02 mars 2008

Sagesse d'Etty Hillesum

« Et puisque, désormais libre, je ne veux plus rien posséder, désormais tout m'appartient et ma richesse intérieure est immense. »
Etty Hillesum
Phrase lourde de sens, qui clôt le récit d’une vie brutalement interrompue à Auschwitz le 30 novembre 1943. Figure devenue emblématique comme le fut Anne Frank, juive hollandaise comme elle, Etty Hillesum, (1914-1943) aura vécu l’espace de deux guerres mondiales. Emprisonnée à plusieurs reprises, eElle tient son journal intime (1941-1942) et écrit des lettres (1942-1943) depuis le camp de transit de Westerbork. Grande figure de la spiritualité contemporaine, cette jeune femme âgée de 27 ans en 1941, au début de son Journal, vivait à Amsterdam, où elle a obtenu une maîtrise de droit en 1939. Elle commença alors des études de russe, que la guerre et l'occupation vont bientôt interrompre. Elle relate la spirale inexorable des restrictions des droits et des persécutions qui amènent en masse les juifs néerlandais vers les camps de transit, puis vers la mort en déportation. Comme le résume sa biographe Sylvie Germain, sa vie ne fut que dilemme: comment échapper à la double tentation de la désespérance et de la haine vengeresse ?

« Bon, on veut notre extermination complète... et en même temps, j'ai une certitude: je trouve la vie belle, digne d'être vécue, et pleine de sens... La vie et la mort, la souffrance et la joie, les ampoules des pieds meurtriS, le jasmin derrière la maison, les persécutions, les atrocités sans nombre, tout, tout est en moi et forme un ensemble puissant, je l'accepte comme une totalité indivisible et je commence à comprendre de mieux en mieux pour mon propre usage, sans pouvoir encore l'expliquer à d'autres la logique de cette totalité. Je voudrais vivre longtemps pour être un jour en mesure de l'expliquer, mais si cela ne m'est pas donné, eh bien, un autre le fera à ma place, un autre reprendra le fil de ma vie là où il sera rompu. »

«L'absence de haine n'implique pas nécessairement l'absence d'une élémentaire indignation morale. Je sais que ceux qui haïssent ont pour cela de bonnes raisons. Mais pourquoi devrions-nous choisir toujours la voie la plus facile, la plus rebattue? Au camp, j'ai senti de tout mon être que le moindre atome de haine ajouté à ce monde le rend plus inhospitalier encore»

Lu dans :
  1. Etty Hillesum. Une vie bouleversée. Editions du Seuil 1985 et 1988, p. 166
  2. Sylvie Germain. Etty Hillesum. Editions Pygmalion Gérard Watelet, 1999. Collection Chemins d’éternité. p.82
  3. La quête du sens. Une vie menacée, une vie créative. Marie de Hennezeel. Editions Albin Michel. Espaces Libres. 2004. p.130

Aucun commentaire: