05 juin 2018

Temps court, temps lent


"Une des maisons porte l'inscription: Maison bâtie en 948, rebâtie et 1787. Encore un de ces endroits où on serait resté bien volontiers assis à admirer. (..) Faut-il vraiment partir demain?"
                        Suzanne et André Linard-Dubois

Allez, un dernier billet pour la route. Celui ou celle qui parcourt le chemin de Compostelle note souvent que si sa marche modifie sa relation à l'espace, elle transforme bien plus fondamentalement son rapport au temps. Temps personnel qui se dilate alors que se concentre sa perception d'être au monde, mais aussi mise en perspective de sa propre étincelle de vie dans l'existence lente de la Terre. L'amusante observation de nos vieux amis Suzanne et André d'une habitation restaurée une fois en un millénaire fait sourire autant qu'elle questionne sur notre relation à la "vie courante". Savoure-t-on le temps qu'on gagne en se dépêchant? La longueur du chemin nécessite un bagage léger et un rythme soutenable, on ne court pas le Compostelle. Or une vie, c'est bien plus long qu'un chemin de Saint Jacques. Pourquoi alors, au retour, cette inflation prévisible, simultanée, du bagage et du rythme des jours? Le temps lent ne serait-il qu'une parenthèse, et courir une façon de rester en équilibre. Nous sommes des êtres paradoxaux. 

Je vous souhaite une bonne fin de semaine. Une courte parenthèse me permet de rejoindre ma pèlerine, et les "cerisiers burlat presque confits, gorgés du sucre qu'y a concentré un soleil désormais ardent."
CV

Lu dans:
Suzanne Dubois, André Linard. Compostelle. La mort d'un mythe? Couleur livres. 2010. 134 pages. Extrait p.99

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