"Un repas, il n’est pas nécessaire que ce soit toujours délicieux, mais il faut que ce soit mémorable. Il faut déranger, sinon on ne se rappelle pas ce qu’on a mangé. Quand on fait dans notre manufacture un sorbet aux herbes fraîches ou de la glace à l’huile d’olive, en utilisant des olives séchées de Sicile, maturées, on va dans la caricature du goût, mais c’est volontaire."
Alain Ducasse
La gastronomie serait-elle le dernier des voyages capables de
surprendre, et de laisser des souvenirs? Louveteaux, nous fûmes
gratifiés un soir d'un plat étrange, baptisé par l'intendance
"Banane de Mowgli". Prenez une banane, coupez-la en deux dans le
sens de sa longueur et fourrez-la de moutarde. Entourez le tout
d'une tranche de jambon blanc, savourez. Je me souviens encore du
recul provoqué par l'annonce du plat, de la surprise des papilles
et des images qui m'en restent cinquante ans plus tard: c'était tout simplement délicieux. Et quand
me revient la saveur conjuguée d'un crottin de Chavignol trempé
dans un Sancerre frais, partagé avec la famille en roulotte dans
le Val-de-Loire, ce ne sont ni le lait de chèvre ni le raisin qui
dominent mais l’inoubliable rencontre d'un terroir, d'un
savoir-faire, du bonheur d'être ensemble et de la conscience aiguë
de la non-reproductibilité d'un moment unique dans notre
existence.
Lu dans:
Alain Ducassse. J'ai besoin de toucher, de sentir, de manger à cru. Propos recueillis par Leo Pajon. Le Monde 24 septembre 2021. page 29
Alain Ducassse. J'ai besoin de toucher, de sentir, de manger à cru. Propos recueillis par Leo Pajon. Le Monde 24 septembre 2021. page 29
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