15 février 2023

Ciel, il court

 "Le problème majeur [de la vidéosurveillance] tient au nombre pharaonique de flux vidéo comparé aux faibles effectifs d'agents censés les exploiter. Si on prend un lieu comme la gare Part-Dieu à Lyon, avec un réseau de six cents caméras, vous ne pouvez pas avoir les yeux partout. Que fait-on de ces six cents flux? Option 1, rien. Option 2, on utilise des mécanismes d'automatisation qui permettent par exemple d'afficher à l'écran dès qu'un individu court. (..) La puissance des algorithmes aide surtout dans la détection d' événements, un cas d'usage préconfiguré et prêt à l'emploi, par exemple l'événement "maraudage", ou la détection de "présence prolongée" dans une zone préalablement limitée. Sélectionnez l'objet "individu", indiquez une temporalité "cinq minutes", puis cliquez sur "valider". Idéal pour rapidement identifier des vendeurs a sauvette, troisième infraction la plus verbalisée à Paris, ou les mendiants faisant la manche dans des zones marchandes." 

                            Thomas Jusquiane



Sans être parano ni hostile à la surveillance policière, on s'interroge sur le modèle de surveillance généralisée prôné par une industrie de la télésécurité de plus en plus influente auprès de l'administration. Il existait un délit de sale gueule, dénoncé avec raison, le voila élargi au "délit de course à pied", de "présence prolongée", de "maraudage" (relevons avec humour qu'un maraudeur est aussi un humanitaire qui effectue des maraudes dans les rues des grandes villes pour venir en aide aux SDF), de "vente à la sauvette" et de "mendicité en faisant la manche".   C'est ChatGPT derrière la caméra, et devant elle peut-être moi.


Lu dans:
Thomas Jusquiane. Les cuisines de la surveillance automatisée. Le Monde diplomatique. Février 2023. Extrait page 21.

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