03 septembre 2009

"Et puisque, désormais libre, je ne veux plus rien posséder, désormais tout m'appartient et ma richesse intérieure est immense. "
Etty Hillesum
Le livre reposait paisiblement dans la bibliothèque, depuis presque dix ans. Je savais qu'un jour je le dévorerais, c'est arrivé. Simplement il fallait que je sois prêt à l'entendre. Des événements survenus il y a 60 ans sont d'une actualité surprenante. L'histoire d'une jeune Juive hollandaise, Etty Hillesum, née le 15 janvier 1914 à Middelbourg, en Zélande, aux Pays-Bas et décédée le 30 novembre 1943 au camp de concentration d’Auschwitz en Pologne, est restée d'une rare actualité: la banalité du mal, la liberté intérieure et les liens qui unissent le bourreau et la victime ne connaissent ni époque ni pays.  Alors que nos journaux reprennent la genèse de la seconde guerre mondiale et que la télévision égrène les six épisodes d'Apocalypse, il n'est pas anodin de lire la description clinique des transports de déportés juifs hollandais vers Auschwitz. 
 
"En juin (42) Eichmann a passé un accord avec les chemins de fer du Reich pour assurer le «transfert» vers l'Est de milliers de familles ratissées à travers l'Europe. Un contingent de 40 000 Juifs est fixé pour la Hollande à court terme; ce chiffre sera largement multiplié par la suite. La Reichsbahn (la société des chemins de fer allemands) coopère sans le moindre état d'âme: elle consent à des tarifs de groupe (ceux réservés aux excursions) pour les adultes; les enfants de moins de dix ans bénéficient du demi-tarif et ceux de moins de quatre ans de la gratuité. Mais tous n'ont droit qu'à un « aller simple », sans distinction d'âge. Le ticket retour n'est octroyé qu'aux gardes, lesquels ont souvent les mêmes trajets à effectuer pour convoyer une cargaison sans cesse renouvelée. « Maintenant, précise Raul Hilberg, si les wagons étaient souillés ou endommagés -ce qui n'était pas rare - à cause des longs trajets et parce que 5 à 10 % des prisonniers mouraient en route, un supplément était facturé pour les dégâts. » Quant  au coût de ces transports, il était couvert par l'argent tiré des biens confisqués aux Juifs; le système fonctionne à circuit fermé, de manière impeccable. "

Lu dans:
Raul Hilberg, in Shoah de Claude Lanzmann, Gallimard, coll. Folio, pp 201-202
Etty Hillesum, Une vie bouleversée, coll. Points, Paris, 1995, p. 23
Sylvie Germain. Etty Hillesum. Chemins d'éternité. Pygmalion. 1999. 212 p. extrait page 47

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