31 janvier 2008

L'effroi devant le gouffre

"Paix, paix
Ne criez pas
elle n'est pas morte
elle n'est pas endormie
elle s'est seulement réveillée
des rêves de la vie "
Shelley

Traduction libre des célèbres vers de Percy Bysshe Shelley écrits à la mort de John Keats qu'il admirait et qui comme lui mourut en pleine jeunesse. Il fut l’un des plus grands poètes romantiques britanniques, mais sa vie hors des conventions sociales, son idéalisme farouche et sa voix passionnée le rendirent célèbre et... détesté. Deux ou trois générations de poètes plus tard, il devint une idole, Son nom ne vous rappelle rien d'autre? La femme qu’il épousa en secondes noces, la romancière Mary Shelley, rédigea Frankenstein.
"Peace, peace.
He is not dead,
he doth not sleep
He hath awakened
from the dream of life"

Ces vers superbes calment-ils l'angoisse et le désarroi quand des êtres chers nous quittent avant l'âge. La vue du gouffre, du Néant (ou de l'Eternel c'est selon) un instant entrevu dans la course quotidienne de nos existences, peut remplir d'effroi les plus aguerris et les plus sages. Que la mort sait être moche. Ciao Marie-Dominique, après coup, trop tard comme souvent, on se dit qu'on aurait aimé mieux te connaître, mais nous pensions que nous avions le temps devant nous.

lu dans : Percy Bysshe Shelley. Adonais: An Elegy on the Death of John
Keats. (343-44), stanza 39

30 janvier 2008

Marche doucement

"Marche doucement, car tu marches sur mes rêves."
Yeats

Sortant d'une fin de nuit agitée, une phrase programme pour commencer sa journée, empruntée à William Butler Yeats, poète irlandais (1865 - 1939) et instigateur du renouveau de la littérature irlandaise. Du romantique à la culture celtique, il finit son existence influencé par Ezra Pound et le nationalisme irlandais, évoluant vers un style moderne sans concession. D'où vient la phrase ? D'un poème nommé « He wishes for the clothes of heaven » que l'on pourrait traduire assez librement par par "Lui qui aurait voulu pouvoir offrir le ciel."

Si je pouvais t'offrir le bleu secret du ciel
Brodé de lumière d'or et de reflets d'argents
Le mystérieux secret, le secret éternel
De la nuit et du jour, de la vie et du temps

Avec tout mon amour je le mettrais à tes pieds
Mais tu sais je suis pauvre et je n'ai que mes rêves
Alors c'est de mes rêves qu'il faut te contenter
Marche doucement, car tu marches sur mes rêves

lu dans Henry Bauchau. Le boulevard périphérique. Actes Sud. 2008. Phrase placée en exergue du roman.

28 janvier 2008

Le vent de la mode

"Être dans le vent : une vocation de feuille morte."
Attribué à Gustave Thibon, mais aussi fréquemment à Milan Kundera.

Moins douteuse, de Gustave Thibon:
"La feuille morte voltige d'un lieu à l'autre,
mais tous les lieux se valent pour elle,
car son unique patrie est dans le vent qui l'emporte."

et pourquoi pas y ajouter
"Nùmme d'tote fisch schwimme met'm strom."
Seuls les poissons morts nagent avec le courant.
Proverbe alsacien.

Lu dans : L'équilibre et l'harmonie, Gustave Thibon, p.14, Fayard, 1976

27 janvier 2008

Le berger et le paysan

"Plus tard, beaucoup plus tard, chacun se découvre étrangement nomade ou sédentaire, amateur de flux, de transports, de déplacements, ou passionné de statisme, d'immobilisme et de racines. Les premiers aiment la route, longue et interminable, sinueuse et zigzagante, les seconds jouissent du terrier, sombre et profond, humide et mystérieux."
Michel Onfray.

Une belle méditation sur ce qui nous met en route, sur notre double appartenance: berger ou paysan. Aux valeurs de l'ordre, du travail, du territoire, s'oppose l'instinct du nomade, qui ignore l'horloge et fonctionne au soleil ou aux étoiles, s'instruit des constellations et de la course de l'astre dans le ciel, n'a pas de montre mais un oeil d'animal exercé à distinguer les aubes, les aurores, les orages, les éclaircies, les crépuscules, les éclipses, les comètes, les scintillements stellaires. Du berger qui sait lire la matière des nuages et déchiffrer leurs promesses, interprète les vents et connaît leurs habitudes. Qui sommes-nous, et qui rêvons-nous d'être?

Lu dans Théorie du voyage. Poétique de la géographie. Michel Onfray. Le Livre de Poche, 2006

De senectute

"De tous les événements inattendus,
le plus inattendu de tous est la vieillesse."

Trotsky.


lu dans : Angoisse et Certitude. Maurice Schumann. Flammarion 1978. p.8.

23 janvier 2008

Du velours à la retraite

Son père affirmait volontiers: « Quand je serai à la retraite, je mettrai un pantalon en velours. » Cette tenue lui paraissait celle du loisir et de la liberté, par contraste avec le costume trois pièces que lui imposait sa profession. Il est mort avant d'avoir mis son pantalon en velours."

Colette Nys-Mazure

Je vous souhaite une bonne semaine
CV.

Lu dans : L'Age de vivre. Colette Nys-Mazure. DDB. 2007. p.21.

Consulter la lumière

Me voici dans l'atelier d'un peintre ami dont je suis le travail depuis des années. Il me montre ses derniers tableaux en observant; «Je deviens de plus en plus sombre, je m'en rends compte. Regarde ce que ma femme m'a écrit. Sur une feuille ordinaire, au marqueur noir, d'une belle écriture balancée, elle a inscrit: Tu deviens de plus en plus sombre, tu devrais consulter la lumière."
Colette Nys-Mazure

Lu dans : L'Age de vivre. Colette Nys-Mazure. DDB. 2007. p.18.
Photo CVW, exposition Cocons de lumière. Dimiri Pariméros. Les Brigittines. janvier 2008.


20 janvier 2008

Le pays de notre langue














« Avant d'habiter un pays, on habite une langue et plus on possède de mots pour y définir sa place, plus on a de chances d'y occuper tout son espace. »
Jean-Claude Germain
né à Montréal le 18 juin 1939, scénariste, écrivain, auteur, journaliste, parolier et historien québécois


lu dans Cité dans « Norme et médias », Terminogramme, numéro 97-98, printemps 2001, p. 133.

18 janvier 2008

Des mots et des idées















"L'idée sans le mot serait une abstraction;
le mot sans l'idée serait un bruit;
leur jonction est leur vie."

Victor Hugo


Sagesse de l'amitié

" Un ami, c'est quelqu'un dont le bonheur suffit au vôtre ".

Yvan Audouard

Ecrivain - journaliste - réalisateur (D'où viens-tu Johny ?) né à Saigon en 1914, mort en 2004 dont je retiens aussi le très juste : "Ce ne sont pas les mécontents qui prendront le pouvoir mais ceux qui auront su tourner le mécontentement à leur profit".

Je vous souhaite une bonne semaine

CV.

13 janvier 2008

La culture est la vie

"La culture , c'est l'ensemble des formes qui ont été plus fortes que la
mort."

André Malraux.



Lu dans: Revue des Brigittines. Mai Juin Juillet 2007.

12 janvier 2008

Le meilleur des mondes

"Renoncer au meilleur des mondes, n'est pas renoncer à un monde
meilleur."
E. Morin.

Phrase longtemps reprise sur la carte d'adhérent du Parti démocrate italien (né de la refondation du Parti communiste) , lui-même exclu du PCF en 1948.

10 janvier 2008

Les ponts sur le vide


"Entre proche et lointain
Jette du vide."

Francois Cheng . Vide et plein

Vide et plein

"Se vider de tout ce dont est plein, se remplir de tout ce dont on est vide".
Saint Augustin.

08 janvier 2008

Horizon

"Va lentement
Ne te hâte pas
Chaque pas t'amène au meilleur instant de la vie"

L ' instant présent . Thich Nhat Hanh .

05 janvier 2008

De l'avoir plein les armoires

"Oh la la la vie en rose
Le rose qu'on nous propose
D'avoir les quantités de choses
Qui donnent envie d'autre chose
Aïe, on nous fait croire
Que le bonheur c'est d'avoir
De l'avoir plein nos armoires."

A Souchon . Foule sentimentale

Merci à Paul de m'avoir fait découvrir ce court texte à l'occasion d'un échange d'impression sur les soldes annuelles.

01 janvier 2008

Le moment du passage


"Essaie de voir naître le moment où se fait le passage
Pour cela les oiseaux t'aideront car eux ils savent."

Guillevic. Possibles futurs. (*)

C'est l'histoire d'un village, mécontent de son entrée, qui décide d'inviter un sculpteur. Cet homme connu et apprécié observe longuement le paysage, inspecte les alentours, se promène dans les ruelles, écoute chanter la rivière et accueille les premières hirondelles. Quelques matins plus tard il se fait livrer un énorme bloc de pierre. Le lendemain, tous les habitants du village sont là, admiratifs pour le voir manier ses outils, après une semaine ils ne sont déjà plus que quelques badauds et quinze jours après ils ne sont plus personne à le regarder travailler. Personne sauf un enfant qui l'observe en silence. Lorsque après plusieurs mois de travail et de patience l'oeuvre est inaugurée, un magnifique cheval trône à l'entrée du village. L'enfant l'observe , et rompt enfin son silence : "Dis monsieur, quand tu as vu le gros bloc de pierre, comment savais-tu qu'il y avait un cheval dedans? " (*)

Belle allégorie pour l'an neuf inauguré ce matin. Il cache un cheval, et bien d'autres choses qui nous sont propres à chacun. Rude tâche que d'en découvrir les contours en les créant patiemment jour après jour. Rien ne préexiste, les pages à écrire sont vierges, à l'encre sympathique. L'avenir n'est ni préécrit ni redondant, comme on aime parfois nous le faire croire. Je vous souhaite un beau cheval.

CV.

(*) Citation et conte repris au superbe livre de mes amis Cécile Bolly et Michel Vanhalewyn (avec Véronique Greandjean et Serge Vidal, que je ne connais guère) "L'éthique en chemin", Weyrich Edition, 2004, 264p. Le conte a été un tantinet réécrit pour se mouler au modèle de ces billets Entre café et journal (une page écran): Cécile me le pardonnera j'en suis sûr.