29 janvier 2015

La couleur d'origine

Pour retrouver le rose initial
De ta joue, devenue pâle
Le bleu de nos baisers du début
Tant d'azur, perdu
Passez notre amour à la machine
Faites le bouillir
Pour voir si les couleurs d'origine
Peuvent revenir
Est-ce qu'on peut ravoir à l'eau de Javel ?
Des sentiments
La blancheur qu'on croyait éternelle
Avant
        Alain Souchon . L'amour à la machine

Une pépite parmi les mails, postée ce matin par un patient-ami. "J'ai été opéré de la cataracte de l'oeil droit - c'est extraordinaire de voir les couleurs beaucoup plus vives qu'auparavant et aussi de découvrir certains détails. J'ai l'impression de voir le linge plus blanc que blanc même sans Javel - mais aussi le tapis de neige samedi dernier. C'est même émotionnant, je vois la vie autrement." L'après-midi, un autre patient me décrit la palette sonore redécouverte grâce à sa récente prothèse auditive. Un opéré du pancréas me demande de transmettre ses remerciements au personnel hospitalier, "cette multitude de vêtements blancs qui gravitent au huitième nord. Merci pour les sourires et les paroles de réconfort, merci pour les explications nécessaires, pour le soin apporté aux soins." 
Deux mondes cohabitent. L'un paraît en permanence au bord du gouffre, chaotique, en ébullition permanente; on s'y branche dès notre lever, avide de saisir dès l'éveil la rumeur de la planète. L'autre, plus intimiste, distille ces perles qui font du bien et qu'il nous faut capter avec soin dans nos boîtes à messages, conversations, silences. Il me plaît à imaginer la multitude de ces semences d'espoir silencieuses, modestes, infinitésimales multipliées par l'infinité des hommes qu'elles atteignent. Face au chaos, ce sont sans doute elles qui maintiennent au monde une forme de cohésion. 

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