"Car, celui-là, que vous voyez là et qui est mon patron, et qui n'a pas de champs, celui-là, mes braves gens, moissonne sans avoir besoin ni de soleil, ni de faux. Mais, vous savez ce qu'il moissonne et avec quoi il fait son pain? Il fait son pain avec son bonheur. Il n'a jamais été aussi heureux que depuis qu'il a son grand troupeau dans sa grande herbe..."
Jean Giono
Faire son pain avec son bonheur? Il est mille sorte de pains. Il
aimait les belles voitures, et aimait les conduire. La retraite venue,
on le poussa à acquérir une petite cylindrée. Il acheta une Citroën CX
Prestige gris métallisé à toit ouvrant avec laquelle il bat la campagne
jour après jour. Chaque matin, il se fait chien rapporteur des bagages
qui se sont trompés d'avion, les rapportant à leur propriétaire dans les
contrées les plus diverses. Chaque aube s'ouvre sur un voyage
improvisé, pour lequel il est rémunéré au kilomètre: plus il roule, plus
il gagne, une véritable martingale gagnante. Les paysages qui défilent
sont ses plus beaux films, les musiques qu'il écoute ses plus beaux
concerts. Il a convaincu sa femme de l'accompagner, et chaque midi les
meilleures auberges se font accueillantes. C'est en quelque sorte mieux
que des vacances, car elles n'ont pas de fin. Le bonheur est nomade et
la retraite son royaume.
Lu dans:
Jean Giono. Que ma joie demeure. Grasset 1935. Le Livre de Poche 493-494. 504 p.
Jean Giono. Que ma joie demeure. Grasset 1935. Le Livre de Poche 493-494. 504 p.
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