"Mais quand la science ferait par effet ce qu'ils disent, d'émousser et rabattre l'aigreur des infortunes qui nous suivent, que fait-elle que ce que fait beaucoup plus purement l'ignorance? "
Montaigne
Soucieux d'être bien compris, Michel de Montaigne complète son récit par le philosophe Pyrrhon, affrontant une mer déchaînée, qui donnait en exemple à ses compagnons d'infortune un pourceau qui voyageait avec eux, regardant cette tempête sans effroi.
"L'enseignement ne donne que l'instruction; la vie donne la connaissance. L'instruction a au moins cet avantage d'être de la connaissance généralisée, sublimée, et pouvant contenir, sous un petit volume, une grande quantité de notions; mais dans la plupart des esprits, cette nourriture trop condensée reste neutre et ne fermente pas. Ce que l'on appelle la culture générale n'est le plus souvent qu'un ensemble d'acquisitions mnémoniques, purement abstraites et dont l'intelligence est incapable de faire la projection sur le plan de la réalité. Sans une imagination très vivante et active dans tous les sens, les notions confiées à la mémoire se dessèchent dans un sol inerte; l'eau qui les amollit et le soleil qui les mûrit sont nécessaires à la germination des graines. Il vaut mieux ignorer que de savoir mal, ou peu."
Lu dans :
Michel de Montaigne. Essais. Volume 8. Livre 2. Chapitre XII. p.67.
Diogène Laërce. Vie de Pyrrhon. Livre IV. Segment 69
Remy de Gourmont. Le Chemin de velours "La valeur de l'instruction », Paris. Editions du Sandre. 2008. p. 65