09 septembre 2016

Une plus haute humanité

"La guerre entre les Tutsi et les Hutu, c’est parce qu’ils n’ont pas le même territoire ? – Non, ça n’est pas ça, ils ont le même pays. – Alors... ils n’ont pas la même langue ? – Si, ils parlent la même langue. – Alors, ils n’ont pas le même dieu ? – Si, ils ont le même dieu. – Alors... pourquoi se font-ils la guerre ? – Parce qu’ils n’ont pas le même nez. (..)
À partir de ce jour-là, j’ai commencé à regarder le nez et la taille des gens dans la rue. Quand on faisait des courses dans le centre-ville, avec ma petite sœur Ana, on essayait discrètement de deviner qui était Hutu ou Tutsi. On chuchotait : – Lui avec le pantalon blanc, c’est un Hutu, il est petit avec un gros nez. – Ouais, et lui là-bas, avec le chapeau, il est immense, tout maigre avec un nez tout fin, c’est un Tutsi. – Et lui, là-bas, avec la chemise rayée, c’est un Hutu. – Mais non, regarde, il est grand et maigre. – Oui, mais il a un gros nez !"
                    Gael Faye.

Achevant sa biographie d'Erasme, Stéphane Zweig écrit: « Ils seront toujours nécessaires, ceux qui indiquent aux peuples ce qui les rapproche par-delà ce qui les divise et qui renouvellent dans le cœur des hommes la croyance en une plus haute humanité.» Il aura sans doute manqué un Erasme, ou un Zweig, à notre époque troublée.


Lu dans:
Stefan Zweig. Erasme. Grandeur et décadence d'une idée. Traduction d'Alzir Hella. Grasset 1935. Le Livre de Poche 14019. 185 pages. Extrait p.9
Gaël FAYE. Petit pays. Grasset. 2016. 224 pages. Extrait p 7

1 commentaire:

N. d'Arian a dit…

Cet extrait est tellement fort...ça me rappelle mon enfance africaine,je suis née à Kigali!!!...et l'admiration que mon papa portait aux Tutsi.....