31 octobre 2011

Le rêve de mon père

"J'ai rêvé de mon père. Il était jeune et sage à la fois, la nuit permet de pareils raccourcis. Il m'attendait à la sortie de l'école, m'a emmené chez mes grands-parents. Je me suis réveillé habité par tout le bonheur du monde."
Plus que toute autre fête religieuse, la Toussaint peut nous rassembler au-delà de nos convictions philosophiques. Instant fugace où l'athlète mesure le chemin parcouru, la force de son élan, la trajectoire du vent et l'énergie accumulée avant le saut. Le passé conditionne notre futur, peuplé d'êtres chers qui nous renforcent.


Lu dans:
Le carnet Moleskine. Eranthis. 2011. 88 pages. p.45.

28 octobre 2011

Un mouchoir pour le bonheur


"Jeanne
Enfin je vais vous dire
Combien je soupire
Vous êtes si loin
Si loin d'ici
Les siècles nous séparent
Et mon cœur s'égare
Un amour subtil
L'a appris
Et je chante ma peine
Loin de celle que j'aime
L'âme pleine de
Mélancolie".
Laurent Voulzy. Jeanne

Un opus tout frais de Laurent Voulzy, doux rêveur pétri de mélancolie, qui sait se faire attendre pour mieux nous enchanter et nous faire aimer ce long weekend de passage à l'heure d'hiver, de Toussaint et de souvenirs. Entendu dans l'auto ce matin, ce superbe morceau m'est resté dans les oreilles toute la journée, du meilleur Voulzy.

L'usage paisible des libertés

"Les institutions communales sont à la liberté ce que les écoles primaires sont à la science; elles la mettent à la portée du peuple ; elles lui en font goûter l'usage paisible et l'habituent à s'en servir. Sans institutions communales une nation peut se donner un gouvernement libre, mais elle n'a pas l'esprit de la liberté. »
Alexis de Tocqueville

Lu dans:
Alexis de Tocqueville De la démocratie en Amérique, T. 1, première partie, chap. IV, « Du système communal en Amérique »

26 octobre 2011

La haine a une fin

"J'ai vécu comme un chien, je meurs comme un homme. Ton pardon me ressuscite."
Marguerite Barankitse

Rescapée des massacres ethniques au Burundi, Marguerite Barankitse anime la Maison Shalom et des centres de soins pour femmes et enfants, quelle que soit leur ethnie.

Sagesse des vaches à lait

"On distingue quatre types de vaches: les laitières, les vaches à viande, les races mixtes et les rustiques. Et un cinquième, les "vaches de réforme" désigne les vaches abattues pour production insuffisante, stérilité, troubles infectieux ou de la locomotion."

Si l'anthropomorphisme, répandu dans la culture cinématographique, les consoles de jeu et la BD, peut être défini comme l'attribution de caractéristiques comportementales ou morphologiques humaines à des animaux, on ne peut être optimiste.



Lu dans:
H.Heyrendt et L.Centrella. Le boeuf dans tous ses états. Momento. LLB 22.10.2011. p.15

24 octobre 2011

Le Capitole est au bout de la Roche tarpéienne

« Ce n’est pas que je suis plus intelligent que les autres, c’est que je reste plus longtemps avec les problèmes »
A. Einstein.

Le mérite des grands hommes résiderait-il non pas tant dans la gestion des succès que de celle de tirer le meilleur parti de leurs échecs? Après 481 jours, la 6e réforme de l’Etat belge est un échec en termes de négociation, après 482 jours, c’est un succès! Quand Edison, au terme de milliers d’essais découvre l’ampoule électrique, il peut se féliciter de ne pas faire partie de ceux qui abandonnent sans réaliser combien le succès était proche. Et si l'échec est inéluctable, d'aucuns passeront maîtres pour en valoriser les fragments. Dans un feu qui se meurt, il y a des braises chaudes, dans une guerre perdue, des batailles gagnées. Dans un échec, il y a des succès à exploiter.

Lu dans :
Dr. Ir. Daniel Lebeau. Vouloir apprendre. Un atout synergique pour le développement
personnel, économique et sociétal. Conférence (14 octobre 2011)

23 octobre 2011

Une bonne pub commence par un bon sujet

"Aucune chasse ne vaut la chasse à l’homme. Ceux qui ont longtemps chassé des hommes armés et ont aimé ça ne trouvent plus jamais saveur à autre chose. »
Ernest Hemingway.
Le lynchage sanglant de Kadhafi en video, précédée d'une bande annonce pour Belgacom et terminée par celle pour le Tintin de Spielberg, constitue un excellent raccourci de notre époque. Sur le site du journal La libre Belgique hier, qui nous avait habitué à plus de discernement.

A jour frisant

"Comme un chemin à l'automne
à peine l'a-t-on balayé
qu'il se couvre à nouveau de feuilles mortes."
F. Kafka
La lumière décroît sur nos journées d'octobre, si pareilles à ce sentier d'automne.

Lu dans:
Les aphorismes de Zurau. Franz Kafka. Gallimard. 2010. 142 pages. Extrait p.15

Toute ressemblance avec ..

«Celui qui recherche la vengeance devrait commencer par creuser deux tombes.»
Confucius

21 octobre 2011

Nous sommes sauvés

“Il y a deux sortes de bergers : ceux qui s'intéressent aux gigots et ceux qui s'intéressent à la laine. Aucun des deux ne s'intéresse aux moutons.”
Henri Rochefort.
Je découvre cette amusante réflexion en même temps qu'un article de ma presse matinale se réjouissant des investissements avisés du Qatar sur notre vieux continent aux abois. La manne divine s'abat sur l'industrie automobile, la grande distribution, l'énergie éolienne, les clubs de football, les chocolats Galler, les slots gaziers de Fluxys, le décathlonien belge Freddy Herbrand, les immeubles à appartements de Malmédy... Nous sommes sauvés.

Lu dans:
Christophe Lamfalussy. Le Qatar investit en silence. LLB 20.10.11

20 octobre 2011

Fais-moi peur

"La droite ridiculise la peur absurde du marché et de la libre entreprise mais insiste sur l’insécurité urbaine et la déliquescence des mœurs. La gauche n’est pas en reste qui se moque du chantage au terrorisme, à la délinquance - un fait-divers n’est qu’une diversion à ses yeux - mais elle-même souligne les dangers de la mondialisation, du réchauffement climatique".
P. Bruckner
Tous les bergers le savent: la peur du loup rassemble le troupeau. Mais est-elle bonne conseillère pour les humains?

Lu dans:
Pascal Bruckner. Le fanatisme de l'Apocalypse. Grasset. 2011. 280 pages

18 octobre 2011

Mazarinade

"Ce prélat est une pie qui convoite tout ce qui brille. Lorsqu'il lorgne sur un décolleté, il n'en admire pas les rondeurs mais le collier."
Alain Baraton, évoquant Mazarin.

Lu dans :
Francis Mathys. Vice et Versailles. Lire de LLB. 17.10.2011. p. 4
Alain Baraton. Vice et Versailles. Grasset. 2011. 204 pages.

La force des contes

"Une cage s'en fut chercher un oiseau."
F. Kafka

On a comparé les pubs TV suivant le JT aux contes de notre enfance: elles se terminent toujours par "ils furent heureux et eurent beaucoup d'enfants", et à la fin il est temps pour les enfants d'aller dormir. Heureux? J'admire le savoir-faire des marchands de rêve, paré des plus beaux atours pour la chasse aux oiseaux que nous sommes.


Lu dans:
Les aphorismes de Zurau. Franz Kafka. Gallimard. 2010. 142 pages. Extrait p.26

17 octobre 2011

Lire l'actualité

Ecouter avec une oreille à la fois enfantine et millénaire, rêveuse et attentive, capable de percevoir "la voix de fin silence" qui irrigue le temps depuis les origines, soupire dans notre propre souffle, chuchote dans le bruit sourd de notre propre sang, et sans fin luit à l'horizon du temps. .
Sylvie Germain

Je termine la lecture du journal du matin avec perplexité. "On sent l'éclat d'une nouvelle page, où tout encore peut devenir" (Rainer Maria Rilke), mais vers quel avenir? Comment trouver "l'oreille enfantine et millénaire" qui sommeille en nous nous permettant de décrypter l'actualité quotidienne avec sagesse sans nous détacher du monde. Mieux, en nous y engageant davantage? Pas simple.


Lu dans
Sylvie Germain. Songe du temps. Desclée De Brouwer. Littérature ouverte. 2003. 110 pages. Extrait p. 26.
Rainer Maria Rilke. Livre de la vie monastique.

15 octobre 2011

La force des choses infimes

La délicatesse tragique d'une paire d'ailes [du papillon] ,
cette "plume ajoutée au poids des ans".
Erri De Luca

Tous deux pétris d'années, le vieux chasseur emporte sa proie, la dernière qu'il tirera jamais, le roi des chamois arrivé au terme de son existence. Le combat fut inégal, et l'homme l'a emporté. Il peine à avancer, le souffle court, les épaules en feu. Un papillon se pose sur les bois du chamois. Son insignifiance s'ajoute au poids des ans et déséquilbre l'ensemble, le vieux tombe et meurt sous son trophée. On retrouvera leurs deux dépouilles inextricablement mêlées à jamais sous la neige.

Lu dans:
Eri De Luca. Le poids du papillon. Gallimard. 2009. 83 pages

14 octobre 2011

Un être en ordre auprès de moi

"... comme la lumière se pose sur le miroir
petite la lumière, miroir minuscule,
un être en ordre croissait tout près de moi
et rassénérait mon désordre.
J'aimai sa perfection limitée."
Francisco Brines.
Ces mots d'amour à la personne disparue font écho à tant de confidences partagées en consultation, encore cet après-midi, qu'ils m'apparaissent soudain universels. La place que nos proches occupent en nous se révèle souvent au moment précis où ils disparaissent de notre horizon. Brûlure parfois insupportable, à laquelle le temps qui passe n'apporte que peu de baume. Réapprendre à dire "je t'aime" de son vivant.

Lu dans:
Francisco Brines, dans Les Poètes de la Méditerranée. Gallimard Poésie 2010. 955 pages. Extrait p.565

13 octobre 2011

Les petits cadeaux entretiennent l'amitié

"Dans ce monde , il faut être un peu trop bon pour l'être assez."
Marivaux
Rien à voir, quoique. Vu hier soir un bout d'émission sur France2 narrant les visites d'amitié que les politiques français et leurs intermédiaires se devaient de faire avant les élections à Omar Bongo, président du Gabon. Visites se soldant par la remise d'une valise bourrée de coupures de cent euros ("on n'aurait plus su en rajouter une seule tant c'était serré"), acquise au terme d'une petite liturgie immuable: ramper à genoux devant son hôte, à qui on lavait les pieds dans un bassin, et en boire quelques gorgées d'eau ensuite en signe de respect et de gratitude. La scène est rapportée par un ancien ministre gabonais, actuellement domicilié en France, qui assure que les interlocuteurs, quel que soit leur niveau ne rechignaient guère à cet innocent rituel culturel somme toute. Ne se disait-il pas que "la France sans l'Afrique, c'est une voiture sans carburant", venu de ce Gabon au pétrole abondant qui, avec un PIB équivalent à celui du Portugal, n'a construit que 5 km de routes par an et possède un des taux de mortalité infantile parmi les plus élevés au monde.

Lu dans :
La transmission, chemin vers l'autre ou chemin vers soi? Weyrich. 2011. 183 pages. Extrait p.170

11 octobre 2011

Sagesse de Youtube

"La beauté sauvera le monde."
Tzvetan Todorov
Entre petit-déjeuner et mise en route pour les visites de patients à domicile, je m'offre quelques minutes du Déluge de Michelangelo Falvetti, interprété par l'Ensemble Cappella, capté par le RTBF et archivé sur You Tube. Moment d'évasion salutaire pour le mental, comme on remet les chaises en place sous la table avant de quitter les lieux.

Le beau structure et l'époque actuelle nous gâte par la large diffusion de perles à découvrir au hasard de nos journées. Dehors il pleut, une pluie tiède qui panse plus qu'elle n'agresse, l'automne est là, belle saison où l'on range les fruits et fait provision de couleurs pour l'hiver.

10 octobre 2011

Sagesse du vin de paille

"L'automne a enfilé son chandail de grisaille
les châtaignes grésillent.
Nous casserons les noix
boirons le vin de paille
le grand panier est plein de bois."
Alice Guitton.

Lu dans:
Alice Guitton. Ecrits de ma cabane. Ed.Pailles. 2011. 96 pages.

08 octobre 2011

La queue de la comète

" Ma vie. Quand je pense à ces mots, je vois devant moi un rayon de lumière. Et, à y regarder plus près, je remarque que cette lumière a la forme d'une comète et que celle-ci est pourvue d'une tête et d'une queue. Son extrémité la plus lumineuse, celle de la tête, est celle de l'enfance et des années de formation. Le noyau, donc sa partie la plus concentrée, correspond à la prime enfance, où sont définies les caractéristiques les plus marquantes de l'existence. J'essaie de me souvenir, j'essaie d'aller jusque-là. Mais il est difficile de se déplacer dans cette zone compacte : cela semble même périlleux et me donne l'impression d'approcher de la mort. Plus loin, à l'arrière, la comète se dissout dans sa partie la plus longue. Elle se dissémine, sans toutefois cesser de s'élargir. Je suis maintenant très loin dans la queue de la comète : j'ai soixante ans au moment où j'écris ces lignes."
Tomas Tranströmer.


Court hommage au dernier prix Nobel de littérature, hémiplégique, aphasique, qui communique encore en jouant du piano d'une seule main les diverses oeuvres que ses amis compositeurs ont écrites pour lui. La queue de la comète recèle de beaux restes.


Lu dans.
Tomas Tranströmer. Le Castor Astral. 2004. 101 pages.

Chère chair

"Comme Libellule, qui est un insecte à quatre ailes, et qui contient autant d'l dans le mot qui le désigne."
Bernard Pivot

Plaisir de lire Pivot, gourmet de mots comme la "chair" et la "chère" qui ne s'écrivent pas de la même façon mais relèvent du même appétit, comme l'"ego" qui garde l'accent pour lui, ou de l'amusant mot "coït" car l'orthographe lui correspond bien.


Lu dans
"Les mots de ma vie". Albin Michel. 2011. 364 pages

06 octobre 2011

Les âges d'un siècle

"Au fond, les choses se sont déroulées ainsi au XXème siècle : il y a d'abord eu la naissance du bonheur; en tout cas, le droit au bonheur et l'accès aux loisirs et aux vacances. Ce sont les années 1930, le Front populaire. Ensuite, nous sommes passés à la seconde étape de notre progression ; une étape qu'on peut appeler le droit à l'insatisfaction. Elle est apparue dans les années 1970, avec la légalisation de l'avortement, et du divorce bien sûr. On oublie parfois que l'adultère était interdit par la loi jusqu'en 1975. Nous avons ainsi acquis le droit de juger notre bonheur. Et nous voilà maintenant, dans là troisième étape, peut-être la plus douloureuse : celle de l'hésitation permanente. Nous avons le bonheur, nous avons le droit de ne pas être satisfaits de ce bonheur, alors s'ouvre à nous la multiplicité des routes. Quel est le chemin à prendre? Je ressentais profondément la tonalité moderne de mon malaise. Je voulais une vie et son contraire. J'étais amoureux de Louise, j'aimais notre vie et notre enfant, et pourtant il m'arrivait d'étouffer. Je me disais que mon bonheur était peut-être ailleurs, dans une autre ville, avec une autre femme. L'idée de cette possibilité me rendait sec."
David Foenkinos

Lu dans :
David Foenkinos. Les souvenirs. NRF Gallimard. 2011. 266 pages. Extrait p. 251

02 octobre 2011

La sagesse des souvenirs

"Cela me rendait fou de la voir partir. Je n'avais plus la moindre idée sur nous (..) Pendant des années je m'étais senti seul: et je découvrais maintenant qu'il faut être deux pour ressentir réellement la solitude."
D. Foenkinos

J'avais aimé le précédent livre La délicatesse. J'ai été sous le charme de son dernier ouvrage Les souvenirs. Pas de véritable intrigue, des sentiments éternels pour des situations très actuelles vécues par des adultes-ados pas toujours bien amarrés: la mort des proches, les amours, les séparations et la vie comme elle vient car "c'était peut-être ça le héros moderne: l'homme (la femme) qui se lève tous les jours pour aller travailler, qui s'occupe de son enfant, planifie les vacances en famille, pense à payer à temps la taxe d'habitation ou l'assurance de la voiture. Il y a de l'héroïsme à vivre cette folie épuisante du concret." Que de cela on puisse faire un ouvrage relève du talent.


Lu dans :
David Foenkinos. Les souvenirs. NRF Gallimard. 2011. 266 pages. Extraits p. 207, 251

Un phare dans la nuit

"J'avais envie de traîner ; j'avais envie de me libérer d'un poids qui subitement m'étouffait ; j'avais envie de boire. J'ai marché un peu, avant de repérer au loin une enseigne clignotante. La version alcoolique du phare. Le néon n'attirait pas les bateaux mais plutôt les dérives. "
D. Foenkinos
Deux lignes, un vrai tableau. Van Gogh a peint l'inoubliable Terrasse de café, la nuit. Le court texte de Foenkinos me l'a remis en mémoire.


Lu dans:
David Foenkinos. Les souvenirs. NRF Gallimard. 2011. 266 pages. Extrait p. 165

01 octobre 2011

Paradis perdu

"Il aimait le pain, il aimait le jambon, mais sa femme avait pris le soin d'ajouter une mayonnaise maison divine. Cette mayonnaise surpassait tout, cette mayonnaise cristallisait la beauté de son plus beau souvenir. Des années plus tard, il avait demandé à sa femme: « Peux-tu refaire ta mayonnaise? » Elle avait répondu: « Je ne me souviens plus de la recette. » Mon grand-père n'acceptant pas cette réponse, y voyant sûrement bien davantage que l'oubli d'un ingrédient, y voyant la fin d'une époque, y voyant quelque chose de tragiquement révolu, harcela sa femme pour qu'elle reproduise la fameuse mayonnaise. Il resta des heures en cuisine avec elle, goûtant chaque tentative, s'emportant pour un zeste de citron mal venu. Rien à faire, il n'avait aucun moyen de retrouver cette forme étrange de paradis perdu. "
D. Foenkinos
Lu dans
David Foenkinos. Les souvenirs. NRF Gallimard. 2011. 266 pages. Extrait p. 19