05 janvier 2020

Savoir d'où on vient pour deviner où on va


"À Ardentes, l'Indre coulait lentement, puissante, tachetée de feuilles d'or.
L'automne commençait à couvrir les rivières de motifs léopards.
La contemplation du courant me traversait de souvenirs paisibles.
Les rivières ont-elles la nostalgie de leur source?"  
                                    Sylvain Tesson


Et si la paix procurée par la contemplation de l'Indre était liée à cette absence d'inquiétude métaphysique dont jouit la rivière?  L'interrogation sur ses origines est une quête humaine: les scientifiques explorent Mars, la Lune, les trous noirs pour comprendre le bigbang initial, l'enfant adopté s'inquiète de ses origines, l'analysé explore son espace antérieur et celui de ses ascendants, le médecin généticien dissèque le génome des ancêtre afin de guérir celui de nos enfants. L'homme a en lui quelque chose du saumon anadrome qui, au terme d'une vie passée à découvrir la mer dans son immensité, remonte la rivière dont il est issu pour s'y reproduire, et mourir. Me revient l'interrogation d'un de mes petits-enfants après avoir libéré une mouche emportée par mégarde dans l'auto un soir de campagne: crois-tu qu'elle va retrouver sa route pour remonter jusqu'à sa famille? A-t-elle le talent du pigeon de compétition qui parcourt mille kilomètres pour retrouver son pigeonnier? Si le retour aux origines nous fascine, il participe aussi à notre inquiétude, celle de n'être qu'un pigeon égaré.


 
Lu dans:
Sylvain Tesson. Sur les chemins noirs. NRF. Blanche. 2016. 144 pages. Extrait page 134.

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