31 décembre 2014

L'an neuf


"Le givre s'est invité au festin de l'hiver. Il est froid et beau, alors on l'a gardé comme un de ces convives dont on ne sait s'il est bien fréquentable, mais qui nous fait rêver. Passée dans l'alambic du temps, la dernière goutte de l'année s'évanouira devant celle de l'an neuf. Sa flamme ravivera le foyer des visages. Le réel des douze mois écoulés aura dévoré un peu de l'existence de chacun et au jour de l'an, ce sera l'heure des voeux."
    Viviane Montagnon. L'an nouveau.

Dernière journée d'une année. Je lisais hier "qu'aucun homme n'a jamais pu construire un seul arbre", mais il peut en replanter. Nous ne referons pas le monde en 2015, mais on peut le transmettre un rien meilleur. Que nous souhaiter de mieux ? 

Je vous souhaite une bonne année 2015.

Lu dans :
Viviane Montagnon. Le panier de Lucette. L'an nouveau. Aréopage. 2014. 120 pages. Extrait p. 49.50

25 décembre 2014

Joyeux Noël


"La lingua dell'Europa è la traduzione."
        Umberto Eco

Gëzuar Krishtlindja, fröhliche Weihnachten, merry Christmas, sretan Božić, весела коледа, sretan Božić, glædelig jul, feliz Navidad, häid jõule, hyvää joulua, joyeux Noël, Nollaig shona, kala christougenna, boldog karácsonyt, gleðileg jól, buon Natale, priecīgus Ziemassvētkus, su Kalėdomis, schéi Chrëschtdeeg, среќен Божиќ, il-milied it-tajjeb, vrolijk Kerstfeest, god jul, Wesołych Świąt, feliz Natal, un Crăciun fericit, Срећан Божић, vesele vianoce, vesel božič, god jul, veselé Vánoce. 

Lu en:
albanais, allemand, anglais, bosniaque, bulgare, croate, danois, espagnol, estonien, finnois, français, gaélique d'irlande, grec, hongrois, islandais, italien, letton, lituanien, luxembourgeois, macédonien, maltais, néerlandais, norvégien, polonais, portugais, roumain, serbe, slovaque, slovène, suédois, tchèque. 

24 décembre 2014

L'émerveillement d'une veillée


"Scène vécue à Paris, le 24 décembre dernier, dans l'après-midi précédant le réveillon de Noël. C'était une journée de froid et de ciel bas où les flocons épars voletaient dans l'espace, une journée d'avant neige, mélancolique à souhait. Je m'étais longuement promené à pied le long des quais, puis dans les petites rues avoisinant la place Saint-Michel, jouissant comme chaque année à la même période de l'accalmie dans la course aux vanités, de la bonhomie cordiale qui règne alors sur la ville pendant quelques heures. (..) Je me sentis parfaitement à ma place dans ce décor et cette atmosphère intemporelle d'un Paris soudain rendu à sa vocation poétique et désuète de haute civilisation, je veux dire une grande ville pour un moment redevenue languissante et où il était encore loisible de prêter une attention vétilleuse aux petits riens superflus qui sont le sel de la vie."
           Denis Grozdanovitch

Les premiers flocons annoncés, et l'émerveillement des lumières dans les jardins et au fond des yeux, suscitent parfois des vocations d'écrire. Ce court conte vous donnera sans aucun doute des idées.

Je vous souhaite une bonne veillée de Noël
CV

Lu dans:
Denis Grozdanovitch. Petit éloge du temps comme il va. Gallimard 2014. Folio 5820. 132 pages. Extraits pp 128-130.

23 décembre 2014


 "Il est plus facile d'interdire l'entrée à un souvenir que de se libérer de lui, après qu'il a été enregistré."
    Primo Levi.

Débusquer les petits événements, lectures, rencontres, ces tout petits riens qui nous sont toxiques est un apprentissage. La phrase de Levi m'était apparue comme absurde en première lecture, et pourtant...

Lu dans:
Myriam Anissimov. Primo Levi ou la tragédie d'un optimiste. JC Lattès. 1996.696 pages. Extrait p 555

21 décembre 2014

Si je ne suis...


"Si je ne suis pas pour moi , qui le sera
Si je ne suis que pour moi, qui suis-je?
Et si ce n'est maintenant, quand? "
    Rabbi Hillel Hazaken. Aleph. Verset 14.  

Guérison bien ordonnée commence par un sursaut: reprendre les clés de sa vie, de son agenda, de ses pensées, de ses envies trop souvent déléguées. Et en même temps, paradoxe, par une mise en route vers l'autre: centré sur soi-même, le regard louche. La durée limitée de nos existences y ajoute un facteur: l'urgence. 

Lu dans:
Myriam Anissimov. Primo Levi ou la tragédie d'un optimiste. JC Lattès. 1996.696 pages. Extrait p 522.

20 décembre 2014

Le cordonnier de nos âmes


"Vous me regardez et vous ne voyez en moi que les traits du vieil homme que je suis, mais, à l'intérieur, je suis empli d'une grande beauté: je suis assis au sommet d'une montage et je regarde vers le futur."
        Oren Lions. Sagesse amérindienne.

Rassasié d'années, l'abbé Joseph Kennes est mort cette nuit. Sa vie durant, il fut ce cordonnier de nos âmes "sans rien d'particulier / dans un village dont le nom m'a échappé / qui faisait des souliers si jolis, si légers / que nos vies semblaient un peu moins lourdes à  porter."  Hors d'âge, il restait le plus jeune de nous tous, le regard étonné d'être encore là. Présent quand c'est possible aux funérailles de mes patients, je l'ai entendu de nombreuses fois - on a chacun nos phrases en boucle - prendre congé d'eux en leur soufflant "tu as bien oeuvré sur terre, repose-toi maintenant". C'est ce que tous ceux qui l'ont connu souhaitent lui dire aujourd'hui.


Lu dans:
Steve Wall et Harvey Arden. Wisdomkeepers.' Meetings with Native American Spirituai Eiders. 1990.  
Jean Jacques Goldman. Il changeait la vie.

19 décembre 2014

Compréhension du quotidien


"On voit le faible secours qu'apportent les idées générales à la compréhension des cas particuliers."
    Primo Levi

Il m'arrive de parcourir le journal avant d'entamer la consultation. Les analyses politiques et sociétales retiennent toute mon attention, et j'admire leur pertinence. La confrontation avec le quotidien vécu illustre bien la phrase de Primo Levi. 


Lu dans:
Myriam Anissimov. Primo Levi ou la tragédie d'un optimiste. JC Lattès. 1996.696 pages. Extrait p 342

17 décembre 2014

The sky's the limit


"Si les Égyptiens n'ont pas été capables de voler il y a cinq mille ans, c'est, me direz-vous, parce qu'ils n'avaient pas la technologie pour cela. En aucun cas. Les premiers planeurs furent construits avec de la toile tendue sur des baguettes de bois et il aurait été parfaitement possible d'en concevoir il y déjà des millénaires. Non, si l'homme n'a pas volé plus tôt, c'est en raison de l'idée que le ciel était réservé aux dieux et qu'il ne fallait pas les déranger. Il a fallu attendre la fin du XIXème siècle pour enfin nous affranchir de cette croyance. De la même façon, ce ne sont pas des Népalais ou des Tibétains qui ont été les premiers à gravir l'Everest, montagne sacrée entre toutes, qu'ils avaient pourtant devant les yeux depuis des siècles, mais des étrangers venus de l'autre bout du monde."
    B. Piccard

Et aujourd'hui, de quelles croyances faisons-nous nos frontières?


Lu dans :
Bertand Piccard. Changer d'altitude. 2014. Stock. 295 pages. Extrait pp.82-83

Quand le parler-vrai se faufile par la fenêtre


"Une amie me disait au téléphone:
j'aurai un quart d'heure
de retard, ne m'en veux pas,
je dois encore lécher le singe.
Elle voulait dire,
on l'aura compris: une seconde,
je dois encore sécher le linge."
    F. Dannemark

Si le lapsus est, comme le suggèrent les psychanalystes,  le « parler-vrai » de l’inconscient qui contourne le barrage de la conscience pour se faufiler au dehors, régalons-nous. Nous en produisons semble-t-il en moyenne un tous les 600 à 900 mots, c'est-à-dire à peu près une dizaine dans une heure de parole continue, ce qui laisse la porte grande ouverte à l'expression de ce que nos pensons vraiment. 


Lu dans:
Francis Dannemark. Une fraction d'éternité. Le Castor Astral. 2005. 100 pages. Extrait p.13

16 décembre 2014

Nul ne l'aurait cru


"Nous avons toujours eu beaucoup; nos enfants n'ont jamais pleuré la faim, notre peuple n'a jamais manqué de rien. Les rapides de Rock River nous fournissaient en abondance un excellent poisson, et la terre très fertile a toujours porté de bonnes récoltes de maïs, de haricots, de citrouilles et de courges. Ici était notre village depuis plus de cent ans pendant lesquels nous avons tenu la vallée du Mississippi sans qu'elle nous fût jamais disputée . Notre village était sain et nulle part, dans le pays, on ne pouvait trouver autant d'avantages ni de chasses meilleures que chez nous. Si un prophète  était venu à notre village en ce temps-là nous prédire ce qui devait advenir, et qui est advenu, personne dans le village ne l'aurait cru."
        Black Hawk (1767-1838), chef amérindien de la tribu Sauk et Foxdes

Amertume d'un discours de reddition. Faucon Noir sera exhibé avec d'autres chefs captifs dans une dizaine de grandes villes de la côte Est des Etats-Unis avant une longue captivité au Fort Monroe. A Détroit, la foule brûle et pend les effigies des prisonniers, ce qui lui fera écrire que "les hommes blancs savent pourquoi nous avons fait la guerre et ils devraient en avoir honte. Un Indien qui serait aussi mauvais que les blancs ne pourrait vivre parmi nous. Il serait mis à mort et dévoré par les loups.» 

Lu dans:
TC Mac Luhan, Edward S. Curtis. Pieds nus sur la terre sacrée. Denoël. 1971. 188 pages. Extrait page 11

14 décembre 2014

Un cheval flou


"Aujourd'hui la mémoire est beaucoup moins sûre d'elle-même, (..) la recherche du temps perdu se heurte à une masse d'oubli qui recouvre tout. "
                Patrick Modiano

Souvenir d'une promenade  à cheval avec papa, à 13 ans. Ce fut la seule. Nous fîmes une photo, floue. "Un" était une abondance. Actuellement on imprimerait tout un album, en pleine page. Le souvenir en serait-t-il plus net? 


12 décembre 2014

La voix humaine comme un paysage


«Chaque voix humaine est unique. Elle est notre visage sonore.
    Delphine Salkin

Youssef. Je ne l'ai entendu au téléphone depuis plusieurs années, il est de passage à Bruxelles et souhaite consulter. A sa surprise, je le nomme avant qu'il se soit annoncé, et lui demande comment cela se passe dans sa lointaine Algérie. Une vie de labeur défile en un instant, la mort de l'épouse, l'infarctus nocturne un soir de surcharge, l'ambulance et l'échelle des pompiers dans la petite rue proche du canal, la crise de nerfs de la locataire du premier au passage du lit au bout d'un filin devant sa propre fenêtre, la longue convalescence et le retour au pays lointain de ses origines. Le timbre d'une voix survit au silence et ne s'oublie guère. En quelques secondes, ce sont des images, des parfums, des sentiments et la bande sonore d'une vie qui ressurgissent, l'état de santé et le moral du moment, et par-dessus-tout l'énorme surprise de se savoir reconnu comme unique et important. La voix humaine est un paysage.

Lu dans :
Delphine Salkin. Intérieur Voix. Rideau de Bruxelles.
Delphine Salkin, la voix cassée. Catherine Makereel. Le Soir du 24 novembre 2014.
En 2001, alors qu’elle joue la déesse Athéna dans L’Orestie, Delphine Salkin sent soudain sa voix se briser sur le mot « loi ». Sur scène, personne ne remarque rien, et pourtant cette cassure la privera de sa voix pendant des années.

La rémanence des étoiles


"Lumière d'étoile morte
venue d'un présent trépassé
son aujourd'hui est l'hier
lumière-dépouille."
        Valerio Magrelli

On reste fasciné par la contemplation de ces étoiles au ciel, brillantes alors que certaines n'existent plus. Comment peut-on être et ne plus être? Comment ne pas devenir soi-même un astre mort, avec l'apparence du vivant alors que tout est déjà éteint à l'intérieur? Ou mieux, continuer d'éclairer alors qu'on a disparu? 

Lu dans:
Valerio Magrelli. Exergue de Didascalies pour la lecture dun journal. Les Poètes de la Méditerranée. Gallimard Poésie. 2010. 955 pages. Extrait p.739

11 décembre 2014

Sagesse de TS Eliot


"Où est la sagesse que nous avons perdue avec la connaissance?
Où est la connaissance que nous avons perdue avec l'inforrnation ?»
    TS. Eliot (1888-1965, poète dramaturge américain, Nobel de littérature 1948)

Saoulés d'informations et de débats politiques, en discernons-nous pour autant mieux les enjeux véritables? La même question - médicale - me taraude au soir de ma consultation. Il y a 20 ans, le patient retraité consultait pour renouveler ses lunettes car "ses verres faiblissaient". Aujourd'hui, il demande conseil car il a appris qu'il est atteint de DMLA (dégénerescence maculaire liée à l'âge), informé par Internet des diverses thérapies préconisées chez nous et à l'étranger et inquiet des bonnes adresses à consulter. En quelques années, la connaissance intime des pathologies qui nous accablent a sans aucun doute accru le degré de connaissances des patients et le pouvoir médical par la maîtrise des diverses techniques susceptibles d'en ralentir l'évolution. En a-t-elle pour autant amélioré le quotidien, diminué l'incertitude et calmé l'inquiétude? A une époque de l'existence où les semaines et les mois comptent, que d'heures médicalisées, que de temps d'attente de soins divers et parfois pénibles pour d'hypothétiques gains. Avec TS Eliot, où placer le curseur entre connaissance, information et sagesse? Il se fait tard: plein de ces doutes fondateurs, tentons de trouver le sommeil. 


Lu dans:
Valerio Magrelli. Exergue de Didascalies pour la lecture dun journal. Les Poètes de la Méditerranée. Gallimard Poésie. 2010. 955 pages. Extrait p.739

10 décembre 2014

Réchauffe-moi l'âme

« Ô David! c'en est fini pour moi des demeures. J'habite chez ceux dont le coeur est brisé.»
    Sohravardi (philosophe mystique perse, 1155-1191). La Langue des fourmis.


"Dans son bouge misérable de la rue Haute, la vieille Belleke raconte sa vie en quelques phrases. Une vie de misère qu'elle raconte avec fierté. C'était sa vie. Elle n'en avait pas d'autre. Personne ne l'obligerait à éprouver de la honte. Son café du matin, elle le chauffe à la bougie dans sa tasse en métal. Ce qu'elle fit devant la caméra avec un sourire, vêtue très correctement de vieux lainages. Le portrait qu'a fait R. en quelques minutes de Belleke en a fait une sainte au regard doux et perçant. Son regard ne me quitte pas."
André Dartevelle

Je me retrouve "chez moi" en lisant cette belle description de Belleke. Elle se place en filigrane de Molleke, qui elle possédait un bec à gaz mais l'utilisait les jours d'hiver pour se chauffer. Se chauffer est un des marqueurs essentiels de la pauvreté, évoquant tant de visages démunis habités pourtant d'une belle lumière.


Lu dans :
Chantal Dellicour transcrit André Dartevelle. A quelle fête? Cantare. 2014. 30 pages. Extrait p.19

09 décembre 2014

Averse ensoleillée


"Marchant à grands pas pressés, je dépasse les enfants du lycée Jacqmain se traînant mollement par petits groupes dans le parc Léopold quand soudain sans crier gare, une averse nous tombe dessus. Comme une ruche bourdonnante, c'est la pagaille parmi les écoliers qui courent en tous sens pour se réfugier sous les grands arbres. Quelques-uns, dégoulinants, célèbrent en dansant la fête du soleil et de l'eau. Je ris avec mes jeunes compagnons improvisés, emplie du bonheur de vivre ensemble quelque chose d'intense, de vivant. Cette joyeuse effervescence me ranime et efface tous mes soucis."
     Chantal Dellicour

On aime ces averses qui font des souvenirs, ces inattendus magiques parce qu'ils sont gratuits. Une fraction de seconde, on ne connaît plus ni son âge, ni la date, ni le lieu. On ne traîne plus ni souvenirs ni projet, on est dans l'instant avec soi-même et les autres, toute menace effacée. On a chacun son parc Léopold. 


Chantal Dellicour. A quelle fête? Cantare. 2014. 30 pages. Extrait p.7

07 décembre 2014

Rêverie à bord du Breitling Orbiter


"N'importe qui peut éprouver à un moment ou l'autre la stupeur d'être."
Roger Vailland

"Le paysage défile lentement devant mon bonheur, mais aussi au devant mes interrogations. Comment peut-il y avoir des destin aussi différents pour les habitants d'une même planète? (..) Je ressens cruellemerment la fragilité, la précarité de mon état. À quoi sert tout cela, tout ce que je vis, tout ce que je vois, tout ce que je sais ou que j'ignore? Que reste-t-il de mes connaissances scientifiques, de mes convictions philosophiques, de mes points d'exclamations pleins d'assurance, lorsque je me demande à quoi sert la vie, à quoi sert leur vie, à quoi sert ma vie? (..) Il y a comme une vibration nouvelle qui me parcourt devant cette interrogation sans réponse et qui me fait mystérieusement ressentir que je suis entièrement vivant. La question est maintenant totale, ma présence à moi-même également. La lumière a quelque peu changé; elle est plus précise, les couleurs sont plus vives, tout comme les sons qui me parviennent avec davantage de clarté. (..) Je suis porté par ce mystère qui s'ouvre non seulement sur le sens de la vie mais sur le fait même d'être en train d'exister. Depuis un instant, j'accepte de ne pas trouver de réponses, j'accepte d'être bercé par le doute, de laisser l'inconnu prendre possession de mon paysage intérieur, et je me sens mieux sans certitudes. Dans cet état, il est facile de suivre une trace dans le ciel en ignorant totalement où elle me conduira. Mais mon intellect ne peut s'empêcher de se remettre au travail pour me murmurer: « Voilà, voilà, tu as trouvé. La  spiritualité, ce n'est pas une idée abstraite, c'est la sensation pleine et complète de te sentir exister. Et le sens de la vie, c'est de t'ouvrir à ce miracle à travers l'acceptation du doute et de l'inconnu. Seul le mystère peut t'ouvrir à cette dimension de l'existence. Très vite, cette pensée se transforme en réponses, en nouvelles certitudes, et se met à dissiper l'expérience comme un voile fragile qu'une tempête déchire. J'assiste, impuissant, à la disparition de ma sensation d'exister pour revenir, malgré moi, dans l'univers du connu. Seuls demeurent alors le déjà lointain souvenir d'un moment de vie totale et l'intense désir de retrouver le merveilleux mystère d'une question sans réponse. »
        Bertrand Piccard. Carnet de bord.

Lu dans :
Bertand Piccard. Changer d'altitude. 2014. Stock. 295 pages. Extrait p.238-239

05 décembre 2014

Les juges intègres


"J'aime qu'un tableau ait l'air de s'être peint lui-même."
Emil Nolde

Citation anodine de l'histoire de Charlotte Salomon, par David Foenkinos. Elle annonce, plusieurs pages plus tard, la récompense qui aurait dû être attribuée à la jeune artiste juive par l'Académie des Beaux-Arts de Berlin pour une de ses œuvres, et qui sera remise - par substitution d'identité - à son amie Barbara, infiniment plus aryenne qu'elle. Celle-ci se l'appropriera sans vergogne, lauréate blonde tout sourire, acceptant un prix qui n'est pas le sien sans paraître gênée comme si elle croyait vraiment être la gagnante. Elle remercie ses parents et ses amis. "Elle devrait aussi remercier son pays", pense Charlotte, qu s'enfuit de l'Académie où elle ne reviendra jamais.
       

Lu dans:
David Foenkinos. Charlotte. Gallimard. NRF. 2014. 222 pages. Extrait p. 64

04 décembre 2014

Le besoin d'être aimé


"C'est quoi au juste,
prendre un peu de distance ?
(..) j'ai répondu
qu'il suffisait de regarder le spectacle du monde
avec soi-même dedans en tout petit,
et de penser sans passion
mais avec intérêt
aux fourmis faisant leur travail de fourmis,
et elle a hoché la tête.

Les moments sont rares où l'on sent vraiment
à quel point les gens ont besoin d'être aimés.
Ce besoin-là est si vaste,
on ne peut même pas l'imaginer."

Lu dans:
Francis Dannemark. Une fraction d'éternité. Le Castor Astral. 2005. 100 pages. Extrait p.17

03 décembre 2014


"Surveille ce que tu ne vois pas."
Proverbe Inuit


Sagesse de Sun Tzu


"Attendre les ordres en toute circonstance, c'est comme informer un supérieur que vous voulez éteindre le feu : avant que l'ordre ne vous parvienne, les cendres sont déjà froides ; pourtant il est dit dans le code que l'on doit en référer à l'inspecteur en ces matières ! Comme si, en bâtissant une maison sur le bord de la route, on prenait conseil de ceux qui passent ; le travail ne serait pas encore achevé."
     Sun Tzu. L'Art de la guerre.

Lu dans
Sun Tzu. L'Art de la guerre. Les Treize Articles. Article III. Des propositions de la victoire et de la défaite. Book sur. http://www.ebooksgratuits.com/

01 décembre 2014

L'hiver est là

"Le regretterait-on
même le son de la cloche
semble avoir changé:
après la rosée
c'est le givre
qui maintenant se dépose."
        佐藤 義清Satō Norikiyo, dit Le Moine Saigyo (1118-1190)

"Dans une manche
Ton petit bras
Et tout au bout
Tes petits doigts
Bonnet de laine
Echarpe de soie
L’hiver est là."
        Alice Guitton

Je vous souhaite une belle journée d'hiver naissant.


Lu dans:
Philippe Jaccottet. La seconde semaison. Carnets 1980-1994 NRF Gallimard. 1996. 233 pages. Extrait p.194
Alice Guitton. Ecrits de ma cabane. Ed.Pailles. 2011. 96 pages. Extrait p.45