09 janvier 2021

Seul dans sa bulle

 

«Nous partageons ce besoin pressant de créer, et un désir urgent de rendre nos vies plus intenses.
Courir vite pour ne pas voir le temps s’enfuir.»,
                Kethévane Davrichewy



Il me partage qu'il n'en peut plus de brasser le vide, et qu'il sent pointer l'énorme envie de faire une folie. Au rang des bonnes nouvelles, il apprend que l'éclaircie sera pour juin. Cela fait long quand on est seul dans sa bulle, son petit appart, sa petite auto, son petit boulot, sa petite ville. Et qu'on a eu trente ans la semaine passée, fêtés seul car où se cachent les quelques amis de bistrot quand il n'y a plus de bistrot? Il s'attarde à la fenêtre, avec des rêves de  coquillages et de goélands, de vastes tablées où coule la bière et s'échangent les vannes bien grasses. S'accommoder d'une existence où rien ne se passe serait-il un art de vieux, comme le décrit bien Delerm: "En nous quittant, vers quatre heures, M. Brouard a dit : Faut que j'sort' les poubelles. le n'ai pu m'empêcher de penser qu'il était aussi pauvre de son temps libre que j'avais été riche du mien. L'âge y est pour beaucoup, je crois. Pour les plus anciens, le temps libre devient souvent dilution des tâches, étirement à l'infini de ce qu'il y a de moins intéressant. L'importance donnée aux contraintes matérielles et insignifiantes serait-elle le meilleur baume pour calmer les inquiétudes?"

Je lui avais souhaité bon anniversaire par téléphone, c'est peu de choses. Il m'envoie une carte de vœux, annotée sur l'enveloppe d'un merci avec une fleur naïve.  Qui donc inventa ce concept de bulle, dont la meilleure définition que je pus retrouver est "un nombre représentant la nullité, un ensemble vide."


Lu dans:
Kethévane Davrichewy. Un chanteur. Fayard. 2020. 300 pages.
Philippe Delerm. Journal d'un homme heureux. SEUIL. 2016. 272 pages. Extrait page 29

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