06 mai 2020

Comme un mur, comme des hublots




"J’ai tracé à la craie des cercles sur le mur d’en face. Ils sont vides et noirs, mais ne le resteront pas. Ce sont de grands hublots ouverts sur un monde à naître encore.
Bientôt, dans chacune de ces fenêtres rondes va s’encadrer un visage."
                                    Jean Ray


Jour 44. Aujourd'hui tadam tadam, arrivée du plexi. Aussi large que le bureau, aussi haut que large, on le dit transparent. Un peu comme un confessionnal, mais où on verrait les émois du pénitent. Jusqu'ici on était sur le pont, maintenant on est dans la cabine, bien abrité contre la déferlante des postillons, émanations et exhalaisons de particules et corpuscules en tous genres. Le bel écran a perçu de suite qu'entre nous ce serait le PACS et pas le mariage d'amour, et pas pour toujours. Je coche désormais chaque jour du calendrier jusqu'au moment tant attendu de le déposer à la déchetterie avec ce qui me restera de masques et de gel. Le vieux bureau de cent ans d'âge et de trois médecins, aux 900.000 confidences dont il reste la seule mémoire, se voit désormais garni d'un préservatif, vous vous rendez compte docteur, à mon âge. En guise de hublot sur le mur de la vitre, j'ai épinglé un dessin d'arc-en-ciel "Courage papy, tout ira bien." Cela aide à s'en faire une idée.
 

 
Lu dans: 
Jean RAY. Le grand nocturne / Les cercles de l’épouvante. Impressions nouvelles. Coll. Espace Nord. 2020. 434 pages. Liminaire qui ouvre le deuxième recueil, Les cercles de l’épouvante.

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