures dans un lieu inconnu, les objets, la fenêtre, le choix de la peinture deviennent familiers. Qu'est-ce, alors, ce mouvement des choses qui se rapprochent, avec lesquelles progressivement se dessinent l'accointance puis la franche sympathie, peut-être au bout d'une nuit l'appartenance. Me voilà à deux doigts de trouver merveilleux la peinture, les crochets du rideau, les craquements de l'armoire, la fissure au plafond. Et, par retour, d'appartenir aux lieux : des murs, en faire partie, faire partie des murs, être aussi meuble que la chaise ou la lampe qui me voient d'un bon œil — miroir — puis ne me voient plus, tellement je suis fondu dedans."

                                Étienne Faure




Apprivoise-moi. Une heure avant d'arriver, on imagine fiévreusement le gîte ou la chambre d'hôtel réservée. Quand on en franchit le seuil, on la soupèse d'un regard mi- séduit, mi- déçu. Deux heures plus tard, tous bagages bien rangés, l'apéro et sa suite nous font tutoyer les lieux. Après deux jours, on y reçoit en propriétaires les amis et familiers, bienvenue chez nous. Au bout de deux semaines, on quitte l'endroit avec un sentiment d'arrachement. On reviendra, c'est sûr, et peut-être pas si la peur d'être déçus lors de la deuxième fois l'emporte.



Lu dans:
Étienne Faure. Et puis prendre l'air. Collection Blanche. Gallimard. 2020. 136 pages. Extrait p.89


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