"Je ne sais pas pourquoi
Cette mélodie me fait penser à Chopin
Je l'aime bien, Chopin
Je jouais bien Chopin
Chez moi à Varsovie."
Bécaud. Le pianiste de Varsovie.
Moment de grâce. Je termine mes écritures aux Jardins de la
mémoire, quand me parviennent quelques notes de Chopin. Dans sa chambre,
une résidente nonagénaire dont la mémoire s'est perdue joue. Son piano
est le seul compagnon rescapé de sa vie antérieure, et il me semble
qu'elle lui confie le récit de son existence, et ce qu'elle en espère
encore. Ses compagnes d'étage sont en ergothérapie, rêvassent assises en
cercle ou écoutent de vieilles chansons des années 50, elle joue
Chopin et Varsovie. Je reste un moment, intrigué par ces doigts qui
courent sur le clavier, agiles, et la mémoire intacte de ces notes
venues de l'origine de sa vie. Et si, vieillissant, l'essentiel n'était
pas ce qu'on perd mais ce qu'on conserve, qui sans doute représente le
meilleur de nous-même? Soudain elle découvre ma présence, sourit, sort
une partition jaunie et entame "Couleur Tendresse" de Richard
Clayderman. On ne saurait mieux résumer ma matinée.
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