"Sauf complication, il va mourir."
Jules Renard
30 octobre 2014
Le bonheur de l'ombre
"Donne-moi tes imperfections
je m'en contente.
Ne me montre pas la lumière
j'ai soif de ton ombre"
A. Jodorowsky
Un jour j'ai découvert que le monde, ma ville, mes proches, moi-même étions imparfaits.. et que ce serait toujours ainsi. L'accepter devient un bonheur.
Lu dans :
Pierres du Chemin. Alejandro Jodorowski. Le Veilleur & Maelström. 2004. 140 pages. Extrait pp.29,33.
29 octobre 2014
27 octobre 2014
Automne d'or
"C’est l’heure exquise et matinale
Que rougit un soleil soudain.
A travers la brume automnale
Tombent les feuilles du jardin.
Leur chute est lente. On peut les suivre
Du regard en reconnaissant
Le chêne à sa feuille de cuivre,
L’érable à sa feuille de sang.
Les dernières, les plus rouillées,
Tombent des branches dépouillées ;
Mais ce n’est pas l’hiver encore.
Une blonde lumière arrose
La nature, et, dans l’air tout rose,
On croirait qu’il neige de l’or."
F. Coppée.
Une visite à une patiente en revalidation à Inkendaal
(Vlezenbeek, anciennement de Bijtjes, Les petites Abeilles) me
gratifie d'un superbe paysage or et pourpre sublimé par un soleil d'automne. La
luminosité ambiante, l'élégance de la vaste terrasse se
prolongeant vers un lac de cygnes, les sculptures de bronze
patiné, la majesté des arbres centenaires m'évoquent confusément une
ambiance similaire récemment vécue sans que je puisse la nommer. Soudain elle s'impose: Cheverny,
sur la Loire, qui inspira Hergé pour dessiner le chateau de
Moulinsart, paisible et mordoré dans son habit d'octobre. Nous y étions la semaine passée. Qu'une
patiente modeste, âgée et handicapée puisse bénéficier des meilleurs
soins dans un cadre pareil me confirme - si besoin en était - que
j'aime mon siècle et ma région.
Lu dans :
François COPPÉE (1842-1908) Le Cahier rouge. Matin d'octobre.
L'aigle
"Personnage mi-aérien mi-terrien,
il survit aux rêves de sa jeunesse.
L’aigle est devenu cheval de labour
sous les métamorphoses de l’âge."
Marcel Lobet. L’Abécédaire du meunier
A tous les chevaux de labour méconnus je souhaite un bon passage à l'heure d'hiver.
Lu dans
Marcel Lobet. Icare Laboureur. Journal 1962-1986. ACADÉMIE ROYALE DE LANGUE ET DE LITTÉRATURE FRANÇAISES DE BELGIQUE. 2007. 252 pages.
26 octobre 2014
LOVE in math
"En mathématiques, est-ce qu'on peut dire «Je t'aime» ?
Pris au dépourvu, Ray hésita, mais fut contraint d'admettre qu'en maths, on ne pouvait pas dire «Je t'aime».
- Je n'ai pas dit que l'on pouvait tout dire, mais on peut exprimer beaucoup d'idées: être entre, être de part et d'autre, être le plus grand, le plus petit, être proche, engendrer, recouvrir, se rencontrer ... Son assurance retrouvée, il déclara: - Les mathématiques sont un langage, elles ne sont pas que cela, bien sûr. Un langage qui permet d'exprimer des pensées, d'énoncer des idées, d'établir des propositions, de poser des questions, d'affirmer, de réfuter, de décrire. Et ce n'est pas un langage secret, parce que les règles d'écriture qui le régissent sont publiques, tout un chacun peut en prendre connaissance."
Denis Guedj
Où on découvre avec surprise que sur cette Terre, tout est communication, même les formules a première vue les plus absconses.
Lu dans:
Denis Guedj. Les mathématiques expliquées à ma fille. Seuil. 2008. 165 pages . Extrait p 14.
25 octobre 2014
Haiku
« Un vieux chien va d’un pas lent
fidèle à côté de son vieux maître.
Vieillir ensemble. »
Herman Van Rompuy
Un bel article en guise de conclusion au mandat d'Herman Van Rompuy, personnage rare à maturation lente. Son vieux chien est mort il y a peu, l'aurait-on deviné, mais l'haiku dépasse l'anecdote canine.
Lire
23 octobre 2014
Refrain d'automne
"C'est la saison des noix, des pommes, des noisettes,
du dernier chant du coq, des arbres en saumure.
(..) Le pinot se dégrise en pourriture noble,
le marron caracole au gré d'un coup de pied.
La brume du matin devine un escalier
et l'ombre d'un clochard y pose son vignoble."
F. Félix
Lu dans :
Francis Félix. Le chariot du jour. Refrain d'automne. 2001. 52 pages. extrait p. 11
21 octobre 2014
Le goût du large
"Créer le navire , ce n'est point tisser les toiles, forger les clous, lire les astres, mais bien donner le goût de la mer. "
Saint Exupéry
Lu dans:
Jean-Philippe Ravoux. Donner un sens à l'existence (au départ d'une lecture du Petit Prince). Laffont. 2008. 200 pages. Extrait page 50
citant Saint-Exupéry, Citadelle, chapitre LXXV,Gallimard, coll. Folio. 2000
20 octobre 2014
Occasions perdues
"Dans notre esprit, il y a une petite pièce dans laquelle nous stockons le souvenir de toutes ces occasions perdues"
Haruki Murakami
Bertrand Piccard (souvenez-vous, le premier tour du monde en ballon en
1999 à bord du Breitling Orbiter 3, et premier tour du monde espéré en
2015 (?) grâce à Solar Impulse, le planeur solaire) est aussi
psychiatre et nous livre dans un dernier livre "quelques solutions pour
mieux vivre sa vie. "Ce qui est aussi intéressant, c’est de voir toutes
les crises de la
vie qu’on n’utilise pas. La plupart de ces crises sont des
situations de déséquilibre où on peut apprendre à trouver un
meilleur équilibre qu’avant. D’habitude, on nous apprend à nous
plaindre de la crise en regardant en arrière et en disant: c’est
épouvantable ce qu’il nous est arrivé, on ne le mérite pas. Et c’est
vrai que, parfois, on ne le mérite pas. Mais ce n’est pas comme ça
qu’on va améliorer quoi que ce soit. Ce qui est important, c’est de
voir quel est l’outil, la ressource ou la compétence qu’on doit
développer à l’occasion d’une crise pour procéder mieux après
qu’avant."
Lu dans:
Bertrand Piccard. Changer d'Altitude : Quelques solutions pour mieux vivre sa vie. Stock. 2014. 300 pages.
14 octobre 2014
Sagesse de Kazantzakis
"Je me souvins d'un matin où j'avais découvert un cocon dans l'écorce d'un arbre, au moment où le papillon brisait l'enveloppe et se préparait à sortir. J'attendis un long moment, mais il tardait beaucoup, et moi j'étais pressé. Énervé je me penchai et me mis à le réchauffer de mon haleine. Je le réchauffais, impatient, et le miracle commença à se derouler devant moi, à un rythme plus rapide que nature. L'enveloppe s'ouvrit, le papillon sortit en se traînant, et je n'oublierai jamais l'horreur que j'éprouvai alors: ses ailes n'étaient pas encore écloses et de tout son petit corps tremblant il s'efforçait de les déplier. Penché au-dessus de lui, je l'aidais de mon haleine. En vain. Une patiente maturation était nécessaire et le déroulement des ailes devait se faire lentement au soleil, maintenant il était trop tard. Mon souffle avait contraint le papillon à se montrer, tout froissé, avant terme. Il s'agita, désespéré, et, quelques secondes après, mourut dans la paume de ma main."Lu dans:
Nikos Kazantzakis
Nikos Kazantzakis. Alexis Zorba. trad. Yvonne Gauthier. Plon. 1954
Que sont devenus nos rêves?
"Nous avions des rêves immenses
dont je n'arrive malheureusement plus à me souvenir."
La parole d'un rescapé des camps de la mort, dernière image du beau
documentaire de La Trois ce soir, me hante. Elle prolonge les
réflexions douces-amères d'amis chers réagissant avec pertinence au
calamiteux extrait autocensuré de Modiano sur "le malheur berrichon,
le pathétique poitevin, le désespoir picard", certains soirs on est
mieux inspiré que d'autres ! Sommes-nous encore capables de rêves
immenses, qu'un désespoir immense put susciter?
Vu dans:
Les combattants de l'ombre 5. 1943/1944- La Résistance dans la tourmente. Documentaire. Réal. Bernard George. La Trois, 13 octobre
12 octobre 2014
Une relecture de Modiano
Au mois de juin 1942, un officier allemand s'avance vers un jeune homme et lui dit: "Pardon, monsieur, où se trouve la place de l'Etoile?". Le jeune homme désigne le côté gauche de sa poitrine."
Histoire juive
Placé en exergue du premier roman (La Place de l'étoile) de Patrick
Modiano, récent prix Nobel de littérature, ce trait d'humour juif n'a
pas connu le sort d'autres extraits du livre. Paru en 1968, la version
aujourd'hui proposée en librairie a en effet été discrètement rabotée
par son auteur, qui au fil de rééditions successives, en a fait
disparaître des paragraphes entiers qui auraient pu être perçus comme homophobes ou antisionistes. Bien évidemment, cette autocensure nous en dit bien plus
long sur notre époque elle-même que sur Modiano.
Lu dans :
Patrick Modiano. La place de l'Étoile. Collection Blanche, Gallimard. 1968. Édition originale préfacée par Jean Cau. Nouvelle édition revue et corrigée en 1985.
Jérôme Dupuis. Les huit secrets de Patrick Modiano. L'Express Culture. 5 janvier 2011, mis à jour le 9 octobre 2014.
10 octobre 2014
Prière simple
"Tracez-moi la route, droite comme une raie au milieu. Préservez-moi de la maréchaussée et du corps médical. Ainsi soit-il."
Jean-Marie Alfroy
J'aime les prières courtes, surtout celles qui ne demandent pas l'impossible, et ne font pas appel à trop de surnaturel. Celle-ci en est une que je vous recopie avec gourmandise.
Lu dans :
Jean-Marie Alfroy. La fugue du père. NRF Gallimard. 1984. 180 pages. Extrait page 60
09 octobre 2014
Sagesse de Woody Allen
"Mon cerveau?
C'est mon second
organe préféré."
Woody Allen
Qu'en peu de mots l'humoriste explique tant de situations et comportements étranges.
08 octobre 2014
L'eau qui mouille
"L'eau de chez nous n'a ni le vert des mers
ni l'argent des torrents
ni le blanc des cimes
ni le bleu de l'azur
Elle est grise à tous les étages."
Francis Félix
La pluie, le retour. Après quatre semaines d'un automne qui nous a
réconciliés avec la rentrée, à nouveau la recherche du parapluie, du
chapeau et de la veste imperméable à chaque mise en route. Comme l'écrit
joliment Francis Félix, cette eau qui "se déguise en glace pour
flotter, en neige pour se parachuter, en vapeur pour remonter et qui
lorsqu'elle reste eau coule et ... mouille."
Lu dans :
Francis Félix. Le chariot du jour. Francis Félix éditeur. 2001. 57 pages. Extrait p.51
07 octobre 2014
Moleskine
"Moleskine. Le luxe est plus abordable lorsque l'on aime écrire que lorsque l'on aime conduire."
C. Bénech.
Lu dans:
Clément Bénech. Humoétique (blog). https://www.facebook.com/pages/Humoétique/193246624059404
05 octobre 2014
Croiser l'inattendu
"Au sortir d'un bois de chênes envahi par le buis et le lierre (..) paraît, au creux d'une combe, un champ d'avoine: alors, de nouveau, un saisissement, un émerveillement, une joie, pourquoi? Je pense à la rencontre d'Emmaüs. (..) Ce ne doit pas être seulement une question de couleur, ou la lumière du pain sur la table. Plutôt: ce qui vient d'ailleurs, ce qui revient, avec une lumière particulière, un peu pâle, du monde des morts. Ce qui a traversé un écran et tout de même nous parle."
Philippe Jaccottet
Le récent extrait de Bobin réveille les mémoires, me valant l'un
ou l'autre message émouvant évoquant la mort d'une mère, parfois
fort lointaine dans le temps. Evocation souvent sensible, "qui
revient avec une lumière particulière, un peu pâle" comme le
décrit bien Philippe Jaccottet: une trouée soudaine et inattendue
dans le quotidien, pas nécessairement sombre mais prégnante. Le
souvenir d'une personne chère disparue est parfois plus présent
que bien des vivants.
Lu dans :
Philippe Jaccottet. La seconde semaison. Carnets 1980-1994. NRF Gallimard. 1996 233p. Extrait page 14.
"Etre vieux est un avantage qui arrive un peu tard."
Inoubliable Jacqueline Bir dans un rôle taillé sur mesure au théâtre Le Public proposant "Conversations avec ma mère". On sourit, et le lendemain on s'interroge.
Lu dans:
Conversations avec ma mère, film de Santiago Carlos Ovés et Jordi Galcerán. Adaptation théâtrale de Jordi Galceran. Au théâtre Le Public. Mise en scène Pietro Pizzuti. Avec Jacqueline Bir et Alain Leempoel.
04 octobre 2014
La piqûre
"Le jour de l'enterrement de sa mère, C. a été piquée par une abeille. Il y avait beaucoup de monde dans la cour de la maison familiale. J'ai vu C. dans l'infini de ses quatre ans, être d'abord surprise par la douleur de la piqûre puis, juste avant de pleurer, chercher avidement des yeux, parmi tous ceux qui étaient là, celle qui la consolait depuis toujours, et arrêter brutalement cette recherche, ayant soudain tout compris de l'absence et de la mort. Cette scène, qui n'a duré que quelques secondes, est la plus poignante que j'aie jamais vue. Il y a une heure où, pour chacun de nous, la connaissance inconsolable entre dans notre âme et la déchire. C'est dans la lumière de cette heure-là, qu'elle soit déjà venue ou non, que nous devrions tous nous parler, nous aimer et même le plus possible rire ensemble."
Christian Bobin. Ressusciter
Lu dans :
Christian Bobin. Ressusciter. Gallimard. NRF. 2001.
02 octobre 2014
Nevermore
"Pétrifié par sa propre audace pour aborder la belle anglaise entr'aperçue entre deux cours, il lui bégaie une demande de rendez-vous. Son anglais trébuche, son français le rattrape. Elle sourit, condescendante, et l'éconduit gentiment: "Never, never". Et lui, ivre de bonheur: "Neuf heures, neuf heures et quart, parfait !"
L'apprentissage des langues passe par quelques désillusions amusantes. Qui n'a connu cela?"
Lu dans :
Dans le Kent et dans le temps. La noble bouffarde (blog).
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