16 septembre 2014

Le poète aux ailes de papillon


"Quand nul ne la regarde
La mer n’est plus la mer.
Elle est ce que nous sommes
Lorsque nul ne nous voit..."
    Jules Supervielle. La mer secrète.

Si nul ne pense à moi, cesserai-je d’exister? Interrogation éternelle du poète de la métamorphose, aux ailes "fragiles comme des ailes de papillon" qui plus que quiconque pouvait chercher "une goutte de pluie qui vient de tomber dans la mer" car : 

Un jour quand nous dirons : « c’était le temps du soleil,
Vous souvenez- vous, il éclairait la moindre famille,
Et aussi bien la femme âgée que la jeune fille étonnée,
Et savait donner leur couleur aux objets dès qu’il se posait
Il suivait le cheval coureur et s’arrêtait avec lui,
C’était le temps inoubliable où nous étions sur terre,
Où cela faisait du bruit de laisser tomber quelque chose,
Nous regardions alentour avec nos yeux connaisseurs,
Nos oreilles comprenaient toutes les nuances de l’air
Et lorsque le pas de l’ami s’avançait nous le savions,
Nous ramassions aussi bien une fleur qu’un caillou poli.
Le temps où nous ne pouvions attraper la fumée,
Ah ! C’est tout ce que nos mains sauraient saisir maintenant.»


Lu dans:
Jules Supervielle. Gravitations. Le regret de la terre. Jules Supervielle. 1925

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